La question des l'universalite des droits de l'homme dans les manuels relatifs aux droits et libertés( Télécharger le fichier original )par Mohamed Hedi SEHILI Université Montpellier 1 - Master recherche Droit constitutionnel et théorie du droit 2007 |
B. La conception substantielle, seule, garantit l'effectivité des droits de l'hommePour Gilles Lebreton, l'Etat qui, étant à la fois esclave et protecteur des libertés, tire sa légitimité de son aptitude à les développer et à s'y soumettre. Pour que cette « mission soumission »71(*) caractéristique de l'Etat de droit soit menée à bien, deux conditions doivent être réunies. Il faut d'une part que l'action des gouvernants soit enserrée dans une hiérarchie des normes, au sommet de laquelle figure la déclaration des droits, d'autre part que les juges soient suffisamment indépendants pour en sanctionner la méconnaissance72(*) Donc la déclaration des droits doit être placée au sommet de la hiérarchie des normes afin de préserver les droits de l'homme et les libertés publiques, mais certains autres auteurs définissent l'Etat de droit comme suit : « un système juridique présentant les propriétés suivantes : 1/ des formulations de normes suffisamment précises pour que leur application a) permette une orientation claire aux destinataires, b) ne laisse que la plus faible place possible à l'arbitraire et c) que l'on puisse vérifier la conformité de l'application aux normes de référence ; 2/ des procédures permettant de contrôler effectivement la conformité des normes d'application aux normes de rang supérieur selon le rapport de production. Il s'agit de caractéristiques (...) strictement formelles et non du contenu souhaité de ces normes. »73(*) Mais, si l'on considère l'Etat de droit comme un simple agencement de normes, on risque de porter atteinte aux droits de l'homme et aux libertés publiques et par conséquent de transgresser la démocratie. Certains auteurs, se basant sur la neutralité axiologique, refusent de donner au contenu de la règle juridique une importance dans l'appréciation de sa validité. Cette position est certes respectueuse de la logique positiviste, toutefois elle risque de déroger à la démocratie et de porter atteinte aux droits de l'homme. La théorie pure du droit, formulée par Kelsen est l'exemple emblématique de cet excès scolastique du positivisme, en effet sa théorie lui a permis d'en déduire que tout Etat est un Etat de droit. Par opposition à cette conception purement formelle de l'Etat de droit, une autre approche plaide en faveur d'un droit apprécié substantiellement et non formellement, plus exactement l'Etat de droit « suppose que le droit ne soit pas le droit de n'importe quel Etat »74(*). Le professeur Patrick Wachsmann affirme à cet égard que « le concept Etat de droit repose sur la conviction que l'individu est primordial et que l'Etat n'est légitime qu'à la condition d'être ordonné à l'épanouissement de cet individu »75(*). Donc l'Etat de droit doit veiller à préserver les droits fondamentaux des individus en tenant compte de leurs intérêts et de leur dignité. La garantie des libertés constitue l'une des premières taches de l'Etat de droit, notamment la liberté de la presse, de conscience, de religion, d'opinion...etc. Le juge constitutionnel dans cette conception substantielle de l'Etat de droit doit veiller au respect de ces libertés et ce en sanctionnant les lois qui pourraient les restreindre ou les limiter. Le juge constitutionnel ne doit pas être un lit de justice, au contraire il doit apprécier les lois substantiellement pour garantir leur effectivité. La figure du juge constitutionnel doit changer avec cette conception de l'Etat de droit, il devient un juge défenseur de la transcendance des droits de l'homme et non seulement un gardien du droit positif. En définitive, la conception substantielle de l'Etat de droit est la conception la plus adéquate avec le modèle démocratique- libéral. * 71 Gilles Lebreton, libertés publiques et droits de l'homme, Paris, Armand Colin, Coll. U, 1995, p. 24 * 72 Ibid * 73 Lebreton (G) et alii : Droit constitutionnel, Dalloz, Coll. Précis, 2001, page. 81 * 74 Levinet (M), Théorie générale des droits et libertés Bruxelles : Bruylant, p. 210 * 75 Ibid |
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