CHAPITRE DEUXIEME : LE PROTOCOLE DE MAPUTO SECTION I.
APERCU HISTORIQUE ET AGENDA DU PROTOCOLE
1.1 Aperçu historique
1.1.1. De la CCF à la CEDEF
Au sein de ce qu'on a longtemps appelé « les droits
de l'homme », ceux de la femme sont restés en retrait. En 1945, la
communauté internationale admet dans la Charte des Nations Unies : le
respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous,
sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion. Cette
déclaration quoique très intéressante ne suffisait pas
pour aligner les droits des femmes sur ceux des hommes : il fallait que des
mécanismes de contrôle pour la réalisation et l'application
du principe énoncé soient mis en place.53
L'ONU, après débats, a considéré que
ces questions devaient être examinées dans des instances
dédiées, d'où la création de la sous-«
Commission de la condition de la femme », érigée en
commission de plein exercice en 1947 (en anglais, CSW : Commission on the
Status of Women ; et CCF pour l'abréviation du français :
Commission de la condition de la femme). La Commission de la Condition de la
Femme réunit 15 membres à sa création. Elle est
chargée de présenter au Conseil économique et social de
l'ONU (Ecossoc) des recommandations et rapports sur les voies et les moyens de
promouvoir les droits des femmes et d'améliorer leur situation.
En 1948, la déclaration universelle des Droits de l'Homme
confirme que Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes
les libertés proclamés dans ladite déclaration, sans
distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de
religion, d'opinion politique ou de toute autre opinion, d'origine nationale ou
sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.
La CCF est à l'origine de plusieurs conventions soumises
à la ratification des États membres : 1952 (droits politiques des
femmes) ; 1957 (nationalité des femmes mariées) et 1979
(élimination des discriminations). La CCF a également
déclaré l'année 1975 comme étant l'année de
la femme et elle a organisé la Conférence de Mexico qui fut
suivie par celles de Copenhague (1980), Nairobi (1985) et de Pékin
(1995), puis enfin en 2000 et 2005, par des manifestations plus modestes.
Parallèlement les ONG s'organisent et exercent des pressions sur les
gouvernements et auprès de la CCF.
53 C. Stewart, Présentation de la
convention sur l'élimination de toutes formes de discrimination à
l'égard des femmes, Cambridge, Harvard Unirversity Press, 2006.
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1.1.2. De la CEDEF au protocole de Maputo
La Convention sur l'Elimination de toutes formes de
Discrimination à l'Egard de la Femme, CEDEF fut donc
préparée par la CCF et elle fut adoptée par
l'Assemblée générale de l'ONU en 1979. Elle est mise en
oeuvre depuis 1981 (après sa ratification par 20 États). Elle
constitue une véritable synthèse des politiques
encouragées par les féministes au cours des 3 décennies
précédentes. Elle envisage la promotion de
l'égalité dans l'ensemble des droits : civils, politiques,
sociaux, économique et de nationalité et prévoit des
engagements concrets de la part des gouvernements nationaux pour en garantir
l'exercice. En 2005, elle était ratifiée par 180 États sur
les 191 représentés à l'ONU et son Protocole facultatif
additionnel, adopté en 1999 et mis en oeuvre depuis 2001, par 70
États.54
Outre la production de la CEDEF, la CCF a
préfiguré, dans les années 1970, dans les instances
intergouvernementales et nationales, la mise en place de services ou de
ministères chargés des droits ou de la condition des femmes, par
exemple à la Commission européenne et au Conseil de l'Europe,
ainsi que dans les divers pays siégeant à l'ONU. On sait qu'en
fonction des moyens qui leur sont accordés, leur influence est plus ou
moins importante... Aujourd'hui on parle d'inclure dans toutes les politiques
la notion de genre. On le doit à la CCF qui continue actuellement
à travailler sur de nouveaux droits.
Les États qui ont ratifié la convention doivent
remettre au secrétariat de l'ONU, dans l'année qui suit la
ratification, un rapport dit rapport initial sur la situation de l'État
au regard de ses engagements conventionnels et ensuite un rapport
périodique, tous les 4 ans. Après consultation de ces rapports,
le comité d'experts de la CCF liste les principaux sujets de
préoccupation et formule des recommandations générales aux
États.
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