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Le néologisme chez les étudiants francophones étrangers des universités de Constantine


par Abdorhamane AG ILJIMIT
Université Frères Mentouri Constantine 1 - Master 2021
  

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CONCLUSION

GÉNÉRALE

Conclusion générale

« Si vous ne pensez pas, créez de nouveaux mots »

VOLTAIRE

L'objectif de cette étude était de dégager les différentes formes de néologismes représentés par un corpus d'étudiants étrangers francophones pour une recherche sociolinguistique. Cette recherche a pour objet de déterminer les raisons pour lesquelles les étudiants francophones font recours aux créations lexicales et d'analyser l'ensemble des néologismes collectés chez ces derniers, à savoir : les créativités lexicales aussi bien que les emprunts.

Premièrement, à l'essor de cette recherche, le concept de la néologie et du néologisme constituent des éléments clés qui ont écarté toute ambiguïté par apport à notre sujet. Pour cela, nous nous sommes référé aux travaux de quelques auteurs tels que SABLAYROLLES J-F, L. GUILBERT, L-S MERCIER et autres. D'après les définitions données par les dictionnaires de linguistiques et différents théoriciens, ces deux termes démontrent implicitement l'évolution du français moderne. En second lieu, nous avons classifié et dégagé la typologie de procédés de formation des néologismes inspirée par celle de J-F SABLAYROLLES.

Par la suite, pour analyser la morphologie des lexies néologiques, nous avons évoqué les disciples responsables de l'analyse des mots et des phrases. Il est question de la lexicologie responsable de l'étude de la structure d'une langue et de la sémantique qui a servi à analyser les sens des nouvelles unités collectées. Une grille d'analyse a été établie pour rendre compte des lexies collectées et donner des explications sur le processus de leur formation.

Notre méthodologie reposait sur une double analyse du corpus à savoir : une étude quantitative et qualitative. La première étant centré sur une analyse statique tâchait de lister des affinités d'ensembles tels que : les procédés créatifs les plus fréquents que d'autres, le nombre de créativités lexicales par apport aux emprunts, les matrices lexicogéniques les plus productives, les langues d'origines des

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emprunts etc. l'analyse qualitative en second lieu, nous a permis d'examiner les lexies néologiques isolées de leurs cotextes, d'étudier leurs caractéristiques selon un aspect morphologique, sémantique et pragmatique.

Les néologismes ont été recensés manuellement et de façon semi-automatique à l'aide d'un logiciel de correcteur « druide antidote 8 », afin de garantir les résultats. Malgré son efficacité dans le repérage et l'identification des néologismes sémantiques, il est évident que la méthode manuelle peut par inattention laisser passer des néologismes potentiels. C'est pourquoi, nous avions convenu pour la semi-automatisation du repérage. Par contre, cette méthode pratique quant à l'identification des néologismes formels autorise amplement les néologismes de sens tel que des noms employés comme adjectifs. Nous avons choisi cette méthode afin de garantir un maximum de précisions dans notre recherche.

Le premier constat auquel, a abouti cette étude, est que la majorité des lexies néologiques recensées sont formées au strict respect des règles de la création du mot français. Sauf, deux lexies « incouptiser » et « incouation », enregistrées comme verbe et nom et qui sont formées à partir d'une locution « un coup ». C'est une création qui ne figure pas dans les règles de la langue française. La règle se veut une construction de verbes à partir de noms et adjectifs et non au détriment de locutions.

La deuxième remarque que nous avions pu dégager concernant les néologismes collectés est qu'ils proviennent de langues différentes. Nous les avons réparties dans un graphique selon la dominance des néologismes par langue comme suit : anglais, arabe algérien, arabe standard, bambara, tamasheq, nouchi et autres (espagnol, romani, malinké, peulh, kikongo, français).

Le résultat de l'analyse des créativités lexicales montre que les néologismes émus par les étudiants étrangers francophones reflétant la langue française pratiquée dans divers pays d'Afrique de l'ouest, que les lexies néologiques ne sont pas exclusivement construites à partir du formant de la langue française. Les étudiants étrangers utilisent plusieurs langues, qu'ils alternent tout en puisant les règles de leurs combinaisons aux sources de la langue française.

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Le nombre exhaustif des néologismes collectés prouve l'importance de ce vocable qu'est la néologie. La néologie n'est pas un fait insignifiant mais un concept qui use de toutes les disciplines de la linguistique afin d'analyser le lexique d'une langue. Le produit de ce concept qui est à même d'être étudié est le néologisme.

Un certain nombre de questions se posait au cours de cette recherche : la plus justifiée qui se pose, est qu'est-ce qu'un néologisme ? N'importe qui semble connaitre la réponse « un nouveau mot ». Par contre, tout s'obscurcit lors de la recherche, ce concept si banal, se complexifie. En plus de celle-ci, d'autres questions se formulaient, pourquoi les étudiants, font-ils recours aux créativités lexicales ? Est-ce un simple jeu de mots ? Est-ce pour enrichir la langue par l'intégration des nouvelles unités ? Quels sont les procédés de formation utilisés dans les créations ? Quels sont les procédés les plus productifs ?

