CONCLUSION
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La gestion du foncier et des conflits y afférents sont
importants pour la société ivoirienne et cruciaux pour le monde
rural. En vue de les examiner dans le contexte particulier de Sinfra, nous nous
sommes fixés les objectifs suivants :
Objectif général :
Rechercher les facteurs explicatifs de l'échec de la
gestion des conflits fonciers entre autochtones et allochtones dans le
département de Sinfra.
Objectifs spécifiques :
? Rechercher la relation entre échec de la gestion des
conflits fonciers et facteurs internes aux acteurs sociaux dans le
département de Sinfra.
? Rechercher la relation entre échec de la gestion des
conflits fonciers et
facteurs externes aux acteurs sociaux dans le département
de Sinfra.
Pour atteindre ces objectifs, nous nous sommes posés les
questions de recherche suivantes :
Question principale :
? Pourquoi la gestion des conflits fonciers entre autochtones
et allochtones échoue-t-elle dans le département de Sinfra ?
Questions secondaires
? Existe-t-il une relation entre l'échec de la gestion des
conflits fonciers entre autochtones et allochtones et les facteurs internes aux
acteurs sociaux dans le département de Sinfra ?
? Existe-t-il une relation entre l'échec de la gestion des
conflits fonciers entre autochtones et allochtones et les facteurs externes aux
acteurs sociaux dans le département de Sinfra ?
La réponse à ces questions a
nécessité la formulation des hypothèses suivantes :
Hypothèse générale
L'échec de la gestion des conflits fonciers dans le
département de Sinfra s'expliquent par des facteurs internes et des
facteurs externes aux acteurs sociaux.
Hypothèses spécifiques
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H1. L'échec de la gestion des conflits fonciers
à Sinfra s'expliquent par des facteurs internes aux acteurs sociaux.
H2. L'échec de la gestion des conflits fonciers
à Sinfra s'expliquent par des facteurs externes aux acteurs sociaux.
En vue de la vérification de ces hypothèses,
nous avons effectué le déplacement dans le département de
Sinfra, notre terrain d'étude où nous avons interrogé un
échantillon de six cent (600) enquêtés. Ces
enquêtés, regroupés sous les vocables «
autorités administratives », « autorités
coutumières » et « administrés » ont
tantôt répondu à un choix raisonné (autorités
administratives et coutumières), tantôt à un choix
accidentel (administrés).
La recherche documentaire, l'observation, le questionnaire et
les différents entretiens ont permis de répondre aux
questionnements de cette étude. Les méthodes dialectique et
fonctionnaliste ont constitué les paradigmes utilisés dans le
cadre de ce travail.
Au demeurant, les données issues des investigations ont
été analysées aussi bien qualitativement (analyse
phénoménologique et culturaliste) que quantitativement
(élaboration des tableaux de distribution statistique de type descriptif
et de pourcentage).
Cette étude s'est appuyée sur la théorie
constructiviste (Piaget, 1923 ; Bourdieu, 1972) dont les démembrements
concernent les théories actionnistes (théorie de l'individualisme
méthodologique de Boudon, théorie de l'acteur de Blumer et
théorie de l'analyse stratégique de Crozier et Friedberg) et les
théories multifactorielles (théorie des élites de
Paréto, théorie du conflit de Freund, la théorie
conspirationniste de Knight et théorie des systèmes de Ludwig)
utilisées.
Aux termes de notre enquête sur le terrain, nous avons
obtenu les résultats suivants : Les gouro de Sinfra, originaires de
l'ouest du pays, vont à partir du XVIe siècle, s'installer
à « Sianfla » où ils accueilleront et
faciliteront l'installation des premiers migrants allochtones (senoufo,
malinké, baoulé, ...) qui, négociaient auprès
d'eux, la cession d'une parcelle de terre par le système de «
tutorat », créant ainsi une dépendance
vis-à-vis de leurs tuteurs à qui, ils reversaient une partie
généralement faible de leur revenu annuel.
