3.2.3. LES TRANSFORMATEURS DES FEUILLES DE MANIOC
Il s'agit dans ce point, de parler de type de transformation
des feuilles réalisées à Kinshasa. Outre ces
transformateurs, la transformation au niveau des ménages sera
évoquée pour établir la comparaison entre le processus au
niveau des ménages et celui de l'industrie.
Trois types de transformateurs ont été
identifiés dans la ville-province de Kinshasa:
1. Les prestataires de service ;
2. Les transformateur-commerçants des feuilles moulues
;
3. Les transformateur-commerçants des feuilles
préparées.
3.2.3.1. Prestataire de service
Les enquêtes au niveau de ces transformateurs ont eu
lieu dans les marchés de Ngaba et de Mbanza-Lemba. Il ne s'agit pas de
comparer les deux marchés mais plutôt de récolter
jusqu'à saturation, des informations sur le matériel
utilisé, l'organisation du travail et l'analyse financière de
l'acteur. La transformation au niveau des marchés se fait près
des pavillons des légumes. Les transformateurs installent leurs machines
et attendent les clients.
a. Matériels utilisés
Les transformateurs utilisent les matériels suivants
pour leur travail : le bassin, le bidon de 25 litres, le malaxeur, la friteuse
et la machine à moudre. En moyenne un transformateur dispose de 9
bassins, 2 bidons de 25 litres, 2 malaxeurs, 1 friteuse et 1 machine à
moudre. Le bassin sert à nettoyer les feuilles, le bidon sert de
réserve d'eau, le malaxeur sert à remuer les feuilles
plongées dans la friteuse, celle-ci sert à chauffer de l'eau
où les feuilles de manioc seront plongées avant d'être
moulues dans la machine. Ces matériels ont une ancienneté qui va
de 5 à 10 ans, subissant de petites réparations deux à
trois fois tous les 3 ans. Le renouvellement d'équipements est
quasi-inexistant. En effet, les transformateurs passent de réparation en
réparation pour conserver leurs outils de travail. La plupart des
moteurs continuent à tourner même au-delà de 10 ans. Ces
moteurs fonctionnent 6 jours sur 7 pendant près de 10h par jour. Le
moteur coûte 150 USD. Il peut en théorie être utilisé
pendant 5 ans ce qui donne une provision pour amortissement de 30 USD par an,
soit 2,5 USD par mois.
La machine est constituée d'un seau en plastique avec
une hélice en métal à l'intérieur, monté sur
une petite table en métal sur laquelle est fixé le moteur. Tous
ces équipements en métal sont susceptibles d'être
rouillés vus qu'ils sont en contact permanent avec de l'eau. La machine
n'a pas d'interrupteur. Il suffit de mettre en contact deux fils
électriques pour qu'elle démarre. Elle n'a pas non plus un
dispositif permettant le réglage de la vitesse. La vitesse de rotation
de l'hélice est constante : le degré de la mouture dépend
uniquement du temps.
43
3.3.1.2. Organisation du travail
Le travail commence à 7h00 et prend fin à 17h00.
Il n'y a pas de pause proprement dite. La pause c'est quand les clients sont
absents. La période d'intense activité est le mois de
décembre. Dans la semaine les jours de forte activité sont :
vendredi, samedi et dimanche. Généralement le transformateur
prend un jour de repos par semaine (mardi, mercredi ou jeudi). Le processus de
transformation commence chez le client. Le transformateur n'est là que
pour chauffer les feuilles puis les moudre. C'est le client qui sépare
les feuilles des tiges, les nettoie, apprête les épices et donne
le tout au machiniste.
Le travail du machiniste commence en plongeant les feuilles
dans de l'eau bouillante pour réduire le cyanure. La durée de
cette étape dépend de l'espèce. Le Manihot esculenta
prend moins de temps (environ 5 secondes) dans de l'eau chaude. Le
Manihot glazziovi prend plus de temps (jusqu'à 15 secondes). Au
terme de cette étape, les feuilles passent à la machine. La
durée de la mouture est déterminée par le client selon la
texture souhaitée (mouture fine ou légère). La
durée de la mouture dépend plus du produit avec lequel les
feuilles seront consommées. Pour le savoir, le transformateur pose la
question au client de savoir si les feuilles seront consommées avec le
riz, le fufu ou le haricot. C'est en fonction de la réponse du client
que le transformateur fixera le temps de mouture. La mouture se fait de
manière séquentielle pour permettre au client d'apprécier
le degré de mouture afin que le transformateur puisse s'arrêter ou
poursuivre.
a. Division du travail
Tableau n° 3 : Etape, durée et responsable de la
tâche
Etapes
|
Durée
|
Qui ?
|
Effeuillage
|
|
Client
|
Nettoyage
|
|
Client Transformateur
|
Kokalinga
|
5 à 15 secondes
|
Transformateur
|
Mouture
|
5 à 45 secondes
|
Transformateur
|
Il arrive que le transformateur fasse le travail de nettoyage
généralement réalisé par le client lui-même.
