Liberté de presse et accès aux informations administratives en république du Bénin( Télécharger le fichier original )par Stéphane SONON Université de Nantes - DEA 2004 |
A- Les journalistes et l'administration béninoiseSi au Bénin, la vie démocratique tend à se maintenir comme une réalité, elle n'empêche pas pour autant la forte tendance à la rétention de l'information administrative, souvent injustifiée. Or, le déficit de circulation de l'information favorise la rumeur et le recours à des pratiques contraires à la déontologie. C'est ainsi que pour se procurer l'information administrative, l'on voit au Bénin certains journalistes changer leur véritable identité et leur qualité. D'autres font chanter le détenteur de l'information. Il peut s'agir d'un directeur de société, d'un cadre de l'administration ou d'un simple agent de la fonction publique. Le journaliste lui annonce que l'organe de presse possède une information (compromettante ou non) sur sa personne ou sur son service. Si le fonctionnaire est «compromis», il envisage avec le journaliste une compromission. Cette «compression» peut consister entre autres, en un paiement de somme ou un engagement à fournir à l'organe une annonce publicitaire. L'affaire est ainsi «classée», au détriment du citoyen. L'existence d'une loi sur l'accès à l'information et des procédures claires auraient permis à ce journaliste ou un autre journaliste de recueillir directement l'information recherchée et de la publier. Or, en l'état actuel, c'est le « but de l'information» et «la personne qui la recherche » qui déterminent l'Agent public à répondre au journaliste. Au Bénin, la majorité des journalistes, à tort ou à raison, est considérée comme «l'homme» d'un groupe politique ou d'un groupe d'intérêt dans l'ombre. Une autre hypothèse consiste pour le journaliste à publier l'information, sans entrer dans les détails. Le fonctionnaire corrompu, se rapproche lui-même du journal pour «négocier». Cependant, il arrive que ce soit une démarche tout à fait contraire qui se constate. Le rapprochement du journaliste de l'administration, oblige l'Agent de l'Etat à corriger les dérives. Selon, le responsable d'une association professionnelle, «la bonne foi du journaliste peut être quelquefois mal comprise par l'Agent qui peut assimiler automatiquement son rapprochement (pour la vérification d'une information), à un début de chantage. Quelquefois, c'est après la publication de l'information que l'agent qui a refusé de la communiquer se rapproche de vous pour apporter des compléments ou des rectificatifs88(*) ». Le journaliste qui se voit refuser l'accès à l'information verse dans la propagation des rumeurs avec toutes ses conséquences. Il induit les citoyens en erreur et crée parfois des troubles à l'ordre public, en fonction de la gravité de la rumeur propagée. La situation actuelle qui se manifeste dans la presse béninoise crée une crise de confiance ente l'Agent, le journaliste et le public. Si elle ne favorise pas totalement le recours à des médias étrangers chez certains consommateurs des médias, elle installe dans la société une image caricature du journaliste, vu comme un «maître chanteur» ou comme «un colporteur de rumeurs». Ce qui ne contribue pas à l'épanouissement d'une vie démocratique. La bonne gouvernance qui conditionne la bonne qualité de la vie démocratique impose donc la fluidité de la circulation de l'information entre l'administration et les journalistes. * 88 Entretiens avec un journaliste, responsable d'une association professionnelle |
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