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A cette époque, ces propriétaires terriens
« terezan » cédaient avec une certaine
facilité des portions remarquables à ces allochtones en raison de
leurs aptitudes mystiques et de leurs possibilités à les
protéger contre des invasions fréquentes des
éléphants, qui étaient en nombre important dans la
zone.
Ainsi, par le processus simultané de naissances et des
vagues de migrations, le foncier à Sinfra va connaître une
véritable saturation. Cette saturation va ouvrir la voie à toute
forme de vente ou d'achat clandestin de terres, en dehors de tout contexte
légal ou socialement admis. D'un côté, les autochtones
(vendeurs) en quête de finances et d'un autre, les allochtones
(acheteurs) en quête de terre.
A l'intérieur des familles autochtones où
l'héritier des terres familiales est désigné selon les
critères de rassemblement, d'honnêteté et de
dévotion dans les travaux champêtres, on y note une corruption
passive de ces héritiers qui se prêtent à des
négociations sournoises de portions de terres familiales auprès
d'acolytes allochtones, charriant ainsi tous les membres de la famille dans un
bradage collectif des biens familiaux ou des conflits de
récupération des espaces vendus. De ce fait, des conflits
fonciers violents naissent au sein de l'institution familiale, entre
différentes familles ou communautés. Les moyens physiques,
mystiques et relationnels sont utilisés par les belligérants pour
s'approprier des terres, objet de ces litiges.
Ces conflits que l'on observe aussi bien dans les plantations,
en milieu rural qu'urbain, ne répond pas à un enchainement
d'actions fixées à l'avance, mais d'une combinaison d'actions
d'acteurs aux sensibilités différentes qui réagissent non
pas selon la valeur intrinsèque des terres litigieuses, mais
plutôt selon leur appréhension et la valeur qu'ils accordent
personnellement à la terre.
Les procédures de gestion de ces conflits fonciers
diffèrent selon que l'on se trouve dans le cadre villageois,
administratif ou pénal.
Au niveau de la procédure villageoise, elle varie selon
le type de conflit en présence. Lorsqu'il s'agit des conflits
intrafamiliaux, la gestion s'articule autour de deux actions principales :
plainte, séance d'écoute et association d'oncles pour la
gestion.
Lorsqu'il s'agit des conflits interfamiliaux et
intercommunautaires, la procédure de gestion part de la plainte au
verdict en passant succinctement par la convocation des parties, le
déplacement sur l'espace conflictuel et la séance de jurement.
Et enfin, dans le cadre des conflits entre agriculteurs et
transhumants, la démarche de résolution se structure autour de
la: plainte, transaction amiable et indemnisation.
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Concernant le cadre pénal, celui-ci répond
à une démarche tripartite composée à la fois de la
saisine de la justice par voie d'huissier, de la phase d'instruction et de
celle du jugement pénal.
Au niveau administratif, à défaut de moyens de
répression, la procédure reste exclusivement focalisée sur
la médiation, la négociation et la conciliation.
Toutefois, malgré l'implication de ces acteurs
hétéroclites, la gestion de ces conflits fonciers reste
entravée par des obstacles qui se structurent autour des facteurs
internes aux acteurs (corruption des acteurs de gestion et gestion affinitaire
des conflits fonciers, protection tribale des ressortissants, stigmatisation
des acteurs de gestion et expropriation foncière des allochtones,
acteurs de gestion eux-mêmes acteurs de conflits et diversité
d'acteurs de gestion et confusion de rôles) et des facteurs externes
à ces acteurs (absence de texte pour la gestion des conflits fonciers,
Ingérence des autorités gouvernementales dans la gestion des
conflits fonciers et facteurs indirects) internes aux acteurs et externes aux
acteurs.
