Le statut des réfugiés au Cameroun- étude critique de la loi n°2005/006 du 27 juillet 2005( Télécharger le fichier original )par Simeon Patrice KOUAM Université de Yaoundé II - Diplôme d'Etudes Approfondies (DEA) en Droit Privé Fondamental 2004 |
A- Les garanties sécuritairesFondamentalement, il s'agit des premières mesures d'urgence (1) et du choix du site (2) devrant abriter les réfugiés. 1- Les mesures d'urgence 169. Elles ont beaucoup plus concerné les réfugiés tchadiens descendus sur la frontière Tchad-Cameroun.187(*) L'arrivée massive et soudaine des réfugiés Tchadiens en vagues successives entre 1989 et 1990 a conduit les autorités nationales des forces de maintien de l'ordre à prendre les premières dispositions pour parer à une détérioration de la zone d'accueil et à éviter toute atteinte aux relations amicales entre le Cameroun et le Tchad. 170. Le gouvernement camerounais en collaboration avec la Croix-Rouge a fourni une aide d'urgence composée d'aliments, de vêtements, des ustensiles de cuisine, des bâches plastiques blanches ou bleues servant à la construction des cabanes.188(*) Cependant, il convient de noter que les premières mesures d'urgence ne se limitent pas seulement à dispenser aux réfugiés les soins médicaux dont ils ont besoin pour leur subsistance. Ces mesures d'urgence sont également la garantie de la sécurité physique et la préservation des bonnes relations entre le Cameroun et le Tchad. 171. Nous savons en effet qu'un camp de réfugié situé à proximité de la frontière du Tchad peut provoquer des attaques militaires, être considéré comme une base commode pour les forces insurgées ou envenimer les tensions politiques. Pour parer à de telles éventualités et participer au maintien de la paix et la sécurité, le gouvernement camerounais a notifié au HCR/PNUD du Tchad sa volonté d'éloigner les réfugiés tchadiens de la frontière de leur pays d'origine. La requête a été favorablement accueillie au Tchad qui a aussitôt apporté son appui à l'initiation et à l'élaboration d'un projet comportant un volet sur le choix du site devrant abriter les réfugiés. 2- Le choix du site 172. Elément fondamental pour la sécurité des réfugiés, le choix du site doit tenir compte des structures sociales. En effet, pour les réfugiés tchadiens composés notamment des femmes âgées et d'enfants, une mauvaise configuration du site pourrait les rendre encore plus vulnérables. Ainsi, pour faciliter l'intégration des réfugiés tchadiens, le gouvernement a soumis au choix, les sites de Poli/Fora et de Taparé près de Garoua. Le choix de ces localités a fait l'unanimité entre les autorités locales et le HCR/Cameroun.189(*) En 1999, il a été crée un camp à Langui dans le Nord. C'est dans ce camp qu'on a logé les Congolais en transit pour l'Amérique du Nord et l'Europe occidentale en 1999. Quoi qu'il en soit, au bout du compte, le rapatriement reste le souhait du Cameroun qui met également en place un dispositif particulier. B- Le rapatriement 173. La majorité des réfugiés choisissent de retourner chez eux dès que les circonstances le permettent, en général une fois que le conflit a pris fin, qu'une certaine stabilité a été rétablie et que les infrastructures de base sont en cours de reconstruction. Le HCR encourage le rapatriement volontaire qu'il considère comme la meilleure solution pour les populations déracinées.190(*) A côté du rapatriement organisé (1) il y a le rapatriement spontané (2). 