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Etre présent(e) au travail à  l'heure du coronavirus: comment les employés juniors se rendent-ils visibles au télétravail ?


par Laureline MICHAUD
Sorbonne Université - Chargé(e) d'études sociologiques 2022
  

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B. CONTRÔLE ET MISE EN SCÈNE DE LA DISPONIBILITÉ

Pour cette partie, nous allons nous appuyer sur l'oeuvre d'Erving Goffman, La mise en scène de la vie quotidienne - la présentation de soi, écrite en 1956. Erving Goffman part d'une comparaison très détaillée entre le monde social et le théâtre ou plutôt, il montre à quel point il est difficile de différencier le monde du théâtre. La métaphore de l'acteur est intéressante pour parler du télétravailleur car il dispose d'une façade - ce qu'il montre de lui à l'écran - définie comme «la partie de la représentation qui a pour fonction normale d'établir et de fixer la définition de la situation qui est proposée aux observateurs» (p: 26). Il dispose également d'un décor et de coulisse (quand il coupe son micro et sa caméra) : « C'est là qu'on fabrique ouvertement les illusions et les impressions (...) C'est là que l'acteur peut se détendre, qu'il peut abandonner sa façade, cesser de réciter un rôle, et dépouiller son personnage. » (p : 110)

Au-devant de la scène, les apparences sont toutes les preuves que le travailleur est bien là, mais ces preuves peuvent très bien être forgées de toute pièce (ou du moins ne pas avoir la même signification pour les deux parties - acteur et public) : « Et de fait, les personnes observées emploient parfois ces moyens propres à influencer la manière dont l'observateur les traite. (...) Les personnes observées peuvent réorienter leur cadre de référence et consacrer leurs efforts à créer les impressions désirées. (...) La nécessité dans laquelle se trouve l'observateur de se fier à des représentations de la réalité engendre la possibilité de représentations frauduleuses » (p : 238)

Ici nous allons analyser les objets qui constituent la représentation en télétravail : les coulisses (l'espace privé des participants : le lit, la cuisine, leur entourage), la façade qui tend, par certaines stratégies, vers une idéalisation (« tendance des acteurs à donner à leur public une impression idéalisée par tous les moyens.» p: 40) afin de coïncider avec ce qui est attendu (le fait de travailler).

1. LIRE SES MAILS EN COULISSE

Lorsque nous avons demandé aux participants de décrire leur journée type, une très grande majorité (11/13) disent commencer par lire leurs mails. C'est une étape rituelle, mais elle ne se fait pas toujours de manière conventionnelle pour plus d'un tiers des personnes interrogées. En effet, trois participants les lisent en petit déjeunant :

« Souvent je commence à travailler quand je prends mon petit déjeuner : j'ouvre mon ordinateur comme ça les mails se chargent pendant que je mange. » (Sarah, cadre depuis 2 ans et 9 mois dans une firme multinationale d'agroalimentaire)

Deux autres commencent à trier leurs courriels depuis leur lit (1), (2):

(1)

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« Quand le réveil est un peu trop difficile, je prends mon ordi et je m'assois sur mon lit - c'est un truc que je fais de plus en plus. Je trie mes mails pendant un quart d'heure et je réponds aux mails prioritaires. » (Emma, stagiaire depuis 3 mois dans une multinationale agroalimentaire)

(2) « Du coup moi je mets mon réveil à 8h45, je mets 5-10 minutes à me lever ; mon ordinateur est sur la table de chevet et j'ouvre mon ordinateur doucement je commence à lire mes, j'ouvre Slack ...

I : t'es dans ton lit à ce moment-là ?

A : Oui, me juge pas (rires) Tout le monde fait ça j'ai l'impression » (Alexandre, stagiaire dans une entreprise britannique d'ingénierie informatique)

La distance temporelle entre le lever et le début du travail est considérablement raccourcie - le passage des coulisses à la mise en scène est presque instantanée :

« Je me levais à 8h55 pour commencer à 9h. Je venais dans le salon, je m'asseyais à ma table, je prenais mon petit déjeuner devant mon ordinateur (mais c'est ce que je fais tous les matins même en présentiel), je me connecte au serveur via un VPN et qui d'ailleurs peut être utilisé comme outil de contrôle sur ma présence. » (Marine, chargée de communication dans une association sportive)

Ce n'est pas un hasard si l'activité qui est faite en coulisse concerne les mails : il s'agit d'une routine qui ne nécessite pas d'implication physique pour produire des résultats. De plus, lorsqu'il s'agit d'une lecture (et non pas d'une rédaction) de mail, le niveau de concentration requis est plus bas (ce qui ne signifie pas que la tâche soit inutile).