En ce qui concerne le chapitre de la discussion,
l'étude au regard des données du terrain, a confirmé
l'objectif général, validé l'hypothèse
générale et les théories de référence avant
d'engager le volet de la confrontation de nos résultats avec les
résultats des auteurs recentrés dans la revue de
littérature et d'esquisser quelques pistes pour les travaux futurs.
Relativement, nous avons fait des suggestions tenant à
la responsabilité de l'Etat, des ONG et partenaires du
développement local et aux peuples sédentaires.
Concernant les suggestions visant l'Etat ivoirien, il s'agit de
:
- Construire des usines de transformation du café et du
cacao dans la localité en vue de désengorger quelque peu le
théâtre foncier local et d'octroyer à ces ruraux une
activité de substitution.
- Mener une campagne de distribution des engrais à
l'effet de fertiliser quelque peu ces sols surexploités par les
ruraux.
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- Former les acteurs institutionnels sur la connaissance de la
loi foncière n°98-750 du 23 Décembre 1998 en vue
d'éviter les contradictions décisionnelles telles
qu'observées pendant nos investigations.
- Contraindre les autorités locales à faire
preuve d'impartialité entre belligérants lors des conflits
fonciers sous peine de sanctions disciplinaires ou même de
révocation.
- Déterminer des itinéraires spécifiques
aux transhumants pour réduire les conflits entre agriculteurs et
pasteurs.
- Réduire le coût d'immatriculation des terres
pour permettre à cette population paysanne caractérisée
par l'indigence économique et alimentaire de pouvoir se faire
établir des titres de propriétés foncières.
- Mettre en pratique le projet de création de l'Agence
Foncière Rurale qui a une vue panoramique et des habilitations
susceptibles de favoriser la réduction des conflits fonciers à
Sinfra.
Outre ces suggestions visant l'Etat, nous avons fait des
suggestions à l'endroit des ONG locales et des partenaires du
développement rural. Ainsi, il s'agit entre autres d':
- Allouer des fonds pour soutenir les projets de
développement social et agricole du département de Sinfra.
- Organiser des activités socio-culturelles
intégratives pour tenter de réconcilier ces populations qui ont
de plus en plus de mal à vivre ensemble.
- Aider à réduire les stigmates de la crise
post-électorale en vue d'ôter du psychisme collectif, cette
stigmatisation réciproque des peuples sédentaires de Sinfra.
Enfin, nous avons fait des suggestions tenant à la
responsabilité des peuples sédentaires. Il s'agit entre autres de
:
- Renforcer les alliances inter-ethniques - Renforcer les
mariages inter-ethniques
- Intégrer les allochtones dans les Comités de
Gestion Foncière Rurale pour leur permettre de se sentir
intégrés dans la gestion des questions communes en
général et foncières en particulier.
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- Condamner les appropriations clandestines d'espaces à
l'effet d'aider les propriétaires terriens à moins vivre sous la
crainte d'une quelconque vente illégale de terres par des ayants
droits.
L'originalité de cette recherche se trouve
effectuée en ce sens qu'elle a su inclure des facteurs multiples
(migrations croissantes des allochtones, revendications intrafamiliales et son
extension extrafamiliale et l'ingérence opaque et opportuniste des
agents locaux de l'Etat) dans l'explication des difficultés liées
à la gestion des conflits fonciers à Sinfra. Toute chose qui
n'était suffisamment abordée par les contributions
antérieures, qui se sont structurées autour des écrits
centrés de la saturation foncière, le positionnement des fronts
pionniers dans le théâtre foncier et l'implication des acteurs
institutionnels.
Ces informations issues de cette recherche, bien que peut
être intéressantes, mieux pratiques, ne sont pas exhaustives et ne
sauraient mettre un terme aux recherches sur le phénomène de la
gestion des conflits fonciers notamment dans le département de Sinfra.
La science se voulant révolutionnaire, nous espérons que d'autres
investigations seront menées sur la question en vue de son actualisation
et de son approfondissement.
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