) L'omniprOsente tutelle de l'Etat français
A côté des IMF a but lucratif (banques
que l'on retrouve - sans exclusive toutefois - davantage dans les
ex-pays communistes d'Europe de l'Est que dans les pays du Tiers- Monde), les
trois autres grandes catégories d'Institutions de MicroFinance se
trouvent être financièrement alimentées par des subsides,
entre autres de l'Etat français, la France ayant toujours occupé
une place singulièrement importante dans l'aide au
développement,
notamment en faveur du continent africain, pour lequel elle est
le 1er pays du monde en
terme d'aide publique.
Se retrouvent donc financièrement accompagnées par
notre pays :
12 Sociétés de Capital-Risque
- les IMF dites participatives (dont les ONG),
- les IMF mutualisOes (cas de l'Afrique de l'Ouest comme il est
dit supra),
- a fortiori les IMF gouvernementales ou OtatisOes (comme
les CRC, Coopératives
Rurales de Chine).
Cet accompagnement financier, absolument indispensable a
la plupart des IMF qui interviennent partout dans le monde, repose en
France sur la mobilisation de deux institutions d'importance
inégale : les services du Quai d'Orsay et l'AFD (Agence
Française
de Développement, CF. ANNEXE 2), qui naturellement
collaborent.
Concernant le MAE (Ministère des Affaires
Etrangères), ce sont les imposantes DGCID
(Direction Générale de la Coopération
Internationale et du Développement) sous le patronage de Philippe
Etienne depuis janvier 2005 et DDCT (Direction du Développement
et de la Coopération Technique) qui sont chargées
de l'allocation des enveloppes aux IMF.
Source : MAE (DRH) - Contact : 20, rue Monsieur 75700 PARIS
Plus particulièrement, la DDCT communique directement
avec une douzaine d'opOrateurs techniques qui travaillent sur le terrain
tandis que c'est la MCNG (Mission pour la Coopération
Non-Gouvernementale) qui collabore, comme son nom l'indique, avec les
ONG présentes sur un théâtre. Concrètement, les
relations tissées par cette mission entre
le MAE et les ONG depuis 1999 représentent 40 projets de
développement économique, rural autant qu'urbain, pour la somme
de 8,235 M€, soit un cofinancement de la France a
hauteur de 30% de chacun de ces projets. La somme est
ridiculement petite, car 100% des
ressources publiques des 266 ONG et associations de
volontaires ont la même origine : l'APD (Aide Publique au
Développement), qui les finance annuellement a hauteur de 71M€
(somme qui ne prend pas en compte les montants versés a la Commission
Européenne qui
les redistribue aux ONG), et dont l'origine, la forme et la
ventilation géographique sont les
suivantes :
Origine de l'APD de la France versée aux ONG
75,00%
67,89%
50,00%
25,00%
0,00%
8,03%
15,21%
7,46%
1,41%
MAE : adm inis tration centrale
MAE : pos tes a l'étranger
collectivités locales
AFD autres m inis tères
Source unique : MAE (2003)
Répartition des crédits accordés aux ONG
La coopération non gouvernementale française
Asie
autres zones
2,00%
France
Afrique hors
commandes
19%
autre
1%
11,00%
Maghreb & Moyen-Orient
9,00%
15,00%
Maghreb
46,00%
subventions
80%
Europe hors
UE
4,00%
Amérique Latine & Caraïbes
13,00%
Le dernier graphique est pour nous l'occasion de rappeler
que le MAE a compétence
discrétionnaire pour déterminer chaque année
sa ZSP (Zone de Solidarité Prioritaire), dont
la plus récente disponible comprend :
- toute l'Afrique (pays les plus aidOs : Guinée :
0,87M€, Sénégal : 1,76M€, Mali : 1,80M€,
Burkina-Faso : 2,34M€, Madagascar : 2,79M€), sauf la Libye,
l'Egypte, la Somalie, la
Zambie et le Botswana
- le Proche et Moyen-Orient a travers le Liban,
les TAP (Territoires Autonomes
Palestiniens, 1,20M€), l'Irak, l'Afghanistan et le
Yémen
- l'Asie du Sud-Est : le Laos, le Vietnam (1,30M€) et le
Cambodge (1,57M€)
- une poignée de pays de l'ensemble
Caraïbes-Pacifique : Cuba (1,66M€), Haïti
(0,88M€), République Dominicaine, Surinam et
Vanuatu.
Concernant a présent l'AFD, son action est venue se
substituer a celle des banques de développement, après le constat
d'échec que celles-ci ont elles-mêmes dressé, même si
le Conseil de l'Europe a maintenu la sienne créée
dès 1956 : la CEB (la Banque de développement du Conseil de
l'Europe). Le parcours de l'AFD, fondée quant a elle en 1941 par le
Général de Gaulle, sous le nom de Caisse de la France Libre puis
Caisse Française
de Développement, retrace au moins 20 ans de partenariat
entre la Coopération française
et la Microfinance.
