III.1.2 Les systèmes de contrôle internes
III.1.2.1 Les systèmes de
rémunération et d'incitation des dirigeants
Pour Jensen et Meckling, plus le dirigeant détient
d'actions, plus il maximise le profit et plus la performance de la firme
qu'il dirige est élevée et vis versa. L'attribution d'actions au
manager permet donc de limiter son opportunisme et d'aligner ses
intérêts sur ceux des propriétaires.
En fait, il existerait trois types de rémunérations
pouvant être octroyées aux dirigeants :
§ Des rémunérations fixes indépendantes
des performances de la firme.
§ Des rémunérations liées à
des agrégats comptables permettant de mesurer la performance. Afin
d'être efficaces, ces rémunérations doivent se
rapporter à des résultats connus ex post, qui
permettent sans difficulté, d'apprécier la qualité du
management de la firme. Ce type de rémunération peut aussi
avoir pour inconvénient d'inciter l'équipe dirigeante
à privilégier des indicateurs à court terme.
§ Des rémunérations liées aux cours
boursiers (distribution d'actions ou d'options). Ce type
de rémunération a pour objectif de faire
converger les intérêts des managers et des actionnaires et
de favoriser les investissements à long terme. P.Desbrieres62
souligne que
ce type de rémunération peut dans certains
cas inciter artificiellement le dirigeant à prendre des risques
pour accroître ses plus values boursières potentielles.
La plupart des systèmes de rémunération
présentent au moins un des trois défauts de base suivants : un
lien étroit entre l'augmentation des bénéfices et
le salaire quelques soient les conséquences pour la valeur
de l'entreprise ; une énorme importance accordée
à la
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performance à court terme (les gratifications annuelles
par exemple) ; une confiance presque
totale dans les systèmes de mesure comptables : les
bénéfices par action ou le rendement de
l `investissement servent souvent de fondement pour les
plans de rémunération à court et à moyen
terme63.
III.1.2.2 Le conseil d'administration
Selon une problématique propre à la
théorie de l'agence, E.F. Fama et M. Jensen (1983) distinguent le
decision management du decision control64. Le
premier renvoie aux droits d'initier et d'engager des propositions en
matière d'allocation des ressources, tandis que le second renvoie
aux droits de ratifier et de contrôler l'engagement des
ressources. Dans les grandes entreprises, le système de
decision control repose en grande partie sur le conseil
d'administration, émanation directe du vote des actionnaires, ce dernier
a en effet le pouvoir d'embaucher et de renvoyer les dirigeants de
l'entreprise, d'une part, et de ratifier et de contrôler les
décisions importantes, d'autre part.
Le conseil d'administration représente, donc pour
les théoriciens de l'agence, l'organe
principal de contrôle, complémentaire aux
mécanismes externes.
a. Mission et rôle du Conseil
d'Administration
Selon E.F Fama et M. Jensen, le conseil
d'administration a pour mission principale de défendre les
intérêts des actionnaires en limitant le pouvoir
discrétionnaire des dirigeants. Selon eux, « the board
is not an effective device for decision control unless it limits the
decision discretion of individual top managers65 ».
Le conseil d'administration a des responsabilités
claires : il doit vérifier que l'entreprise applique bien la
stratégie élaborée par le top management, tout en veillant
que cette stratégie débouche sur des choix judicieux. Il
doit aussi contrôler les initiatives stratégiques à
court terme et en évaluer la pertinence en fonction du calendrier, du
budget et des résultats désirés.
De surcroît, il doit s'assurer que l'équipe
dirigeante de la société est la plus performante
62 P.DESBRIERE, « Participation
financière, stock options et rachat de l'entreprise par
les salariés », Economica,1991.
63 Alfred RAPPAPORT, « Quand
l'actionnaire prend le pouvoir », l'Expansion Management
Review, N°90 ,1998, p.52.
64 E.F. FAMA et M.C. JENSEN, « Separation of
ownership and control », Journal of Law and Economics, n°26,
1983, p.301-326.
65 Op.cit.
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possible et que certains cadres supérieurs sont
formés pour assumer ultérieurement les
responsabilités du dirigeant.
En outre, le conseil d'administration doit veiller à ce
que l'entreprise ait des systèmes de contrôle, d'audit et de
communication des résultats adaptés aux objectifs. Il doit
s'assurer également que l'entreprise se conforme à la
législation et aux principes de sa charte déontologique.
Afin d'accroitre son efficacité, le conseil d'administration doit etre
assisté par des comités d'audit, de
rémunération et de nomination, composés par des
administrateurs indépendants.
Un conseil d'administration a besoin de ressources et de
compétence pour jouer son rôle, selon une étude du
centre pour la performance des organisations de la Marshall Business
School, il a besoin de connaissances, d'informations, de pouvoir, de motivation
et de temps66.
b. Composition du Conseil d'Administration
Pour E.F. Fama67, le conseil
d'administration doit comprendre en son sein, des administrateurs
internes, c'est à dire des individus qui participent quotidiennement
à la vie de l'entreprise et possédent des informations
spécifiques. Leurs rôles est d'informer les autres
administrateurs de ce qui se passe concrètement dans l'entreprise. Cet
auteur indique que cela suffit à contrôler l'opportunisme
du dirigeant, sauf en cas de collusion entre les
administrateurs internes et le dirigeant qu'ils sont chargés de
contrôler. Dans ce cas, afin de garantir l'indépendance du conseil
d'administration, la présence en son sein, d'administrateurs externes et
indépendants et spécialistes du contrôle, est
préconisée. Ce sont généralement des dirigeants
retraités, d'anciens dirigeants ou des dirigeants d'autres
sociétés. Préoccupés de leur valeur sur le
marché des administrateurs, ces derniers n'ont pas intérêt
à être soupçonnés de collusion avec le
management.
Concernant plus particulièrement le rôle
des administrateurs au sein du conseil d'administration, Fama estime
que l'intensité du contrôle exercé par ceux ci
dépendra de la différence de gain qu'il est possible de retirer
de leurs mandats (en terme de réputation, de
rémunération ou d'avantages en nature) et les coûts
inhérents à cette fonction d'administrateur
(en terme de temps consacré à la fonction ou de
risque lié à la fonction).
66 Jay CONGER, David FINEGOLD et Edward
LAWLER, « Que vaut votre conseil d'administration ? »,
l'Expansion Management Review, N°89 ,1998, p.7.
67 E.F.FAMA, « Agency problems and the Theory of
the firm », Journal of Political Economy,1980, p.288-307.
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