2. GÉRER LES INTRUSIONS

La visioconférence n'est pas toujours très bien vécue parmi les participants. Chacun se trouve un peu plus vulnérable que d'ordinaire car c'est l'intimité qui est montrée à tous - ou une partie - des collaborateurs. Le masque professionnel - le moi social - est moins convainquant lorsqu'il est associé avec des scènes de la vie quotidienne (réceptionner un colis, devoir interagir avec un membre de sa famille, oublier des anomalies dans le champ de la caméra, etc).

« Mais sinon personnellement je trouve ça assez intrusif, en plus de générer des bugs dans le réseau donc ça fluidifie absolument pas la communication, bien au contraire. C'est juste chez certains clients pour une question de réciprocité. On met souvent des fonds et parfois y a quand même des bugs, et l'autre fois je me suis pris une réflexion de « sympa tes petites peluches ». Je leur ai dit, « désolée je vis chez mes parents et c'est une chambre d'adolescente donc... » » (Delphine, consultante dans un cabinet de conseil en santé)

Face à cette intrusion, deux parades sont employées :

Il y a les «fonds» évoqués par Delphine, qui peuvent être la norme de l'entreprise :

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« Les fonds Teams nous aident pas mal à maintenir une certaine distance en mettant un fond derrière nous pour qu'on ne voit pas à quoi ressemble notre salon. » (Sarah, cadre depuis 2 ans et 9 mois dans une firme multinationale d'agroalimentaire)

La deuxième astuce consiste à se rendre invisible en enlevant micro et caméra : Lucas utilise l'expression de « se mettre en sous-marin » qui résume bien le geste et l'intention.

« En fait la caméra c'est quand même assez contraignant je trouve, je ne la mets jamais quand c'est des réunions à plusieurs par exemple où une réunion de tout le bureau par exemple, on est 40, j'aime bien l'expression d'une collègue c'est de se mettre en « sous-marin » c'est-à-dire que tu te mets micro coupé, caméra coupée et tu suis d'une oreille voilà. Parce que la caméra, tu es obligé d'être présent d'être à peu près enfin tu peux pas tu peux pas faire quelque chose trop d'à côté ; donc c'est assez contraignant, moi maintenant je la mets plus quand c'est des collègues directs, mon chef c'est bon. » (Lucas, chargé de projet dans une Grande Organisation d'Export à Londres)

Toutefois, les stratégies des employés peuvent échouer et mener à des moments de rupture de façade : Erving Goffman évoque les « Possible faux pas (lapsus, chute, nervosité ) ». « Il est possible qu'on n'ait pas mis le décor en ordre, ou qu'on l'ait préparé pour une autre représentation, ou qu'on l'ait dérangé au cours de la représentation. » (p: 56)

Les ruptures font souvent l'objet de rires, qui indiquent la reconnaissance d'une anomalie narrative. Mais au-delà des rires, il y a aussi un processus de normalisation puisque ces « faux pas », au fur et à mesure du temps, sont le lot de tous. Cela rompt certes la façade d'un employé professionnel, mais fait apparaître le visage de quelqu'un ayant une vie de famille, une vie privée commune.

« Le pire c'est quand mon chat saute sur le clavier parce qu'il voit quelqu'un à l'écran comme là,

I : du coup ça doit faire rigoler

A : Bah en fait on est tous comme ça, ce qu'on dit « c'est les aléas du direct » donc on connait un peu tous nos chats, ça humanise un peu » (Chloé, stagiaire au département RSE dans une banque de grande taille)

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3. LE TCHAT : OUTIL DE MISE EN SCÈNE PAR EXCELLENCE

Les apparences sont toutes les preuves que le travailleur est bien là, mais ces preuves peuvent être soit inexactes, soit altérées (ou du moins ne pas avoir la même signification pour les deux parties - acteur et public).

Ici les apparences données à la hiérarchie de chaque participant émanent de ses communications et, celle qui est la plus invasive : la messagerie instantanée.

