La république démocratique du Congo et le protocole de Maputo. Plaidoyers des organisations féminines du sud-Kivu.par Paulin AGANZE NKALIRWA Université officielle de Bukavu (UOB) - Licence en Relations internationales 2017 |
2.3. De la ratification du protocole de Maputo par la RDCAprès beaucoup de débats, plusieurs mouvements contre la ratification dudit protocole ; il fallait que le gouvernement congolais donne son mot sur la question du protocole de Maputo et son éventuelle ratification. Ainsi, depuis le 09 février 2009, la République Démocratique du Congo a ratifié le Protocole à la charte africaine des droits de l'homme et des peuples relatif aux droits des femmes. La RDC fut alors le 26ème pays du continent à ratifier ce protocole et le deuxième Etat d'Afrique centrale, après le Rwanda à franchir cette étape.70 Les organisations féministes de la RDC se sont félicitées de cette avancée. Toutefois, il ne s'agit pas seulement d'une promesse qui devra par la suite être suivie d'effets. Ces 69 « L'Afrique pour les droits des femmes : ratifier et respecter » in http://www.africa4womenrights.org, consulté le 15 avril 2018 70 « L'Afrique pour les droits des femmes : ratifier et respecter » in http://www.africa4womenrights.org, consulté le 15 avril 2018. 37 organisations, auteurs de la campagne «Afrique pour le droit des femmes» attendaient depuis la ratification du protocole par la RDC, les actions concrètes démontrant que la volonté des autorités congolaises de respecter leurs engagements internationaux, notamment à travers cette ratification du protocole de Maputo était prévisible. Pour la RDC, la dépénalisation de l'avortement est une chose mais, l'effectivité de celle-ci en est une autre. La philosophie du protocole de Maputo tend vers une dépénalisation partielle mais grave de l'avortement car selon l'expression de l'article 14 2 c, c'est seulement en cas de viol, inceste et lorsque la grossesse met en danger la santé mentale de la femme que cet avortement est garanti par le fameux protocole. Une interprétation tout à fait stricte pour ce qui concerne cet article est nécessaire pour ne pas encourager l'anarchie dans l'affaire de l'avortement. C'est pourquoi, comme la RDC n'a pas encore atteint un stade si important dans l'applicabilité dudit protocole ; elle peut chercher des solutions pour ne pas totalement dépénaliser l'avortement. La justification à cette allégation est que, la plupart des pays africains en général et en particulier la RDC ne sont pas suffisamment équipés pour dépénaliser l'avortement et ceci sans danger. Après la ratification d'un traité, celui-ci commence à produire des effets sur le plan interne. En général, pour qu'un traité ou une convention soit d'applicable sur le plan interne, il faut que ledit traité acquière la qualité des normes internes de cet Etat là. La transformation d'un traité en norme de droit interne se réalise par un processus appelé « Introduction ou Réception ». A ce sujet, il existe globalement deux grands systèmes : le système des Etats monistes et celui des Etats dits dualistes71. Dans les Etats monistes, le système qui prévaut est celui de « l'incorporation automatique » en ce sens que les traités acquièrent le statut de droit interne dès l'instant où ils deviennent des normes internationales obligatoires pour l'Etat intéressé, c'est-à-dire dès que le moment où cet Etat exprime sa volonté à être par voie de ratification, adhésion, acceptation, etc. Tel est le système de beaucoup d'Etats Européens dont l'Allemagne, la France, l'Espagne, de la majorité de pays latino-américains et une bonne partie des Etats africains (essentiellement les pays d'expression française)72. Par contre, dans les Etats dualistes, les traités, même ratifiés en bonne et due forme, ne font pas partie du droit interne pour qu'ils deviennent normes internationales. Les traités 71 Luzolo Bambi Lessa, « Droit congolais, droits de l'homme et engagements internationaux », Séminaire international sur la gestion de la transition en RDC du 26 au 28 avril 2004, p3. 72 André Mayambo, l'application de normes internationales relatives aux droits de l'homme par le congolais, inédit, p3. Cité par Luzolo Bambi Lessa, Op.cit., p3. 