PARTIE III. PRECONISATIONS ET RECOMMANDATIONS
I. L'apprentissage
Avant d'envisager une quelconque approche, il est
impératif d'apprendre aux hommes à quoi servent les
cosmétiques. Les produits d'hygiène étant ancrés
depuis bien longtemps dans leurs rituels, il s'agit plutôt de comprendre
en quoi il est important de prendre soin de sa peau. La recherche en
cosmétologie met à disposition bon nombre d'explications sur la
peau masculine, les entreprises sont désormais plus à même
de proposer des produits de mieux en mieux adaptés aux
caractéristiques propres à l'homme. Cependant, tant que le
consommateur final n'est pas conscient des caractéristiques propres
à l'homme, et des besoins que sa peau peut avoir, il ne se tournera pas
vers les produits cosmétiques.
La peau de l'homme est spéciale, c'est
avéré. Elle est fragile, peut être sèche ou grasse,
et c'est normal. L'idée de « problème » doit être
éloignée, et les particularités de la peau masculine
doivent devenir factuelles. L'homme doit être conscient de ce que sa peau
subit chaque jour, de son enfance à sa vieillesse. Une fois que l'homme
aura parfaitement intégré le fait que sa peau a des besoins et
que les produits peuvent répondre à des besoins et non des «
problèmes », l'homme se tournera plus volontiers vers ceux-ci. Le
produit de soin a une connotation de solution à un problème. Or,
même les hommes qui n'ont pas de problème apparent ont besoin de
soin. Le but est de redonner une autre utilité au soin. Pour qu'il fasse
partie de la routine d'un homme, il faut qu'il le décide, et que le
produit soit aussi indispensable qu'un shampoing ou un déodorant. La
peau a besoin d'être hydratée au même titre que les cheveux
ont besoin d'être lavés. La fonction des produits d'hygiène
est comprise de la part des hommes, ils ne se posent plus de question sur leur
utilité. L'utilité d'un produit de soin n'étant pas
comprise, ils vont, par sécurité, s'en éloigner. Les
hommes qui ont eu recours aux soins dermatologiques ont appris l'utilité
d'un soin du visage, et cet apprentissage s'est ancré dans leur
comportement d'adulte. Une figure médicale est plus bienvenue qu'une
figure commerciale. Les jeunes garçons doivent être
accompagnés, et le monde médical les rassure davantage.
Les jeunes filles trouvent leurs conseils auprès de
leur mère et de la communauté internet. Les YouTubeuses
beauté réalisent des tutoriels beauté pour les jeunes
filles et leur apprennent des gestes simples à reproduire chez elle, en
leur donnant des conseils. C'est en reproduisant les gestes qu'elles voient sur
leur écran qu'elles apprennent, et qu'elles découvrent de
nouveaux
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produits. Cet apprentissage se fait directement à la
maison, dans l'intimité, où elles peuvent faire leurs essais
maquillage sans témoin. Le même principe pourrait être
appliqué aux jeunes hommes, qui suivraient les conseils d'autres jeunes
hommes. Les pères ne jouent pas leur rôle de mentor de la
beauté, parce que les hommes des générations
précédentes ne sont pas plus familiers à ces produits que
leurs enfants. Les hommes ne parlent pas de cosmétiques entre eux, il ne
reste que la mère pour faire l'éducation beauté de leurs
fils. Mais la mère ne connait pas forcément les produits
masculins et les spécificités de la peau masculine. Les femmes,
souvent plus expertes du monde de la beauté que les hommes, ont tendance
à entretenir une dépendance et à enlever toute autonomie
aux hommes en ce qui concerne la beauté. Les hommes se retrouvent
totalement désimpliqués et subissent l'utilisation de soins. Il y
a encore quelques années, les marques de cosmétiques pour hommes
se dirigeaient vers les femmes pour qu'elles achètent un produit
à leurs hommes. Le slogan de L'Oréal « Votre homme aussi le
vaut bien » en est le témoin. Un acteur apprécié de
ces dames y est mis en avant, pour toucher les femmes et les pousser à
l'achat. Il paraît clair que les femmes n'ont pas autant de pouvoir sur
un homme. Même si elles achètent un produit à un homme,
rien ne garantit qu'il va l'utiliser, parce que bien souvent, il n'en voit pas
l'intérêt. Lorsqu'un homme utilise un soin du visage, c'est avant
tout pour se plaire à lui-même, et ainsi plaire aux autres. S'il
n'est pas à l'aise avec le produit, il ne l'utilisera pas.
La publicité n'était pas toujours bien
reçue de la part des jeunes, il serait plutôt
préférable de privilégier la sphère privée,
ou internet. Les jeunes passent de plus en plus de temps sur les
réseaux, et déjà quelques hommes vont chercher conseil sur
la toile. Ils sont capables de faire confiance à des inconnus sur la
toile, bien plus qu'au marketing. Déjà 30 000 hommes suivent les
conseils d'un autre homme sur YouTube pour entretenir leur barbe ou cacher
leurs cernes. Les vidéos réalisées par des jeunes hommes,
plus proches d'eux, avec les mêmes imperfections, dédramatiserait
le recours au soin. Ils ont besoin de savoir que très peu d'hommes ont
une peau parfaite, et qu'utiliser un soin ne veut pas dire qu'il y a un
problème.
La dédramatisation, l'authenticité du discours
et la compréhension de l'utilité du produit sont les clefs pour
rendre l'homme acteur de sa consommation.
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