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La république démocratique du Congo et le protocole de Maputo. Plaidoyers des organisations féminines du sud-Kivu.par Paulin AGANZE NKALIRWA Université officielle de Bukavu (UOB) - Licence en Relations internationales 2017 |
4.1.2. L'Eglise catholique et le protocole de MaputoPour dévoiler la forme que revêt ce danger aujourd'hui pour l'Afrique, le Pape émérite XVI a prononcé une allocution d'une importance capitale le vendredi 20 mars 2009 au palais présidentiel de Luanda, capitale de l'Angola. En s'adressant à l'ensemble du corps diplomatique réuni pour l'occasion, Benoit XVI s'adressait idéalement à toutes les nations africaines, c'est au cours de ce discours qu'il a cité explicitement un instrument juridique supranational que peu d'occidentaux connaissent : le protocole de Maputo. Lui attirant encore et toujours les foudres des médias européens.79 Le pape Benoit XVI a Luanda, s'exprimait dans ce sens : « je dois également mentionner un autre grave sujet de préoccupation : politiques de ceux qui, dans l'illusion de faire progresser l'édifice social, en menaçant les fondements mêmes. Combien est amère l'ironie de ceux qui promeuvent l'avortement au rang des soins de santé des mamans ! Combien est déconcertante la thèse de ceux qui prétendent que la suppression de la vie serait une question de santé reproductive (cfr. L'article 14 du Protocole de Maputo) ! ». Kamga Gustave, déplore le fait que l'article 14 soit si vivement critiqué par d'imminentes personnalités. Cet article a pour titre : « droit à la santé et au contrôle des fonctions de reproduction ». Que les Etats s'engagent à prendre toutes les mesures appropriées pour assurer et protéger les droits reproduction des femmes particulièrement en autorisant l'avortement médicalisé, en cas d'agression sexuelle, de viol, d'inceste, etc. est tout à fait normal si nous déferons les droits de la femme ; une maternité ne doit pas être imposée à la femme.80 Ainsi, Gustave fut contredit par Anne-Marie Kengne, qui trouve que ce qui est mal c'est la vie et non la capacité de déclarer qu'un enfant ne mérite pas de vivre parce que conçu dans des mauvaises conditions. Le rapport sexuel peut être mauvais, cela ne rend pas l'enfant mauvais81. Selon elle, l'Afrique a besoin de redécouvrir ces valeurs où l'enfant c'est pour tout le monde, pour la société. Présenté initialement comme un document à lutter contre les mutilations génitales perpétrées contre les femmes, il s'agit en fait de l'un des premiers textes de droit international à revendiquer explicitement le droit à l'avortement. L'article 14 cité et critiqué par le Pape 79 « Le protocole de Maputo : Benoit XVI défend l'Afrique à naitre » in http://www.libertépolitique.com, consulté le 26 mars 2018 80 Kamga Gustave, « droit à la santé et au contrôle des fonctions de reproduction », Yaoundé, PUCAC, mars 2011, p. 43. 81 Anne Marie Kengne, Le Protocole de Maputo cherche l'éradication des cultures traditionnelles de l'Afrique, Paris, Economica, 1999, p. 181. 42 émérite Benoit XVI, intitulé « droit à la santé et au contrôle des fonctions de reproduction » est en effet une charge d'une violence sans précédent contre les enfants à naitre. L'article incriminé contraint les Etats à « protéger les droits reproductifs des femmes, particulièrement en autorisant l'avortement médicalisé, suivant les cas précédemment cités. Le vocable « Santé mentale et physique de la mère » est un permis de tuer sans restrictions à n'importe quel moment de la grossesse selon l'interprétation complaisante et ultralibérale qu'en ont donné la plupart des leaders d'opinion occidentaux qui oeuvrent en Afrique82. Ce texte est en effet le fruit amer d'une guerre culturelle menée par de nombreuses ONG occidentales, notamment Fédération internationale du planning familial, qui caracole en tête dans la lutte. Déjà, lors des conférences onusiennes du Caire en 1994, l'IPPF réclamait l'instauration d'un droit à l'avortement. Apparemment très combattu par la diplomatie vaticane, le projet échouera peu après. L'occasion tant attendue s'est alors présentée en Afrique lorsqu'il fut décidé d'instaurer un traité interdisant les mutilations sexuelles féminines, un problème malheureusement réel et endémique dans certains pays africains. Mais l'intention première fut bien vite oubliée, une seule phrase mentionnant ce fait dans