9.2 Traverser les frontières à la recherche
de la protection internationale
Les mobiles de la recherche de la protection internationale
des répondants sont : le conflit au Darfour, la baisse de l'assistance
dans les camps, l'absence de travail, l'insécurité au Tchad et en
Libye, les conflits communautaires et la volonté d'échapper
à la justice. Pour les ressortissants du Darfour, la venue à
Agadez est surtout motivée par la volonté de fuir le chaos
libyen. Dans ce contexte, leurs expériences de réfugiés au
Tchad ou de déplacés internes au Soudan ont été
capitales dans la décision de venir au Niger. En effet, ils savent
qu'avec la présence du HCR dans ce pays ils ont la possibilité de
demander l'asile. Cette venue au Niger s'inscrit dans le prolongement du
conflit au Darfour qui est à l'origine du premier déplacement
forcé. La baisse de l'assistance dans les camps de
réfugiés ou les sites de déplacés internes va
également motiver un autre déplacement. Tandis que pour les
autres nationalités (Camerounais, Centrafricains, Nigérians...)
le déplacement forcé est lié aux conflits communautaires,
à la participation à des activités de protestation et
à la dégradation de la situation sécuritaire.
9.2.1 Conflit au Darfour
Le conflit au Darfour est à l'origine du premier
déplacement des demandeurs d'asile soudanais. En effet, au début
des années 2000, cette région a fait l'objet de plusieurs
exactions de la part des milices Janjawid. Ces attaques
répétitives ont motivé le départ d'une partie de la
population comme le souligne Nour : « À cause de la guerre
toute la famille était obligée de quitter le Soudan pour les
camps des réfugiés au Tchad. Je suis resté au Tchad de
2003 à 2016. On suit les cours d'alphabétisation au camp des
réfugiés. Pendant la saison de pluie, on fait les travaux
champêtres pour avoir de l'argent. Du Tchad je suis allé en Libye,
car je suis aîné de ma famille. J'ai une obligation sociale.
» (Nour, demandeur d'asile, Agadez, 23-07-2018).
La guerre est donc l'élément déclencheur
du départ des Soudanais pour le Tchad afin de bénéficier
de la protection internationale et de l'aide humanitaire. Au Tchad, Nour
indique avoir séjourné pendant 13 ans dans le camp des
réfugiés. Cela traduit l'inscription dans la durée du
conflit qui a contraint les personnes à vivre plus d'une décennie
hors de leur pays malgré eux.
La guerre au Darfour a créé un désastre
humanitaire corroborée par la mise à feu des abris, la privation
de bétail, les mouvements forcés de personnes à
l'intérieur du Soudan et dans les pays voisins. « Plus de 50 000
personnes ont été tuées dans le conflit et au moins 1,4
million d'autres, principalement issues de communautés paysannes, ont
été déplacées de force, leurs villages
incendiés, leurs troupeaux et autres biens pillés. Des milliers
de femmes ont été violées. » (Amnesty international,
2004)
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Elle a aussi nécessité une intervention
humanitaire tant sur les sites de déplacés internes au Soudan,
que dans les pays voisins à travers l'accueil des
réfugiés. Les mouvements forcés consécutifs au
conflit sont mentionnés de manière récurrente par les
personnes interrogées comme la première étape de ce qui va
devenir progressivement une errance jusqu'au Niger.
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