Le mouvement féminin et féministe au nord du Maroc. Objectifs et répertoire d'actions: 1990-2010par Fadma Ouaiaou ULB - Master 2011 |
III.5. ACTIONS COLLECTIVES LOCALES ET LE STAT DE LA FEMMELa région du Nord a aussi été mobilisée pour participer à des actions variées (manifestations, caravanes, sittings, conférences, tables rondes, etc.), et ce, dans le but de faire pression sur la commission. Il faut dire que la condition de la femme dans la région du nord, a plus d'une raison d'inciter les associations féminines locales à s'engager dans cette mobilisation. Ceci est survenu grâce et malgré un climat de transition démocratique.A cette occasion, de nouvelles associations féminines verront le jour. Le but premier de la mobilisation était d'élaborerdes partenariats et des réseauxentre les associations féminines locales et les associations au niveau national, régional et international.L'objectif ultime étant de donner la voix aux femmes dans le cadre des travaux de la commission et d'empêcher que les résultatsn'aboutissent une fois de plus à la ségrégation des femmes mais aille bien dans le sens d'une société plus égalitaire. Entre autre réseaux, nous relèverons le grand réseau national : « Printemps de l'égalité » créé en mars 2001, il possède un site web consacré à la femme : www.marocaufeminin.com.122(*) Au niveau régional, mentionnons par exemple « Le Conseil de coordination régionale pour l'action féminine », fondé en 2002 dans la région comprise entre Chefchaouen et Larache. Parmi ses actions : la caravane qui a défilé à travers le nord(Chefchaoun-Tétouan-Tanger-Larache), organisée en mars 2003, à l'occasion de la journée mondiale de la femme123(*). Tous les réseaux et toutes les activités du mouvement féministe universaliste ont contribués activement aux actions des réseaux nationaux créés pour la campagne en faveur d'un code de la famille égalitaire. En même temps, le mouvement féministe islamiste du nord,a également contribué aux réseaux nationaux afin de faire pression sur la commission royale dans le but de faire respecter les décrets de la « Charia 124(*)».Pour ce mouvement, il s'agit de protéger la cellule familiale qui constitue le noyau de la société marocaine musulmane, et de faire du référentiel religieux islamique la seule référence pour les droits humains. Ainsi, pour le mouvement féministe islamiste, il faut s'adapter à la Charia pour organiser la relation entre les hommes et les femmes. Cette relation doit se baser sur trois principes : complémentarité, coopération et affection»125(*). Tout comme pour la mobilisation universaliste, la mobilisation du mouvement féministe islamiste a aussi été marqué par la création d'un réseau national « Montada Zahrae pour la femme marocaine et l'orientation familiale »126(*)en 2002. Autour de lui, les associations féminines islamistes vont se mobiliser pour organiser des activités dans le but de véhiculer à leur tourla vision du mouvement islamiste sur le changement du statut des femmes ; et ce changement ne doit pas dépasser la référence islamiste et la particularité de la société marocaine. L'importance du changement du statut juridique de la femme part du constat que la femme marocaine ne peut pas exercer ses droits civils comme une citoyenne à part entière, tant qu'elle est obligée d'être sous la tutelle d'un parent masculin. Même si la femme peut être ministre ou juge, elle est soumise à des lois discriminatoires régies par le Codedu statut personnel. Le Code de la famille de 2004a certes été un tournant historique dans la vie des femmes marocaines, mais d'autres lois existent encore par lesquelles la femme peut être la victime de violations de ses propres droits. Ainsi, à ce jour, la violence conjugale à l'égard des femmes n'est pas pénalisée dans le code pénal marocain127(*). L'injustice et la discrimination dans la loi sur l'héritage reste aussi au coeur du débat entre le mouvement féministeuniversaliste d'un côté et le mouvement féministe islamiste, les autorités et les Oulémas d'un autre côté. Afin de bien comprendre les points d'opposition entre les trois composantes du féminisme marocain (féminisme universaliste, féminisme islamiste et féminisme d'Etat), il importe d'approcher dans la deuxième partie, les lacunes du code et les obstacles d'application. En effet, sept ans après la réforme du Code de la famille, les questions liées au statut de la femme dans un contexte politique, social et juridique restent encore à l'ordre du jour. Ainsi, où en est la question de l'inclusion des femmes dans la sphère publique dans un système régi par la loi islamique ? Comment peut-on parler d'une citoyenneté des femmes si une partie des lois qui organisent les rapports entre les femmes et les hommes se basent sur la Charia ? Comment alors se manifestent les rapports entre les trois composantes du féminisme marocain dans une monarchie encadrée par les valeurs de l'Umma128(*) (communauté musulmane) et dirigée par l'Amir Moumenine129(*) (commandeur des croyants). DEUXIEME PARTIE ETAT, FEMINISME, ISLAM QUELS RAPPORTS ? IV.CHAPITRE III : DE LA LIBERATION DES FEMMES ...A LA LIBERTE DESFEMMES « En orient, on voile la femme sous le joug de l'homme et l'homme sous le joug du gouvernement : là où les femmes jouissent de leur liberté individuelle, les hommes jouissent de leur liberté politique, les deux situations sont interdépendantesQasim Amin, la libération de la femme, 1899130(*)
* 122DIALMY, A, (2008),Le féminisme au Maroc, Casablanca : Toubkal, P 205. * 123 OUAIAOU, F, 2003,Rapport du comité d'organisation de la caravane. * 124La loi d'origine islamique ou la jurisprudence islamique. * 125MOSSALI, J, 2011, Le mouvement féminin contemporain au Maroc : tendances et questions, Rabat : CEMERC, P 278 ( en arabe). Ces principes sont de ma traduction (les nuancer le terme arabe et français) * 126Réseau des associations féminines islamistes crée en 2002 à Rabat. * 127 Il y'a un projet de loi pour la violence contre les femmes mais la nature hiérarchique du code n'est pas encore changée pour plus d'égalité et de justice envers les femmes. * 128 Nation mais aussi un terme qui est chargé des valeurs politiques dans la pensée islamique comme le terme citoyenneté dans la pensée occidentale. * 129ABOU ZAID, N. (2004), Les cercles de la peur : lecture dans le discours de la femme,Rabat :le centre culturel arabe, p 164-167. (en arabe). * 130 AMIN, Q. (1899), libération de la Femme, nouvelle édition en 1993, Caire : Office Egyptien général du livre. (En arabe). |
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