RESUME
La comparaison du régime juridique du
chèque entre le code de
commerce du Mali de 1992 et la loi sur les instruments de
paiement dans l'Union
Economique et Monétaire Ouest Africaine (
U.E.M.O.A.) de 1997, tourne
essentiellement autour de l'analyse des mesures
préventives et répressives
des incidents relatifs aux chèques.
Cette prévention se caractérise par la
police bancaire et la
centralisation des incidents.
Pour ce qui est de la police bancaire, elle a pour
vocation première
de vérifier si les chèques
présentés au banquier sont provisionnés ou pas. Dans
l'hypothèse où il y a défaut de
provision, le chèque sera rejeté et le tireur recevra
une lettre d'avertissement pouvant être suivie
dans certains cas d'une lettre
d'injonction.
Quant à la centralisation , elle est l'oeuvre des
établissements
déclarants et de la Banque Centrale . Les
établissements déclarants sont
chargés d'enregistrer et de déclarer les
incidents à la Banque Centrale .
A son tour , la Banque Centrale reçoit ,conserve
et diffuse les informations
reçues aux personnes indiquées par la
loi.
En plus de la prévention, il y a la
répression (un aspect non moins
important) qui consiste :
-d'une part, à délivrer au porteur
impayé un certificat de non-
paiement. Avec ce certificat, le porteur, par
ministère d'huissier de justice,
va réclamer sa créance au tireur. Mais,
dans l'hypothèse ou un banquier
règle le montant du chèque sans provision,
il se verra subroger dans le
droit du porteur.
-d'autre part, il y a l'interdiction d'émettre un
chèque. Elle peut être
prise par le banquier ou prononcée par la justice.
Cependant, cette interdiction
souffre de deux limites qui sont : la
régularisation ( a priori ou a posteriori) et
l'annulation, quand les conditions sont
réunies.
INTRODUCTION
L'origine du chèque fut fixée selon les
auteurs à différentes périodes de
notre histoire . Pour certains, elle remonte au
moyen-âge, pour d'autres au 18 ème
siècle . Comme l'origine, le vocable du
chèque a divisé les opinions . Une
première opinion pense que le mot
« chèque » viendrait du verbe anglais « to
check » ( vérifier ) et du vieux
français « escheck » qui signifie échec . La
deuxième opinion penche pour une origine arabe du
terme chèque qui
proviendrait du terme
arabe « shak » ( mandat ).
Toutefois, le chèque est un titre de paiement
apparu en France en 1865 par
la loi du 14 juin . Il se définit comme
étant un titre par lequel une personne
appelée « tireur » donne
l'ordre à un banquier ou un établissement assimilé, le
« tiré », de payer à
vue une somme déterminée soit à son profit, soit à
une
troisième personne appelée
le « bénéficiaire » ou porteur, soit
à son ordre .
En Afrique francophone, à l'indépendance,
chaque Etat avait sa propre
réglementation. Au Mali, c'est la loi du 27
août 1992 portant code de
commerce qui régissait le domaine du
chèque. Mais, au Mali, tout comme
dans les autres pays francophones, lesdites
réglementations ont montré
leurs limites, les agents économiques semblant
préférer de loin la monnaie
fiduciaire à la monnaie scripturale. C'est
pourquoi la Banque Centrale des
Etats de l'Afrique de l'Ouest ( B.C.E.A.O )
« institution financière spécialisée »
de
l'Union Economique Monétaire Ouest Africaine (
U.E.M.O.A) avait suggéré la
mise en oeuvre d'un nouveau « plan de
circulation » du chèque à travers une
nouvelle loi uniforme sur les instruments de
paiement.
S'il y a une nouvelle loi c'est parce que l'ancienne
législation sans être
désuète, n'en comportait pas moins des
limites objectives que viennent prendre en
compte les innovations introduites par ce nouveau
texte.