1- Le rapatriement organisé 174. Une initiative de rapatriement prise par le gouvernement ou le HCR ne peut pas s'imposer aux réfugiés, celle-ci est toujours soumise à leur agrément. Le Cameroun a pris toutes les dispositions nécessaires pour que les conditions de sécurité soient garanties avant et pendant le rapatriement le long des routes et dans les régions où rentrent les réfugiés. Ces derniers ont reçu dans la mesure du possible les informations complètes et objectives sur la situation qui règne dans leurs pays d'origine afin de pouvoir prendre une décision en toute connaissance de cause. Cela s'est illustré par le cas de 500 réfugiés tchadiens quittant volontairement Douala les 20 et 21 juillet 2001191(*) à destination de leur Tchad natal. Le représentant du HCR au Cameroun, Jacques FRANQUIN disait : « nous essayons de créer des conditions adéquates de rapatriement et dignes des droits de l'homme ; je veux dire recréer des infrastructures et un arsenal de protection pour que les gens puissent rentrer chez eux dans de bonnes conditions. Nous avons un formidable exemple au Cameroun ; nous sommes en cours de rapatriement de 17 000 réfugiés nigérians venus dans les régions de Banyo et Ngambe. Sur les 17 000, 7900 sont déjà rapatriés et d'ici la fin de l'année, nous espérons réaliser le même nombre. Tous les réfugiés nigérians seront chez eux d'ici l'année prochaine ».192(*) Mais les réfugiés peuvent parfois ne pas attendre que le rapatriement soit organisé. 2- Le rapatriement spontané 175. Il arrive souvent que des réfugiés prennent unilatéralement et en toute indépendance la décision de rentrer dans leur pays d'origine sans attendre un plan de rapatriement officiel conçu sous bannière internationale. Dans une telle situation, le gouvernement d'accueil et le HCR, conformément à son mandat, ont le devoir d'aider les réfugiés qui décident d'exercer leur droit de renter dans leur propre pays. Cependant, il ne leur appartient pas d'encourager formellement de telles initiatives. Le Niger a eu une expérience de rapatriement spontané.193(*) En effet, le rapatriement spontané opéré par un groupe de huit somaliens en août 1996 est le résultat d'une initiative prise par ces réfugiés de rentrer. Ils avaient décidé de rentrer à leur rythme et sur la base de leurs propres intérêts, sans aucune médiation internationale, sans aucune assurance.194(*) 176. Au demeurant, les actions en faveur des réfugiés, au regard du cadre d'intervention ne vont pas sans soulever des difficultés majeures. C'est pourquoi on devrait envisager le perfectionnement du système camerounais de protection des réfugiés. SECTION 2 : LE PERFECTIONNEMENT DU SYSTEME CAMEROUNAIS DE PROTECTION DES REFUGIES 177. Le constat est clair, et on l'a souligné à souhait,195(*) le système camerounais de protection des réfugiés souffre d'un certain nombre de dysfonctionnements. On avait critiqué de façon acerbe le dispositif d'avant 2005. Mais la loi du 27 juillet portant statut des réfugiés au Cameroun elle-même n'est pas parfaite. Ainsi, la perfection pourrait venir de l'amélioration du système juridico-institutionnel (Paragraphe 1) et le renforcement des capacités des acteurs (Paragraphe 2). PARAGRAPHE 1 : L'AMELIORATION DU CADRE JURIDICO- INSTITUTIONNELLe cadre juridique (A) et le cadre institutionnel (B) nécessitent un toilettage. * 187Pour le cas des réfugiés espagnols de 1936, des mesures particulières n'auraient pas été prises à leur arrivée. Ils avaient été parqués à Douala, (dans le grand hangar de l'aéroport), à Yaoundé (à l'Ecole Supérieure) pour les uns, tandis que les autres avaient des logements de même nature à Ebolowa, Ngaoundéré, Messamena, et Nanga-Eboko. V. TCHUDJING (C).op. cit. p. 64. * 188V. NYEMB (P. R), op. cit. P. 15. * 189Ibid. p 16 * 190 Les réfugiés en chiffres. Edition 2004, publication du HCR. p. 14. * 191 Cameroon Tribune du lundi 23 juillet 2001. n° 7395. p. 10. * 192 Jacques FRANQUIN, interview accordé au quotidien Mutations, du 1er août 2005. p. 6. * 193 DJIBO (Mayaki Saïdou) "Le régime juridique des réfugiés au Niger". Mémoire de maîtrise en droit public. Université Abdou Moumouni Dioffo de Niamey, 1996 - 1997. p. 57. * 194Ibid. * 195 V. supra. Pp. 3 - 4. |
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