Entre 1983 et 1991, elle accompagne les programmes
d'expérimentation de nouvelles formes d'intermédiation
financière, comme la mutation, en 1989, de la COOPEC
(COOPérative d'Epargne et de crédit du Congo-Brazzaville)
en MUCODEC, le statut de MUtuelle COngolaise D'Epargne et de
Crédit permettant d'atteindre une frange de population
autrefois exclue des produits et services de la microfinance
coopérative.
Entre 1991 et 1995, l'AFD se charge d'une double mission
semblant aller dans le bon sens, celui de la formalisation progressive :
d'abord, assurer la pérennité des IMF, c'est-a-dire leur
rentabilité, par la multiplication de partenariats multiformes entre
elles et les banques privées ; ensuite, davantage utiliser les NTIC
(Nouvelles Technologies d'Information et de Communication) pour
développer les nouveaux produits d'avenir de la microfinance (a
l'instar de la microassurance et de la protection sociale).
Riche de la conduite de près de 390
opérations entre 1987 et 2004 pour une valeur de
390M€, l'Agence s'est résolument engagée au
service de l'OMD1, le 1er Objectif Millénaire pour le
Développement : la réduction significative a l'horizon 2015
de l'extrême pauvreté dans le monde, et c'est en faveur de ce
chapitre qu'elle entend réformer le cadre informel dans lequel les IMF
évoluent aujourd'hui pour la plupart.
Institution publique, l'AFD a donc ceci de paradoxal : elle
contribue au même titre que le MAE a alimenter la perfusion d'argent
public qui maintient en activité l'écrasante majorité des
IMF et ONG, tout en affirmant le plus souvent avec succès un cap clair
en faveur de la formalisation économique des acteurs du
développement. Parmi ses projets-phares, nous
retiendrons :
- un soutien solide a la crOation d'IMF : 1,5 M de
bénéficiaires directs, 6 a 7 M de personnes touchées
indirectement via ces IMF,
- la mise en oeuvre innovante d'une facilitO
d'investissement en microfinance, sur subvention d'Etat, qui permet de
réaliser des investissements en fonds propres ou quasi fonds
propres dans des IMF, en création ou en cours de transformation, ou dans
des fonds d'investissement en microfinance - l'AFD s'est a cet égard
dotée de 20M€ en
2004, devenus 230M€ pour l'année 2007,
- l'habituelle aide au dOveloppement qu'elle ne
questionne pas : 54% en faveur de l'Afrique subsaharienne, 31% en
direction des pays asiatiques, le reste se répartissant entre les
Caraïbes et les pays arabes,
- la tutelle qu'elle exerce sur les 2,165 M€ de budget
du PRAOC (Programme Régional d'Appui aux Opérations
d'épargne et de Crédit décentralisé) dont le
siège se situe a Ouagadougou au Burkina Faso.
Confortée par le Rapport d'information
n°46 du sénateur Charasse de 2005-2006 (CF. ANNEXES 3
ET 4) et intitulé Fonds octroyOs aux organisations non
gouvernementales françaises par le ministère des affaires
Otrangères, l'analyse faite ici de la mainmise de l'Etat sur le
fonctionnement des IMF conduit a relever cinq incohérences fortes :
le cofinancement public des IMF en
général et des ONG en particulier est insuffisamment
affichO : le logo du MAE ne figure pas sur tous les projets financés et
une ONG comme Coordination Sud - épinglée par la Cour des Comptes
- déclare
un taux de 13% de subsides publiques contre 54% dans la
réalité -
0 aucune des subventions publiques indirectes (locaux du Quai
d'Orsay loués a des
ONG a des prix très en deça de ceux du
marché) n'est prise en compte dans la part
de cofinancement public ; s'y ajoute une pratique de
survalorisation des apports autonomes des ONG afin de rehausser les apports
publics (plafonnés a 50%) -
0 l'existence de « subventions gigognes » laisse
supposer que de l'argent public est parfois alloué sans connaître
le bénéficiaire -
0 le MAE ne semble pas maîtriser la définition
de ses objectifs et de ses moyens : cela conduit a la coexistence d'une
contraignante dualitO d'objectifs entre la politique de coopération et
celle de développement de la France -
0 il existe enfin de réelles faiblesses dans le
contrôle de gestion de la DGCID (qui
délègue a des opérateurs la gestion de
près de 75% de ses crédits) ; de plus
s'impose le constat d'un suivi lacunaire des projets en cours de
la part de la MCNG (qui formule peu d'ordres de reversement des surplus et
n'édite aucune facture).
Force est donc de constater que ces carences fortes qui
précarisent une économie déja souterraine plaident pour un
relais croissant du secteur formel et de ses méthodes.
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