La première innovation tient à
l'uniformisation à l'échelle de notre union
économique et monétaire, de la
réglementation sur les effets de commerce. Elle se
présente comme une application pure et simple de
l'article 22 du titre VI de
l'U.E.M.O.A, qui prescrit l'adoption en matière
bancaire et monétaire d'un
système normatif s'inscrivant dans une logique
d'intégration. L'uniformisation
participe par conséquent à la levée
de toutes les barrières susceptibles de
constituer des entraves à la création d'un
espace économique unique.
La deuxième innovation tient à la
normalisation prescrite pour le chèque
par l'article 3 de la Loi Uniforme sur les
Instruments de Paiement ( L.U.I.P ). Elle
consiste à définir des règles
identiques relativement à la structure des instruments
de paiement .
La troisième innovation concerne la centralisation
des incidents de
paiement . Elle consiste en une collecte et un stockage
systématique des incidents
de paiements recensés en vue de leur diffusion au
niveau du public . Il faut voir
dans un tel dispositif de centralisation, en plus d'un
puissant outil d'information
du public, un moyen efficace de police et de
répression des impayés conféré pour
la première fois aux établissements
bancaires, mais dont la sévérité apparente est
toutefois atténuée par la
possibilité d'une régularisation a priori et même a
posteriori .
De là on peut parler d'un allégement du
dispositif pénal ou dépénalisation1.
Après ce bref survol des innovations
apportées par la nouvelle loi sur les
instruments de paiement, une question mérite
d'être posée par rapport à la
portée de la nouvelle loi .
A analyser de près, on voit que la nouvelle loi a
une double portée par
rapport à l'ancien code de commerce malien .
Primo, au niveau de la prévention des incidents de
paiement . Dans le code
de commerce du Mali ( C.C.M.) le ton était
plutôt à la punition . Du reste, la forte
pénalisation ne permettait pas de faire la
distinction entre les utilisateurs
malhonnêtes du chèque seuls voués
à la justice pénale ( ce qui est le cas
aujourd'hui) et les imprudents, alors que la loi uniforme
sur les instruments de
paiement de l'U.E.M.O.A. ( L.U.I.P-U.E.M.O.A ) cherche
à prévenir .
D'abord cela se ressent d'une part au niveau de la
prévention des incidents
de paiement à travers la police bancaire qui
contrôle la régularité du chèque, et là
le chèque ainsi contrôlé peut
être accepté et payé. Il peut aussi être
rejeté, ce qui
met en branle la puissante machine bancaire conduisant au
rejet du chèque, à
l'avertissement et même à l'injonction de
restituer les formules de chèques par le
tireur indélicat.
1- Dans le sens de la dépénalisation des
émissions de chèques sans provision Cf, Cass . Crim . 22 Janvier
1974, Bull . Crim . 1974, N0 30, P . 72 ; adde Rev .
Trim . Dr . Com 1984, 119, obs ; adde Cass . Crim . 4
Février 1985, D . 1986, I.R. 406 .
Et d'autre part, son caractère préventif se
perçoit au niveau de la
centralisation des incidents de paiement
conférée aux banques et établissements
assimilés et aussi à la Banque Centrale
.
Ensuite, cette idée de prévention
apparaît au niveau de la répression
desdits incidents car, pendant que le C.C.M . pensait
à punir et à interdire,
souvent de façon inadaptée, la
L.U.I.P-U.E.M.O.A songe à l'amélioration du sort
des victimes de chèques impayés en
instaurant une procédure de recouvrement, à
savoir le certificat de non-paiement qui va permettre
à la victime du chèque
impayé de recouvrer illico presto sa
créance et cela sans préjudice des
interdictions judiciaires et/ou bancaires qui peuvent
frapper le tireur fautif .
C'est aussi important de noter que ces interdictions ne
comportent pas moins des
limites qui sont la régularisation et l'annulation
.
Ainsi il apparaît que la nouvelle loi revêt
un caractère répressif
( IIèmepartie), même si
l'essentiel de ses dispositions sont de nature préventive
( Ière partie ) en matière
d'incidents de paiement sur le chèque bancaire.
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