le document final comprenant plus de 20 pages et plus de 20 articles. C'est ainsi que l'ensemble de l'article 14 du protocole n'est qu'un copier-coller de la vulgate diffuser par l'IPPF et une multitude d'ONG qui lui sont soumises intellectuellement.83 Comment l'intention première peut être vite oubliée alors que le contenu du protocole de Maputo palpe la réalité africaine ; ceci revient à dire que comme, elles pourraient conseiller aux Etats de ratifier avec réserve car une seule phrase ne peut causer la non ratification d'un traité dont plusieurs de ces dispositions sont favorables. A ce niveau, une autre difficulté se présente, c'est notamment celle de savoir la catégorie des traités qui peuvent faire objet d'une réserve ; s'il faudrait tout mettre en lumière. Ceci a été fait, car dans un communiqué des évêques africains qui, fut divulgué le 19 avril 2017 , signé par le cardinal Polycarpe Pengo, président du symposium des Conférences épiscopales d'Afrique et de Madagascar (SCEAM) et archevêque de Dar Es-Salaam, Tanzanie, ainsi que beaucoup d'autres cardinaux et évêques africains qui attirent l'attention des chefs politiques de l'Afrique en leurs exhortant des fortes réserves concernant des aspects de l'article 14 u protocole de Maputo... Les droits des femmes de protéger et promouvoir leur santé sexuelle et 82 « Quels sont les dangers du Protocole de Maputo ? Les dirigeants catholiques et africains s'opposent au Protocole de Maputo », in http://www.leprotocoledemaputo.org/opposition_catholique_affricaine.html (consulté le 10 mai 2018) 83 « Protocole de Maputo : Benoit XVI défend l'Afrique à naitre » in http://www.libertépolitique.com/ consulté le 03/05/2018 43 reproductive dans cet article ont exclu les droits du couple, de la famille et de la société (civile, traditionnelle, culturelle et religieuse) et précisément prendre part à la promotion des droits de la femme aux soins de santé. Par exemple, l'autorisation d'avorter et le choix de toutes les méthodes de contraception pour les femmes (cfr. Articles 14, 1c et 2C) sont particulièrement incompatibles avec les enseignements de l'Eglise catholique, sa tradition et ses pratiques... en outre, l'Eglise affirme sans interruption depuis le premier siècle que c'est une grave faute morale pour toute personne ou leur agent de procurer un avortement. Cet enseignement n'a pas changé et demeure inchangeable !!! A la lumière de ceci, nous observons que l'avortement et l'infanticide sont des crimes abominables pour presque toutes nos cultures africaines, sociétés traditionnelles et religions.84 En ce qui concerne plus particulièrement le protocole de Maputo, Benoit XVI, dès son élection, a suivi de très près le dossier grave aux évêques africains. Le 19/01/2006, la conférence épiscopale de l'Ouganda dénonce le caractère subversif de ce document : « Jamais dans l'histoire un protocole n'est allé aussi loin ! Nous croyons fermement que les peuples d'Afrique n'ont aucun désir de voir ce protocole introduit dans leurs lois. Les situations de forte détresse mentionnées dans le texte (viol, inceste, agression sexuelle) ne peuvent créer un droit de supprimer une vie innocente. Ceci s'applique encore moins dans les cas définis d'un danger pour la santé mentale ou physique de la mère. En fait, ceci est une porte ouverte à l'avortement libre ». Chris Smith, un député national américain, en visite au Nigeria a critiqué le protocole. Selon le Daily champion de Lagos du 26 février 2007, Smith a déclaré que la vie d'innombrables africains a été perdue ou blessée par les guerres, les crimes, les famines et les maladies. L'avortement légal ou illégal menace la destruction de la prochaine génération d'enfants africains. C'est faux de prétendre que l'avortement sera sans risques si c'est légal. L'avortement n'est jamais sans risques pour l'enfant et peut causer des blessures physiques, émotionnelles et psychologiques pour la femme si c'est légal ou illégal.85 84 Maurice Kamto, « Introduction générale : La Charte africaine des droits de l'homme et des peuples et les perspectives de la protection des droits de l'homme en Afrique », op. cit, p. 36. 85 « Les dirigeants catholiques et africains s'opposent au protocole de Maputo », in http://leprotocoledemaputo.org/index.html , consulté le 05 mai 2018 44 4.2. LES TENANTS DU PROTOCOLE DE MAPUTO |
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