38 doivent faire l'objet d'une réception formelle. La question du statut interne des instruments internationaux relatif au droit de l'homme est bien réglée par les dispositions de la constitution congolaise du 18 février 2006 en son article 215. En effet, cet article dispose : « les traités et accords internationaux régulièrement conclus ont, dès leur publications, une force supérieure à celles de lois, sous réserve pour chaque traité ou accord, de son application, par l'autre partie ». La constitution congolaise consacre ainsi le système de l'incorporation automatique des traités dans l'ordre juridique congolais. Les traités internationaux conclus par la RDC s'incorporent à l'ordre juridique congolais à partir du moment où ils sont publiés dans le journal officiel. Ils s'y incorporent avec un rang supérieur à la loi, que cette loi soit antérieure ou postérieure. Toutefois, il importe d'indiquer que le régime des traités internationaux relatif aux droits de l'homme diffère de celui des traités de type classique en ce que leur application ne peut pas être soumise à la condition de réception.73 C'est à partir du moment où les traités sont publiés dans le journal officiel qu'ils commencent à produire des effets dans le droit interne congolais. A notre avis, nous demanderions au parlement congolais de voter une loi qui permettrait de remédier la question de la dépénalisation de l'avortement. Cette loi devrait consacrer la pratique de l'accouchement X. cette loi emboiterai le pas de la pratique française dans l'accouchement sous X. au fait, si la femme a une grossesse qui rentre dans le cadre de l'article 14 du protocole de Maputo. Toutefois, sans être moraliste, une femme qui porte un foetus doit en être consciente qu'elle porte en elle un enfant. D'où la nécessité de ne pas trop vouloir courir à l'avortement car ce foetus est un humain aussi. 2.3.1. La ROC et le protocole de MaputoAinsi, le 14 mars 2018 était enfin la date de la publication au Journal Officiel (JO) de la RDC du Protocole a la Charte Africaine des Droits de l'homme et des Peuples relatif aux Droits de la Femme en Afrique (appelé fréquemment « Protocole de Maputo ») qui est le principal instrument juridique de protection des droits des femmes et des filles. Cette publication au Journal Officiel est importante parce qu'il existe depuis longtemps une controverse sur le moment de l'entrée en vigueur d'une loi. Certains juristes invoquent l'article 142 de la Constitution qui stipule : « La loi entre en vigueur trente jours après sa publication au journal officiel à moins qu'elle n'en dispose autrement ». Ils en déduisent que « l'application des traités ratifiés dans les Cours et tribunaux congolais est facteur de leur 73 Luzolo Bambi Lessa, Op.cit., p4. 39 publication au journal officiel ». Donc pas de publication au Journal Officiel implique que pas d'entrée en vigueur ! D'autres juristes plus audacieux considèrent que si l'absence de publication est utilisée comme une mesure dilatoire avec la volonté d'empêcher l'entrée en vigueur de la loi adoptée (et dans ce cas du protocole), elle ne doit pas bloquer indéfiniment l'entrée en vigueur d'une loi votée par le Parlement. Un peu comme lorsque le Président de la République ne promulgue pas la loi votée dans les 15 jours de sa transmission, l'article 140 prévoit que « A défaut de promulgation de la loi par le Président de la République dans les délais constitutionnels, la promulgation est de droit »74. Le protocole de Maputo, en publié, ceci entraine donc de multiples conséquences, entre autres en matière d'applicabilité directe de ce texte. « Applicabilité directe » signifie qu'« est directement applicable la règle de droit international qui, sans requérir aucune mesure interne d'exécution, peut être appliquée dans l'Etat où cette règle est en vigueur »75. Ainsi est en cause la possibilité pour un juge national d' « appliquer » la règle internationale, c'est-à-dire d'emprunter à son dispositif la solution du litige dont il est saisi. |
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