2.3 La contention en psychiatrie
La contention est une « Restriction, à des fins
thérapeutiques, de l'espace évolutif d'un malade atteint de
troubles mentaux. » (Palazzolo, Lachaux, & Chabannes, 2000, p. 90). On
peut comprendre que cette mesure soit prise dans un but thérapeutique et
englobe plusieurs formes de contentions. Restreindre l'espace évolutif
d'un patient peut se faire de façon pharmacologique, environnementale ou
encore physique. Cette notion de privation de liberté est
encadrée par la loi (LOI n° 2011-803 du 5 juillet 2011) relative
aux droits et à la protection
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des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux
modalités de leur prise en charge. La contrainte imposée par la
loi concernant les démarches administratives, les mesures de
surveillance des patients et les temps de reprise en équipes sont en
miroir de la contrainte imposée au patient.
2.3.1 La contention - aspect règlementaire
Les deux indications de la Haute Autorité de
Santé pour la contention sont l'hétéro- et
l'autoagressivité majeures et non maîtrisables par d'autres moyens
thérapeutiques. Nous pouvons citer ces autres moyens
thérapeutiques tels que la parole et l'alliance thérapeutique
avec les soignants, la contenance de l'équipe soignante formée
à ces situations de gestion de la violence et un traitement
sédatif efficace.
Nous pouvons décrire trois principales situations
menant les patients à l'hétéroagressivité ou
l'autoagressivité. La première situation concerne les patients
« pour qui un recours à l'agir et notamment à
l'autoagressivité qui est devenu un mode d'expression
préférentiel [...] et l'unique moyen de gérer leurs
angoisses et leurs frustrations. » (Azoulay & Raymond, 2017, p.
842)
Madame B. est une patiente de 25 ans en décompensation
maniaque. Particulièrement intolérante à la frustration et
avec une grande labilité thymique, chaque émotion la conduisait
à frapper sur la porte de sa chambre de façon sthénique,
faisant abstraction des risques de dommages corporels auxquels elle s'exposait.
La pose des contentions lui a permis de prendre le temps de repérer ses
émotions et de faire appel à ses ressources pour reconstruire une
contenance interne.
La deuxième situation concerne les patients
schizophrènes sous l'emprise d'un syndrome délirant
(éléments étrangers dans le corps etc...). Ils peuvent se
blesser dans le but d'extraire ces éléments étrangers dans
leur corps. La dernière situation concerne les patients sous l'emprise
d'un automatisme mental qui les pousse à se mettre en danger ou à
mettre en danger autrui (Azoulay & Raymond, 2017, p. 842).
Monsieur D. est un patient de 20 ans. Lors de sa
première décompensation, il vivait dans un petit appartement avec
son frère. Il présentait des hallucinations acoustico-verbales
qui lui répétaient de « tuer ». Il s'est alors
enfermé dans la salle de bain tentant de calmer ses hallucinations.
Cependant son frère força la porte de la salle de bain et
monsieur D poussé par ses hallucinations lui asséna plusieurs
coups de cutter jusqu'à ce que la lame se casse.
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Les recommandations de la Haute Autorité de
Santé semblent circonscrire la contention physique à une mesure
de sécurité ou de prévention, sans lui reconnaître
de fonction thérapeutique propre. Mais « protéger les
patients de ces violences qu'elles soient dirigées contre lui-même
ou contre autrui, ne fait-il pas déjà partie du prendre soin ?
» (Azoulay & Raymond, 2017, p. 843). Ces passages à l'acte
violents sont, en psychiatrie, symptômes d'angoisses paroxystiques, de
frustrations ingérables, de délire envahissant et suppriment tout
libre arbitre des patients. Il est important de s'interroger sur la fonction
des contentions pour éviter les dérives. Cependant s'interroger
sur la dimension thérapeutique et leur « bonne utilisation »
demande plus d'effort que de simplement les condamner au vu des
dérives.
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