2.4.6 Les enveloppes psychiques
L'enveloppe psychique concerne la psychologie intersubjective
et non seulement intrapsychique puisqu'elle se construit dans la relation et
peut s'appliquer à l'individu comme à une institution.
L'enveloppe psychique avant tout une fonction, elle résulte de
l'intériorisation de la fonction contenante. La construction de
l'enveloppe psychique dépend des qualités de l'objet contenant,
on retrouve la notion de mère suffisamment bonne de Winnicott avec ses
fonctions de holding, handling et d'objet presenting. Mais également la
fonction de rêverie maternelle de Bion et l'intégration de la
bisexualité psychique de Golse. Enfin, Albert Ciccone (2001), rajoute
deux fonctions, la sollicitation : « il doit aussi le solliciter,
l'attirer vers des
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niveaux de présence, d'intégration,
d'organisation, d'expériences émotionnelles plus
élevés. » (Ciccone, Enveloppe psychique et fonction
contenante : modèles et pratiques, 2001, p. 92). Et garantir une
rythmicité des expériences, « la rythmicité permet
l'anticipation et donne une illusion de permanence, de continuité »
(Ciccone, Enveloppe psychique et fonction contenante : modèles et
pratiques, 2001, p. 92).
Anzieu parle de l'expérience du nourrisson du contact
différenciateur, du centre de gravité et des stimulations
tactiles. Elles lui permettent de différencier une surface interne et
une externe. Ce qu'il nomme « interface », elle entraine la notion de
dedans/ dehors, de volume, ce qui apportera à l'enfant la sensation de
contenant, ce qu'il nommera le moi-peau. Le moi-peau à plusieurs
fonctions, fonction du maintien du psychisme, une fonction contenante, une
fonction de pare-excitation, fonction d'individualisation de soi,
d'inter-sensorialité, et fonction d'inscription des traces sensorielles
tactiles. Le moi-peau s'étaye à partir des fonctions de la peau
qu'elles soient anatomiques ou métaphoriques. Anzieu (1985)
décrit les trois fonctions de la peau. Elle est le contenant qui retient
à l'intérieur le bon et le plein de l'allaitement, des soins, du
bain de parole. C'est également une interface entre le dehors et le
dedans, elle a une fonction de limite qui protège de la
pénétration. Enfin, elle est un moyen primaire de communication
non verbale avec l'autre surface mais également un lieu d'inscription
mnésique des trace corporelles.
Selon Didier Houzel, pédopsychiatre et psychanalyste
français, les enveloppes psychiques s'étayent sur la peau
corporelle, nous retrouvons donc ici la notion du moi-peau d'Anzieu. Pour leurs
construction l'enfant doit bénéficier du holding et du handling
de la mère suffisamment bonne sans quoi elles pourraient être
défaillantes. Les notions de holding et de handling sont des voies
préférentielles pour construire des médiations visant
à retrouver une enveloppe psychique solide. Le toucher
thérapeutique mais également des types de relaxation par portage
pourrons servir de points d'appuis dans la reconstruction de ces enveloppes.
D'autre part ces enveloppes psychiques décrites par Houzel ont des
relations homéomorphique27 avec l'environnement. Ce qui veut
dire qu'elles s'inter-influencent mutuellement, le patient introjecte le cadre
environnemental dans lequel il se trouve (l'unité d'hospitalisation) et
y projette pour en tester sa contenance (attaques du cadre). Il s'agit de
prendre en considération le caractère hypersyntone28
des patients et de leur proposer un environnement contenant, un
27 Qui peuvent être amené en
coïncidence par déformation élastique, sans déchirure
ou recouvrement.
28 Qui réagit sur le plan émotionnel et
comportementale en miroir des autres et de son environnement.
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cadre sécurisant et bienveillant qu'il va pouvoir
introjecter. En parallèle, le patient va perpétuellement attaquer
ce cadre comme pour tester sa solidité, sa permanence, l'équipe
soignante doit alors, comme une mère avec son enfant, recevoir ces
attaques sans pour autant se détruire, ni s'éloigner. C'est en
cela que l'équipe soignante deviens pour le patient un repère
stable sur lequel il pourra s'appuyer par la suite. C'est également en
garantissant cette permanence que les patients peuvent reconstruire la notion
de réalité. En attaquant le cadre, il y projette leurs pulsions
de haine et de destruction, si le cadre ne se détruit pas, le patient
sera confronté à la réalité et pourras remettre en
question sa toute-puissance imaginaire. Et en dernier lieu, ces enveloppes
doivent être souple, solide et malléable pour s'adapter pour mieux
aux situations et protéger la personne des modifications des
réalités qu'elles soient internes et/ou externes. Elles
matérialisent une limite souple qui permet d'être en contact au
monde. C'est une enveloppe avec une porosité contrôlé qui
permet d'être traversé par le monde (de l'introjecter) et
d'projeter tout en restant soi.
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