L'analyse des néologismes selon les procédés de créations montre que les matrices morphosémantiques sont les plus prolifiques dans la production de nouvelles unités lexicales. Mais dans cette étude le verlan occupe une place importante avec une proportion plus élevée par apport aux procédés censés être les plus productifs de la langue française. Il est notamment question de la composition et de la dérivation. L'emprunt par contre reste incontournable il fait office d'une présence considérable dans cette étude. L'hybridation néologique du français avec d'autres langues, produit une variété de mots très vaste contribuant ainsi à la richesse de langue.

Pour montrer comment ont été fabriquées les lexies néologiques, il nous a fallu les étudier sur une dimension lexicologique. Comme résultat, nous avons enregistré des néologismes obtenus par affixation (préfixation, suffixation, parasynthétiques), par combinaison des lexies généralement autonomes, composition (savante, hybride), verlan, extension et restriction de sens etc. ainsi que les figures de styles qui se révèlent productives en néologie sémantique. Ce qui veut dire que la néologie chez nos enquêtés n'intervient pas uniquement sur la forme mais aussi sur l'élargissement du sens et de sa restriction.

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Sémantiquement, nous avons analysé le sens des néologismes en replaçant l'unité néologique dans son cotexte et contexte de production et en nous référant à divers dictionnaires d'usage courant et d'autres manuels lexicographiques. Ceux-ci, nous ont facilité l'interprétation des nouvelles lexies.

Le travail effectué au niveau des emprunts a démontré que les types d'emprunts les plus dominants, sont les emprunts lexicaux, lesquels font objet d'une importation morphosémantique. Cela témoigne de la fainéantise de l'être humain renonçant à son ingéniosité créative au dépend des mots d'une langue étrangère. Certes, ces mots ne peuvent pas toujours être remplacés donc on se voit contraint de les employer telle quelle. MICHEL BREAL79 dans son ouvrage, Essai de sémantique, les a qualifiés : « des mots qui ne s'inventent pas deux fois, mais ils se propagent de peuple à peuple, pour devenir le bien commun de toute l'humanité ».

Les néologismes ont été brièvement accompagnés de commentaires qui démontrent que leur usage a été fait délibérément. Ils ont été créés à des fins voulues afin de répondre à un besoin communicationnel et à une forte envie de transgresser les règles normatives de la langue française. Certains étudiants les utilisent pour créer leur propre vocabulaire et codifier leur langage, auquel ils recourent uniquement avec un groupe restreint d'amis(es).

Les nouvelles unités lexicales recensées, prouvent que la néologie qui s'opère chez les étudiants étrangers francophones, est structurée autour d'un lexique certifié et non certifié, c'est-à-dire que les nouvelles lexies enregistrées existent éventuellement dans le système linguistique français. Nous assistons simplement à des modifications morphosémantiques des unités lexicales déjà contenues dans la langue.

Ces propos rejoignent la distinction s'établissant entre la production et la création d'une lexie néologique que B. Fradin (cité par CUSIN-BERCHE F.), présente comme suit : « la productivité est la capacité à créer des expressions, qui ont pour vocation à devenir des unités lexicales, en recourant aux moyens formels qu'offre la langue pour construire des lexèmes ou des expressions [...] La créativité en revanche s'affranchit des règles servant à la construction des unités lexicales.

79 BREAL M. Essai de Sémantique : «sciences des significations », Paris, Hachette, 1897, p.362.

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Elle ne met pas en oeuvre -- ou pas uniquement -- des procédés appartenant à la grammaire de la langue (analogie, verlan, etc.) ».

Au terme de cette analyse, il est important de rappeler les propos de quelques chercheurs ayant abordé le concept de néologie :

« La définition très large, très ouverte du phénomène de la néologie est si accueillante qu'en fin de parcours elle cerne mal la nouveauté par rapport au vocabulaire lexicalisé et par rapport à la norme ».80

« Les néologismes, toujours aussi nombreux, sont en outre formés selon de nouveaux modèles » et « il faut accepter qu'une langue vivante change de norme »81

Il est certain que ce champ d'études ne sera jamais mené à son terme, vu que le corpus de données se renouvelle incessamment avec l'émergence de nouvelles lexies. Ces études ne se limitent pas qu'au cadre de la lexicologie ou de la lexicographie, elles concernent en effet, toutes les branches de la langue et celles des sciences du langage en particulier.

80 Sablayrolles, J.-F. (2000) : La néologie en français contemporain. Examen du concept et analyse de productions néologiques récentes, Paris, Honoré Champion éditeur, coll. « Lexica », no 4, 589 p.

81 Alain Rey et Josette Rey-Debove dans l'introduction du Nouveau Petit Robert, p. XIV.

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