Parmi les participants, 10 sur 13 avaient à leur disposition un outil de messagerie instantanée. L'un de ces outils, partagé par 8 personnes, nous a particulièrement intéressé : il s'agit de la messagerie Teams, grand remplaçant de Skype Entreprise, tous deux développés par Microsoft. La plupart des messageries ont des statuts qui se limitent au fait d'être « en ligne » ou « hors ligne ». Teams va plus loin :

Ces cinq statuts peuvent évoluer, soit à la demande de l'utilisateur, soit en fonction de l'activité de ce dernier. Si la personne est inactive sur son clavier pendant plus de 5 minutes, le statut change de « disponible » à « de retour bientôt ». Cette fonctionnalité est largement vécue comme une forme nocive de traçage de la présence.

« Quand tu es en ligne et actif t'es vert, si t'es pas là depuis je crois que ces cinq ou dix minutes ça se met en orange et après y a un décompte à côté, c'est horrible parce qu'il dit en « absent depuis 1h, 2h enfin autant de temps que t'es absent ». (Emilie, consultante en haute technologie au sein d'une firme multinationale)

« Oui, mais c'est horrible surtout que si tu pars aux toilettes, même 2 minutes, tu reviens ta

petite icône indique que tu es absent ! (rires) C'est tellement pernicieux ! » (Delphine, consultante dans un cabinet de conseil en santé)

Toutefois, les comportements de chacun face à cet outil (et le fait d'être en ligne ou pas) varient énormément en termes d'objectifs et de raisons sous-jacentes. Nous avons identifié

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3 comportements différents : ceux qui ne regardent pas leur statut, ceux qui regardent celui des autres, et ceux qui regardent le leur (ainsi que celui des autres).

a) Ceux qui ne regardent pas leur statut

Deux participants estiment ne pas regarder le statut des autres ou le leur, mais cela est dû à des raisons différentes. Sarah a une approche assez utilitariste de l'outil dans le sens où elle s'en sert simplement les fois où elle souhaite communiquer avec ses collaborateurs les plus proches, en particulier sa stagiaire. Comme elle le précise ci-dessous, elle voit le statut sans pour autant vraiment le regarder : elle met en avant la confiance qu'elle a en sa collaboratrice. Pour elle, ce qui compte, c'est que son message soit communiqué. Il s'agit également de notre interviewée qui a le plus de séniorité, ce qui peut expliquer qu'elle garde cette approche utilitariste également pour elle (puisqu'elle a « fait ses preuves », elle ne se sent pas redevable en temps disponible). Enfin, la culture d'entreprise joue : elle et ses collègues sont encouragés à prendre du temps pour eux, sans avoir à le justifier (il suffit de le notifier).

« I : est-ce que tu regardes si ta stagiaire, elle est présente ?

S : non pas vraiment mais je pense que sans le vouloir tu le regardes parce que dans Teams tu vois les statuts des gens donc tu sais si elle est là ou pas de fait. Mais j'ai confiance en son sérieux enfin je sais que quand elle a des choses à faire elle va les faire. Après je suis pas regardante sur les horaires de travail. » (Sarah, cadre depuis 2 ans et 9 mois dans une firme multinationale d'agroalimentaire)

Pour Yoann, le peu d'attention qu'il porte à la messagerie instantanée est liée au peu de communication qu'il émet ou reçoit pendant la journée. Il travaille dans une grande autonomie et ne rend de compte qu'à sa supérieure hiérarchique directe qu'il appelle quelques fois par semaine et avec qui il entretient une relation plutôt horizontale.

« I : et sur Skype tu as le statut en ligne hors ligne etc. Est-ce que t'y fais attention ou pas plus

que ça ?

Y : ah non pas du tout, je m'en fiche.

I : et du coup est ce que tu as des moyens ou tu ressens tout simplement le besoin de dire à

ton entourage que tu es présent au boulot ?

Y : non, pas du tout.

I : donc en fait tu peux passer une journée sans trop communiquer ?

Y : ouais, c'est ça (rires) » (Yoann, alternant dans une grande mutuelle de santé)

b) 62

Ceux qui regardent les autres

Là encore, nous avons deux cas de figure. Dans le cas Léa, c'est une démarche qui émane d'une volonté de conformité (qui consiste, en cas d'incertitude sur le comportement à avoir, à imiter celui de ses pairs). Elle a aussi beaucoup d'autonomie mais cela a tendance à la perdre et elle peut trouver un semblant de cadre par de petits indicateurs.

