B) Le principe de la légalité des
délits et des peines
« Les peines encourues par une personne accusée
d'activités terroristes doivent être prévues
par la loi pour une action ou une omission qui constituait
déjà une infraction au moment où elle a
été commise ; aucune peine plus forte que celle qui
était applicable au moment où l'infraction a
été commise ne peut être infligée » (114).
Cette ligne directrice reprend les éléments
contenus dans l'article 7 de la Convention européenne des
droits de l'homme qui consacre le principe de la
légalité des délits et des peines (115).
L'article 7 § 1 de la Convention consacre les règles
« nullum crimen sine lege » et « nulla poena sine
lege ».
Il s'agit de principes fondamentaux de droit pénal qui
sont reconnus par de nombreux pays.
La prééminence de l'article 7 est soulignée
par le fait que l'article 15 § 2 interdit de déroger à
l'article 7.
Les principes fondamentaux auxquels l'article 7 § 1 fait
allusion sont les suivants : la légalité des infractions, la non
rétroactivité des infractions, la légalité des
peines, la non rétroactivité des peines.
Ces principes s'inspirent de l'idée de
sécurité juridique des citoyens, ce qui est punissable et
les sanctions qui y sont attachées doivent être
prévisibles.
Le principe est clair, il n'y a pas d'infraction sans base
juridique. Le principe contraint le juge
à ne jamais se fonder sur l'usage ou la coutume pour
créer une incrimination.
Le citoyen doit être au courant des normes qui sont
applicables, le droit doit être accessible et prévisible.
La sécurité juridique exige que le citoyen
sache quel comportement fait l'objet d'une incrimination.
Cette exigence est mise en danger si l'incrimination n'est pas
claire. Le principe de la légalité des délits et des
peines comporte l'exigence d'une interprétation pas trop
extensive des
infractions. Le principe de légalité des
délits et des peines exclut l'interprétation par analogie.
114) Comité des Ministres du Conseil de l'Europe,
« Lignes directrices sur les droits de l'homme et la lutte contre le
terrorisme/Textes
références », point X, p.23.
115) « Nul ne peut être condamné pour
une action ou une omission qui, au moment où elle a été
commise, ne constituait pas une infraction d'après le droit national ou
international. De même il n'est infligé aucune peine plus forte
que celle qui était applicable au moment où l'infraction a
été commise. » (article 7 § 1 de la Convention
européenne des droits de l'homme)
La cour distingue trois principes faisant parties de l'article 7
: le principe «pas d'infraction, pas
de peine sans texte légal», le
principe de la non rétroactivité pénale et
l'interdiction d'interprétation par analogie.
La cour a eu l'occasion de rappeler le caractère
fondamental du principe de la légalité des délits
et des peines lors de l'affaire « S.W et C.R c.
Royaume-Uni du 22 novembre 1995 » (116).
La cour a ainsi rappelé que :
« La garantie que consacre l'article 7,
élément essentiel de la prééminence du droit,
occupe une place primordiale dans le système de protection de la
Convention, comme l'atteste le fait que l'article 15 n'y autorise aucune
dérogation en temps de guerre ou autre danger public.
Ainsi qu'il découle de son objet et de son but, on doit
l'interpréter et l'appliquer de manière à assurer une
protection effective contre les poursuites, les condamnations et
sanctions arbitraires ».
L'article 7 § 1 pose également le principe de la
non-rétroactivité de la loi pénale au profit de la
personne concernée. Son comportement doit constituer une
infraction au moment où il a été commis.
Portalis avait souligné l'importance de ce principe
bien avant la Convention européenne des droits de l'homme lorsqu'il
avait dit :
« Le législateur ne doit point frapper sans
avertir ; s'il en était autrement, la loi, contre son objet essentiel,
ne se proposerait pas de rendre les hommes meilleurs, mais seulement de les
rendre plus malheureux. » (117).
Le projet de loi antiterroriste britannique qui doit
être présenté au Parlement britannique d'ici
l'automne, s'il était adopté tel quel, porterait une
sérieuse atteinte au principe de non rétroactivité
de la loi pénale.
En effet la loi prévoit de punir l'incitation à la
haine religieuse et raciale de façon rétroactive. Au nom de la
lutte antiterroriste on ne peut restreindre les droits intangibles.
En revanche il est possible, sous certaines conditions, de
restreindre certains droits.
116) Affaire « S.W et C.R c. Royaume-Uni » du
22 novembre 1995, série A n° 335-B et 335-C, pp.41-42 et pp
68-69.
117) Larguier (J), Le droit pénal (collection Que
sais-je ?), PUF, Paris, 15e édition, 2004, p.20
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