2.1.3 Les moyens de prévention de
l'extrémisme violent
Plusieurs études, évaluations et ateliers ont
traité de la prévention de l'extrémisme violent en Afrique
à l'instar de l'étude du PNUD (2017) citée plus haut,
intitulée « Sur les chemins de l'extrémisme en Afrique :
moteurs, dynamiques et éléments déclencheurs ».
Les auteurs indiquent que les gouvernements africains doivent
réexaminer leurs réponses militaires à la lutte contre
l'extrémisme religieux, et s'engager dans l'État de droit et en
faveur des droits de l'homme.
En effet, réagir aux crises avec des réponses
sécuritaires et répressives, plutôt que les
prévenir, peut être contreproductif. La lutte contre le terrorisme
a notamment pour effet de gonfler la part de budgets nationaux destinés
aux forces de défense et de sécurité, souvent au
détriment d'autres secteurs clefs de toute stratégie de
prévention comme les secteurs éducatifs et sociaux, mais aussi de
réduire l'espace des libertés publiques nécessaire aux
dialogues.
L'étude suggère également l'intervention
au niveau local, à travers l'appui aux initiatives communautaires
axées sur la cohésion sociale, ainsi que l'amplification de la
voix des leaders religieux locaux qui prônent la tolérance. Toutes
ces initiatives doivent toutefois être pilotées par des acteurs
locaux, dignes de confiance.
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2.1.4 Les facteurs de vulnérabilité à
l'extrémisme violent dans la région des
savanes
Penn (2020) dans son article nous montre que les conditions
socio-économiques, la pression démographique, les
conséquences du dérèglement climatique constituent des
déterminants majeurs favorisant l'insécurité dans la
région des savanes au Togo. En effet, les GANE exploitent les
vulnérabilités des populations pour gagner leur confiance et
s'installer au sein des communautés.
Tiem (2020) dans son mémoire de master interpelle sur
l'état d'insécurité dans la région des savanes.
Partant de la fabrication par des forgerons, de la détention de 1865
armes par des civils entre 2005 et 2008, 735 crimes commis à partir
d'une arme à feu, 324 vols à main armée ayant
entrainé des morts d'homme et surtout de la prolifération des
Armes légères et de petits calibres (ALPC), l'auteur montre
comment les grands fleuves sont devenus des canaux de choix pour acheminer les
armes et ceux provenant du Bénin et du Ghana pour le Togo, transitent
par le fleuve Oti et Mono. Les villes comme Cinkassé et Mango sont
devenues un grand carrefour d'armes à feu venant du Burkina Faso, du
Bénin et du Ghana dans la région des savanes. L'auteur montre
comment les jeunes constituant la main d'oeuvre valide empathisent et par
ricochet le développement socioéconomique. L'utilisation de ces
armes contribue à la dégénération des conflits
locaux et surtout à la montée des tensions. Cependant,
l'étude ne fait pas le lien entre la prolifération des ALPC et
l'exploitation du phénomène par les GANE.
Paka (2023) dans son mémoire a dressé le lien
entre la circulation des ALPC au Togo et son impact sur la
sécurité locale pouvant déboucher sur des actes
extrémistes. Selon l'auteur, la prolifération des armes
légères et de petits calibres amplifie le terrorisme. Une
étude publiée par le Small Arms Survey en 2018, estime
en effet que « 58 000 armes à feu seraient en possession des
civils au Togo, avec une estimation de 0,8 pour 100 personnes ».
Selon Small Arms Survey (2006),
La présence de groupes armés actifs ou latents
est faible et le Togo est une route de transit essentielle pour les armes de
contrebande en direction des pays comme le Bénin, le Ghana, la
Côte d'Ivoire et le Nigéria.
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Selon les données de l'Analyse Commune de Pays (CCA
2021) du Système des Nations au Togo, le développement
inégal actuel des régions au Togo creuse le fossé entre
les zones littorales (Sud du Togo) captant l'essentiel des dividendes de la
forte croissance économique et du succès de modernisation de la
grande région de Lomé, sans retombées
socio-économiques suffisantes pour le Nord du Togo. Ceci pourrait
favoriser le développement des groupes violents faisant
allégeance à des groupes terroristes qui pourraient avoir les
objectifs d'établir des relais utiles pour des opérations cibles
dans les zones côtières (exemple de la Côte d'Ivoire
à deux reprises ces dernières années).
Selon le rapport, le pays connaît des épisodes de
violence intercommunautaire de faible intensité. L'extrême
pauvreté touche près de la moitié (49,1 %) de la
population des savanes au Togo et près des deux tiers (65,1%) vivent
sous le seuil de pauvreté. De plus, la concentration des chaînes
d'approvisionnement pour le trafic en tout genre sont autant de facteurs pour
attirer des entités criminelles associées à des groupes
djihadistes. La persistance des inégalités (économiques,
sociales et genre), les conflits fonciers récurrents, la faible
présence des services de l'Etat, les conditions difficiles
d'accès aux services sociaux de base, la méfiance relative entre
la population et les forces de sécurité, l'importance du
chômage des jeunes, le repli sur des valeurs obscurantistes dans
l'interprétation des textes religieux, créent un terrain
favorable pour que les populations surtout les jeunes soient tentées par
des réseaux de trafics en tout genre (y compris les armes
légères) et des groupes terroristes qui ont d'autres ambitions et
agendas non dévoilés.
Selon le rapport, les facteurs de conflits sous-jacents dans
la région des savanes (préfecture de Kpendjal, Tandjouaré,
Tone et Oti) peuvent renforcer les facteurs de vulnérabilité de
la population vers des formes diverses de radicalisation. Dans ces mêmes
zones, les conflits fonciers créent des tensions entre les
communautés (Tchokossi et Ganganm) qui ont déjà fait
quatre morts le 26 juin 2019 et ce même conflit a refait surface en mai
2020 en attendant le jugement de la Cour d'appel de Kara.
Le rapport établi clairement le lien entre les
différents facteurs de vulnérabilité et
l'extrémisme violent mais a manqué d'aborder la proximité
de la région des savanes du Burkina où les attaques terroristes
sont beaucoup fréquentes et dont le débordement a des impacts sur
la région des savanes.
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