« I : donc tu me disais : tu regardes ces personnes qui sont connectées, s'il n'y a personne tu te sens un peu seule s'il y a tout le monde tu dis ...

L : je me dit qu'il faut que je m'y mette » (Léa, cheffe de projet junior depuis un an et demi dans un cabinet d'urbanisme)

Pour Marine, qui a sous sa responsabilité plusieurs stagiaires, le fait que l'un de ces derniers ne se connecte jamais, couplé à un travail inexistant a été un motif d'alerte. Cela n'est pas lié à son style de management car elle base selon elle ses relations professionnelles sur la confiance. C'est d'ailleurs ce qui a aidé à résoudre le problème :

« J'avais un autre stagiaire à qui je faisais confiance et en fait j'ai remarqué qu'il n'était jamais connecté, tout ce que je lui demandais ce n'était pas fait dans les temps. Et j'avais tendance à regarder s'il se connectait, comme je ne travaillais que l'après-midi, je leur avais demandé d'être présents de 14h à 17h. Et en fait il était rarement connecté. Donc j'ai dû le recadrer plusieurs fois. Et en fait il m'a avoué qu'il n'arrivait pas à télétravailler, parce que trop d'éléments perturbateurs, plus envie de regarder la télé que d'habitude... On a fini par y arriver. » (Marine, 1 an et 3 mois d'expérience dans une association sportive)

c) Ceux qui regardent tout, surtout son propre statut

Chez les juniors interrogés, les personnes qui surveillent de près l'outil de messagerie instantanée sont majoritaires. C'est dans ce cas de figure que la mise en scène est à la fois réelle et consciente pour chacun.

Pour Emilie, la mise en scène de sa présence (par l'intermédiaire de Teams) était un moyen, au premier confinement, de dissimuler son décrochage. Avec l'instauration du télétravail, elle était réduite à une partie monotone de son travail et vivait mal la coupure sociale.

« Quand je parle de détachement c'est dans le sens où on ne se rend pas vraiment compte de ce qu'on fait, de l'importance de ce qu'on fait ; mais tu te mets devant ton ordi quand même. Donc j'avais un peu une perte de motivation. Je l'ai ressenti par le fait que je me levais de plus en plus tard : au début je commençais à 8h 8h30 et après c'est passé à 9 heures, à 8h55 que j'allais aller travailler. Donc j'avais plus trop de rythme à la fin, c'était assez compliqué » (Emilie, consultante en haute technologie au sein d'une firme multinationale)

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Se mettre en vert sur Teams était donc un moyen pour elle de « garder la face » (Becker), le temps d'aller mieux.

« Je ne voulais pas montrer à mes collègues que je décrochais donc par exemple le matin, vers 8h50, je mettais ma petite pastille verte et j'allais déjeuner »

« C'est vrai que je fais extrêmement attention à ça ; je veux montrer à mes collègues que je suis présente vu que je suis pas avec eux » (Emilie, consultante en haute technologie au sein d'une firme multinationale)

Elle a aussi trouvé un moyen de tromper son ordinateur, en empêchant sa mise en veille au bout de quelques minutes.

Ici, la mise en scène était vécue comme absolument nécessaire, tandis que d'autres comportements similaires servent l'objectif « d'avoir une bonne impression générale » et surtout de ne pas être celui ou celle qui s'absente tout le temps.

Delphine a intégré le fait de bouger sa souris de temps en temps pour ne pas apparaître absente lorsqu'elle travaille en dehors de son ordinateur :

« C'est vrai qu'on peut nous fliquer comme ça c'est assez embêtant, moi il m'arrive parfois de travailler sur un truc et de pas être sur Teams, de préparer mes slides mentalement en dessinant sur des feuilles et régulièrement juste de passer mon doigt sur la souris pour être affichée comme connectée. » (Delphine, consultante dans un cabinet de conseil en santé)

Lors de notre entrevue réalisée en face à face, Louis m'a directement montré ce qu'il faisait pour prétendre qu'il travaillait (alors que nous discutions) :

« Là tu vois par exemple je suis en train de te répondre là je prends 15 minutes pour discuter avec toi mais pour me rendre visible je vais sur skype ma pastille elle se met en vert.

