Les écrits théoriques font
référence aux théories à travers lesquelles l'on
peut cerner le contenu du sujet. Nous avons retenu quatre théories pour
essayer de comprendre par analogie les chemins qui mènent à
l'extrémisme violent : l'« état d'esprit terroriste »
de Randy Borum (2014), le modèle de l'escalier de Fathali M. Moghaddam
(2005), le modèle pyramidal, illustré par les travaux de Clark
McCauley et Sophia Moskalenko (2008), et le modèle des trois chemins
(three pathways) ou 3P de James Khalil (2017).
· L'« état d'esprit terroriste
»
Selon le psychologue médicolégal Randy Borum
(2011 ; 2014), le processus de préparation mentale à la violence
extrémiste est composé de quatre étapes cognitives : (1)
identifier une circonstance ou un événement négatif (comme
la marginalisation, l'absence de loi et d'ordre, la pauvreté, le
chômage ou l'insécurité) ; (2) concevoir la circonstance ou
l'événement comme une injustice ; (3) reprocher la circonstance
ou l'événement à une personne ou à un groupe
spécifique ; et (4) rendre la personne ou le groupe responsable de la
création de la situation injuste et en faire une incarnation du mal.
Borum met quasi exclusivement l'accent sur des facteurs de répulsion,
soit la pauvreté, l'exclusion et le fait d'être
négligé ou exclu de la vie politique ou socio-économique,
l'insécurité ou toute autre condition peu enviable. Le seul
facteur d'attraction pertinent mentionné dans ce cadre est le discours
qui présente l'extrémisme violent comme une solution à
tous ces problèmes.
· Le modèle de l'escalier
L' « escalier » de Moghaddam (2015) décrit
le chemin vers l'extrémisme violent comme un immeuble de cinq
étages de moins en moins peuplés à mesure que l'on
approche du dernier. Le premier étage est habité par un grand
groupe de personnes qui considèrent que « ce que l'on
perçoit comme juste est ce qui compte le plus », et que cela compte
plus que la vie que l'on mène. Les individus qui peuplent le
deuxième étage calquent leur attitude sur la perception qu'ils
ont de la possibilité d'améliorer leur situation et de la justice
procédurale. Ceux et celles qui tentent activement de «
déplacer physiquement l'agression » grimpent l'escalier qui les
mène au troisième étage, où ils peuvent s'impliquer
« dans la moralité extrémiste des organisations
isolées et secrètes dont l'objectif est de changer le monde
par
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tous les moyens possibles ». Au quatrième
étage, les individus sont membres d'une organisation terroriste qui, au
cinquième et dernier étage, se prépare à commettre
un attentat terroriste au nom de leur cause.
· Le modèle pyramidal
Dans cette analogie de McCauley et Moskalenko (2008), les
extrémistes violents sont représentés comme le sommet
d'une pyramide dont la base est constituée par les sympathisants de la
cause. Entre la base et le sommet, « les niveaux supérieurs sont
caractérisés par un nombre moins important de personnes, mais un
degré plus élevé de radicalisation des croyances, des
sentiments et des comportements » Ce modèle présente une
faiblesse : sa linéarité. Les individus montent et descendent
dans la pyramide dans un ordre bien spécifique.
· Le modèle des « 3 P
»
Le modèle des « 3 P » de James Khalil (2017)
part de l'hypothèse qui veut que les individus qui s'engagent dans
l'extrémisme violent ne soient pas tous de « vrais croyants »,
et qu'ils se situent, à différents moments ou
simultanément, à diverses étapes des modèles
linéaires précédemment décrits.
Selon ce cadre conceptuel, les « extrémistes
», les « partisans de l'extrémisme violent » et les
« acteurs de la violence » constituent trois catégories
distinctes d'acteurs qui se chevauchent. La première catégorie
« perpétue les valeurs idéologiques, politiques ou
socioéconomiques «extrêmes», mais elle peut soutenir ou
ne pas soutenir les actes violents commis pour atteindre ces idéaux
». La seconde catégorie, un sous-ensemble de la première,
rassemble les individus qui soutiennent à la fois les valeurs «
extrêmes » et l'usage de violence, mais ne commettent pas
eux-mêmes d'actes violents. Enfin, les « acteurs de la violence
» sont ceux qui commettent les actes violents au nom de certains
objectifs, ou se rendent complices de ces actes. Ils peuvent ou non être
de « vrais croyants », et certains sont simplement à la
recherche d'argent, d'un statut, d'une aventure, d'un sentiment d'appartenance
ou d'une certaine sécurité. Dans la même logique, Khalil
affirme que les trois chemins ne sont que rarement linéaires et que les
individus peuvent suivre différentes trajectoires pour parvenir à
l'extrémisme violent.
(rapports, reportages, journaux, documentaires, films, objets)
en rapport avec la thématique de
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CHAPITRE II : APPROCHE METHODOLOGIQUE, PRESENTATION DES
RESULTATS ET VERIFICATION DES HYPOTHESES
L'élaboration d'une méthodologie rigoureuse
constitue le pilier fondamental de toute recherche scientifique. Dans ce
chapitre, nous commencerons par exposer les choix méthodologiques qui
sous-tendent notre approche. Nous justifierons ainsi les raisons ayant
motivé le recours à telle ou telle méthodologie, en
soulignant la pertinence de ces choix vis-à-vis de notre
problématique de recherche. De plus, nous expliciterons la
démarche suivie pour collecter les données, en mettant en avant
les techniques et les outils qui ont été mobilisés dans ce
dessein. Par la suite, nous procéderons à la présentation
détaillée des résultats obtenus à l'issue de notre
étude. Enfin, ce chapitre sera l'occasion de soumettre nos
hypothèses à une série de tests rigoureux. Nous
confronterons les conjectures formulées au début de notre
recherche aux données réelles, dans le but de vérifier
leur validité et de confirmer, le cas échéant, leur
pertinence dans le contexte spécifique de notre étude.