3.3.2 Traitements
L'introduction d'un neuroleptique, la
Clozapine® a été faite pendant le temps
d'hospitalisation à l'UISI, pour ses propriétés
sédatives rapides et intenses et ses puissants effets antipsychotiques.
Le Nozinan® est un autre neuroleptique, utilisé è
visée sédative et possède aussi un effet
légèrement antipsychotique. Monsieur N. présente des
effets secondaires à son traitement neuroleptique, une
hypersialorrhée et une constipation.
Le thymorégulateur utilisé en
traitement de fond pour les troubles de t'humeur du patient est le
Théralithe®. S'ajoute à celui-ci la
Dépakote®, un anticonvulsivant possédant
également un effet thymorégulateur efficace au moment de la crise
maniaque, en parallèle il va également potentialiser l'effets des
neuroleptiques.
Le reste de son traitement est composé d'un
anxiolytique, le Valium® pour apaiser ses
angoisses.
36 Forte tonicité active
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3.3.3 Bilan d'observation
Quand je le rencontre, je ne suis que de passage dans
l'unité et je ne connais pas les patients actuellement
hospitalisés. Monsieur N. me sollicite dans le couloir pour connaitre ma
fonction ; je lui explique alors mon rôle, il s'empresse de me
répondre avec un discours logorrhéique et délirant que sa
mère est psychomotricienne, qu'il connait très bien ce
métier et rajoute plusieurs fois en se justifiant : « ce n'est pas
un mensonge ». Il me suit ensuite dans le bureau de la secrétaire
où je vais récupérer des documents. Il se place dans
l'encadrement de la porte de façon à ce que je ne puisse pas la
fermer, en continuant de m'interpeller. Je tente de lui expliquer que nous
prendrons un temps pour discuter par la suite, car je ne suis pas disponible et
que nos échanges dérangent la secrétaire. Il ne semble pas
entendre ce que je lui dis et continue de me parler jusqu'à ce que je
ferme la porte. On perçoit un non-respect de la proxémie et un
contact très envahissant ainsi que des difficultés de
séparation dans l'échange. Je retrouve ensuite monsieur N dans le
couloir ; il m'interpelle pour me demander si je suis «
fâchée contre lui » ; là aussi on peut observer un
aspect très enfantin de cette relation régressive et la peur de
l'abandon. Je prends le temps de lui expliquer que je ne suis pas
fâchée et que je m'excuse si la fin de notre conversation
était un peu brutale pour lui ; il semble soulagé et s'excuse
à son tour de son comportement en me prenant la main. Je conviens avec
lui que nous nous reverrons la semaine prochaine. Son comportement est
très ambivalent, entre un accrochage très important, beaucoup
d'investissement puis, un désinvestissement, très revendicateur,
persécuté, et peu de temps après une forte angoisse de la
destruction potentiel du lien. Ce sont des attaques qu'il porte au cadre, aux
relations avec les soignants comme pour en tester leur solidité, ce dont
il doute lui-même.
Monsieur N. est très grand et de stature imposante, il
est cyphosé et ses bras pendent le long de son corps. Il se
déplace rapidement à l'aide de ses grandes jambes tout en ayant
une démarche assez lente. Son visage traduit un état
d'étonnement permanant, les yeux grands ouverts et la bouche
entr'ouverte.
Langage : Il est logorrhéique, son
discours fluide et très accéléré traduit la
rapidité de ses idées. Il est désorganisé et passe
du coq à l'âne en mêlant des éléments
délirants à un discours qu'il
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tente de rationnaliser. Elation de l'humeur37 avec
tachypsychie et bradyphémie. Monsieur N. a une dysarthrie38
induit par les traitements neuroleptiques.
Tonus : Il est très sthénique,
son corps imposant parait tendu en permanence, il s'impatiente vite et
gesticule. On note une agitation psychomotrice permanente. On sent dans sa
gestuelle une tension interne malgré les effets des sédatifs qui
le ralentissent considérablement. On peut penser qu'il lutte contre les
traitements, contre cette sédation.
Délire : Son délire est
principalement à thématique mystique et religieuse : « Je
demande au prêtre de me faire pardonner à chaque fois que je
touche une femme ». Associé à une dimension d'excitation et
de désinhibition pulsionnelle, il n'est pas totalement conscient du
caractère transgressif de ses conduites et on observe un rationalisme
morbide : « j'ai voulu chatouiller une femme dans le métro »
ou alors il banalise ses actes : « tout le monde a des pulsions ».
Espace/ Temps : Il ne s'adapte pas à
la proxémie de chacun et rentre facilement dans l'espace intime des
patients et des soignants sans paraître gêné ni percevoir la
gêne de ses interlocuteurs, même quand ceux-ci le verbalisent. Sa
perception du temps paraît complexe et anxiogène, il est
intolérant à la frustration, ne supportant pas les temps de
latence entre ses sollicitations et la réponse de l'équipe
soignante. Il a besoin d'être rassuré par des repères
horaires, me sollicitant de nombreuses fois dans la même journée
pour savoir à quelle heure aura lieu la séance de
psychomotricité. On peut y voir une angoisse liée au manque de
sensation de continuité d'existence.
Conclusion : Ses enveloppes corporelles et
psychiques sont fragiles, il déborde constamment de la relation et ses
relations paraissent insécures, dans un rapport d'ambivalence et de peur
de la destruction du lien, de peur de la séparation. Ses explorations du
corps de l'autre peuvent être également une expression de cette
faible construction et de sa fragilité.
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