I : donc là actuellement t'es en train de te mettre à l'actif

Louis : exactement là je me mets actif et donc du coup si je sais que s'il y a quelqu'un qui va regarder c'est pour voir si je suis en ligne est verra que je suis vert. » (Louis, auditeur depuis 6 mois au sein d'une ETI)

En dehors des outils de tchat comme Teams, il y a d'autres moyens de traquer les employés, comme nous avons pu l'évoquer précédemment : la réactivité aux appels, aux mails, mais également la traçabilité des VPN dont ont conscience seulement une partie des collaborateurs comme Marine :

« On a dû faire un déménagement avec une amie le week-end dans le sud de la France, donc on est parties vendredi matin. Pendant que l'une conduisait, l'autre travaillait et gardait les ordinateurs en marche et secouait les souris pour éviter d'être notées « absentes » sur les différents outils, et notamment le VPN. » (Marine, 1 an et 3 mois d'expérience dans une association sportive)

Les participants cités ne sont pas les seuls dont nous avons analysé le comportement, qu'il soit mis en scène ou non. Nous avons résumé l'ensemble dans le tableau suivant :

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Noms

Attitude de mise en scène

Interprétation

Louis

Manière d'être. Utilise Teams pour faire semblant qu'il est là, a conscience de sa visibilité mais pense in fine que la productivité prime : "l'important c'est le résultat"

Utilise la mise en scène pour gérer

ses difficultés de concentration, il
s'agit d'un moyen. La fin étant le résultat, qui met plus de temps à être produit. Rapport utilitariste

Sarah

Bien plus dans le faire que dans la mise en scène - n'en ressent pas le besoin, y compris dans la manière qu'elle a de manager

La séniorité diminue les efforts de mise en scène. Rapport utilitariste

Manon

Inexistante

La mise en scène est absente car l'interviewée a la main sur l'ensemble de ses projets ; le télétravail est très bien vécu car lui permet de s'échapper à une hiérarchie toxique

Lucas

Existe du fait du changement d'attitude de son manager

La mise en scène comme solution

temporaire à un problème de
management

Marine

Existe du fait de l'attitude de son

manager (se rendre disponible au
téléphone, rester active sur son ordi via le VPN)

La mise en scène comme solution

temporaire à un problème de
management

Alexandre

N'existe que lors des visioconférences

Le mode horizontal couplé à une grande autonomie résulte en une mise en scène minimale

Léa

Légère mise en scène pour se conformer au comportement des autres (ex: les autres sont connectés, je me connecte)

L'éloignement de la hiérarchie et le surplus d'autonomie résulte en un faible recours à la mise en scène

Yoann

Mise en disponibilité réduite au

téléphone, aucune mise en scène

Le mode horizontal couplé à une grande autonomie résulte en une mise en scène minimale

Chloé

Performative (dans le but de ne pas être dérangée) mais pas de stratégie. De par son parcours, c'est dans sa nature d'être disponible « h24 »

Mise en disponibilité non mise en scène : tempérament + expérience

Emilie

Active : masquer la baisse de

productivité à tout prix

La mise en scène comme façade de productivité

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Delphine

Se rend toujours disponible (de par son caractère) mais ne met pas en scène son travail sauf pour certains cas

Mise en disponibilité non mise en scène, % tempérament + expérience

Camille

N'existe que lors des visios

Disponibilité téléphonique, mails,

mais pas de tchat --> peu de mise en scène

Emma

Existe pour garder l'apparence des

horaires (décorrélé des attentes de la hiérarchie)

La mise en scène comme moyen de faire ses preuves

Les mots clés des interprétations sont les suivants:

· Utilitarisme

· Séniorisation

· Management oppressif

· Autonomie + horizontalité

· Éloignement de la hiérarchie

Avec le travail à domicile, le coulisse et la scène ne font plus qu'un. Ce qui fait qu'un acteur entre en scène, c'est quand il se connecte, c'est là que le public le voit. Le public - c'est-à-dire la hiérarchie, les collaborateurs - devient presque omniscient, à ceci près que ce qu'il voit peut toujours être altéré. Le passage de l'un à l'autre est si facile (comme se réveiller et regarder ses mails dans son lit), que la différence entre ce que l'auteur (toujours Erving Goffman), suivant Emile Durkheim, appelle le « moi intime » et le « moi social » se réduit.

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4/ SYNTHÈSE DES RÉSULTATS ET LIMITES

Au sein de cette partie, plus analytique, nous ferons le point sur les réponses que nous avons réunies grâce à notre terrain. Nous pourrons les discuter (A) et en dessiner les limites pour donner des pistes à des recherches futures (B).

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand