La relation entre déficit budgétaire et le
déficit courant ne fait pas l'unanimité des économistes.
Dans la littérature qui affirme l'hypothèse des déficits
jumeaux, la nouvelle école de Cambridge représentée par
Godley et Cripps (1974) adopte l'une des premières approches
théoriques : la théorie «behavioriste». Les partisans
de cette école soutiennent l'idée selon laquelle tout
déficit budgétaire conduit à une
détérioration du compte courant. La théorie behaviouriste
admet donc l'existence d'une relation unilatérale allant du
déficit budgétaire vers le déficit du compte courant.
En outre, dans le cadre de la libéralisation des
marchés financiers, la plupart des gouvernements se sont
appropriés les fondamentaux de Keynes, à savoir pratiquer le
déficit public pour générer de la croissance.
Á ce sujet, Keynes substitue à la classique
approche de la monnaie une nouvelle approche par le revenu : ainsi, si les
entrepreneurs viennent à faire des anticipations plus optimistes
liées à l'accroissement de la confiance, ils accroissent alors
leurs investissements nets (total des dépenses des entreprises moins les
coûts d'usage, c'est-à-dire le vieillissement du capital dû
au progrès technique qui augmente d'autant avec la concurrence),
augmentant alors le niveau d'emploi mis en oeuvre pour ce faire, accroissant de
fait ainsi le revenu (somme des couts de production et du profit non
distribué exprimée en monnaie) et la consommation des
ménages.
En amont de leur démarche, les entrepreneurs financent
l'accroissement de leurs investissements, non pas par de l'épargne
thésaurisé, donc inexploitée, mais par une demande
supplémentaire engendrant la création de la monnaie aux
banques.
Or, l'État, par les règles et conventions qu'il
met en oeuvre, est le seul entrepreneur qui puisse réellement
réduire l'incertitude de leurs anticipations, notamment par une action
sur le taux d'intérêt. D'où la pensée de Keynes qui
souhaite voir l'État prendre une responsabilité de plus en plus
grande dans l'investissement. Selon Keynes, si le budget de l'État est
en équilibre, et s'il a toujours été en équilibre
dans le passé, l'offre de monnaie, par définition, serait nulle
et aucune
NDI ZAMBO Jean *** Mémoire ISE
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Hypothèse des déficits jumeaux: évaluation
empirique appliquée au Cameroun
demande de réserves liquides ne pourrait être
satisfaite. Si par contre le marché de la monnaie doit être en
équilibre, pour que l'on puisse réaliser une
égalité entre l'offre et la demande de monnaie, il faut que le
gouvernement soit prêt à créer ou annuler le déficit
budgétaire, non pas selon les exigences de la dépense publique,
mais selon les variations qui se vérifient dans la demande de
monnaie.
Par ailleurs, dans l'optique keynésienne, le
déficit budgétaire a une incidence significative sur le compte
courant. Les études de Fleming (1962), Mundell(1963), Kearney et
Mond-jemi(1990) et Haug(1996) montrent qu'à travers les canaux de taux
d'intérêt et de change, le déficit budgétaire cause
le déficit extérieur courant. En considérant une petite
économie ouverte, dans le modèle IS-LM-BP, un accroissement du
déficit public pourrait induire une pression à la hausse sur les
taux d'intérêt. Cela pourrait causer l'entrée des capitaux
étrangers. Cette entrée de capitaux entraine une
appréciation de la monnaie nationale à travers la demande
élevée des actifs domestiques induisant une
détérioration du compte courant, à travers le
découragement des exportations et l'encouragement des importations.
Ainsi, selon la théorie keynésienne, le sens de causalité
entre le déficit budgétaire et celui du compte courant va du
premier vers le second.
Bipsham (1975), dans l'idée des prolongements de
l'hypothèse behaviouriste et l'approche keynésienne
traditionnelle, arrive à la conclusion selon laquelle c'est le
déficit extérieur qui cause le déficit budgétaire.
Cet auteur soutient cette dernière conclusion par le fait que : lorsque
les exportations augmentent suite à une expansion de la demande
mondiale, le solde du compte courant s'améliore. La production et
l'emploi domestique s'accroissent, ce qui est de nature à
améliorer les recettes fiscales et par conséquent le solde
budgétaire. Ainsi, une amélioration du solde extérieur va
donc induire une amélioration du solde budgétaire.
On peut donc cependant retenir que les deux
approches admettent l'existence des déficits jumeaux même si le
sens de la relation ne fait pas l'unanimité.