La mouture est une opération qui ne prend pas beaucoup de temps
comparée au pilonnage réalisé à la main utilisant
le mortier et le pilon.
Lors de la transformation aucun ingrédient n'est
ajouté aux feuilles moulues ; le « pondu » ainsi obtenu est
nature.
44
b. Prix de la transformation
La tarification se fait en fonction de la quantité des
feuilles de manioc à moudre. Au marché de Ngaba il n'y a pas une
tarification fixe. Le prix varie de 100 FC à 500 FC, en fonction de la
quantité et de la négociation avec le client. Au marché de
Mbanza-Lemba, les prix sont connus d'avance, ceci n'empêche pas la
négociation entre le client et le transformateur. Pour une botte de
1.000 FC, la transformation vaut 500 FC et pour celle de 500 FC elle varie
entre 200 FC et 300 FC.
En dehors de samedi, la recette moyenne est de 17.000 FC le
jour. Samedi le transformateur fait des recettes allant de 25.000 FC à
30.000 FC. Ceci s'explique par le fait que samedi beaucoup de ménages
achètent les feuilles de manioc en grande quantité pour en
consommer pendant tout le week-end. Alors non seulement que les
quantités sont grandes mais aussi il y a beaucoup de clients au point de
faire la queue.
Pour les transformateurs qui ne sont pas propriétaires,
ils ont un versement moyen de 9.000 FC par jour. La facture
d'électricité est payée par le versement d'un jour non
versé au propriétaire de la machine. Le reste des dépenses
prises en charge par le transformateur y compris sa
rémunération.
d. Contrainte
La contrainte majeure au niveau de ces acteurs est les coupures
intempestives d'électricité. 3.2.3.2.
Transformateur-commerçant des feuilles moulues
Parmi les supermarchés enquêtés, deux
transforment et commercialisent les feuilles moulues. Un seul
supermarché réalise des plats de feuilles de manioc à
emporter.
a. Approvisionnement en matière
première
Les différents transformateurs s'approvisionnent
auprès des commerçants grossistes au marché UPN, Matamba
et au niveau de champs à N'sele ou au plateau de Batéké.
La seule espèce utilisée dans la transformation est le
Manihot glazziovi. Les critères sur lesquels se basent les
transformateurs à l'achat sont : la tendreté des feuilles, la
couleur verte et les feuilles non mosaïquées. La mosaïque
réduit le rendement car les feuilles ont surface foliaire
réduite. La quantité achetée lors de l'approvisionnement
dépend de la demande des clients qui achètent les feuilles
moulues. Cette quantité varie de 10 kg à 400 kg.
b. Transformation
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? Matériels
Les matériels utilisés dans la transformation sont
:
- La marmite : Le transformateur y met de l'eau qu'il chauffe
à 100° C pour tremper les feuilles. Cette pratique qui ne dure que
quelques secondes (5 à 10) permet de réduire le cyanure.
- La machine : Beaucoup de transformateurs utilisent les
machines de fabrication locale avec un moteur, un seau en plastique et une
hélice. Seule l'usine « Sombe » a commandé une machine
spéciale pour moudre les feuilles. Cette machine est faite à base
du métal inoxydable donc qui ne forme pas la rouille. Ce qui n'est pas
le cas chez les autres transformateurs.
c. Stockage et conservation
Dès que les feuilles sortent de la machine, elles sont
conditionnées dans les emballages de 500 et 1.000 grammes et directement
mises dans la chambre froide. Une à deux semaines après, elles
seront mises au congélateur dans le supermarché. Ainsi les
feuilles de manioc peuvent se conserver jusqu'à 6 mois voire même
plus, dans le froid.
d. Vente et conditionnement
La vente se fait dans des sachets de 500 et 1.000 grammes
conditionnées. L'emballage doit être résistant et
transparent. Généralement les sachets sont sans label sauf
l'usine Sombe qui utilise un autre emballage assez spécial
commandé de la Chine avec les indications sur l'emballage. Les
informations sur l'emballage sont: le nom du transformateur, le lieu de
transformation, la date de péremption, les coordonnées du
transformateur, le mode de préparation et l'espèce
transformée. Les feuilles de manioc moulues et congelées ne sont
pas encore très bien connues par les consommateurs. La plupart des
ménages réalisent eux-mêmes la mouture.
e. Contraintes
Les contraintes rencontrées par les transformateurs sont
:
- le dérangement et tracasserie des agents des services
de l'Etat à l'instar de l'Office Congolais de Contrôle (O.C.C.)
;
- les coupures intempestives d'électricité.
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