L'examen du contexte familial de départ montre que
60,9% des répondants déclarent que leur père est en vie
contre 39 % pour les mères. En analysant de près ces chiffres, on
peut comprendre que l'absence du père pour 39 % des répondants
peut être un facteur concourant au départ. En effet, l'absence du
père de famille peut aboutir à un transfert des charges
familiales vers le ou les fils en fonction de la place dans la fratrie. Or, ce
dernier est donc contraint d'aller chercher des ressources
complémentaires autres que l'agriculture ou qu'un emploi urbain peu
satisfaisant. Il emprunte ainsi les chemins de la migration pour faire face aux
charges familiales.
75,2 % des répondants avaient une occupation avant
leur départ. Les emplois relèvent du secteur informel avec une
dominance des emplois suivants : conducteur, petit commerçant,
agriculteur et maçon. Les femmes exercent comme serveuses dans les bars
ou coiffeuses dans les salons de coiffure. Le mode de paiement du salaire des
répondants est journalier un tiers et mensuel, un cinquième.
La rémunération moyenne journalière des
migrants est de 3 308FCFA. En moyenne, les migrants sont payés 16 333
FCFA/semaine. Le salaire mensuel moyen est de 75 714 FCFA.
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Ces montants sont en deçà des besoins des
familles quand on sait que la vie devient de plus en plus chère.
À cela, s'ajoute le poids familial, avec une moyenne de 7 personnes en
charge par répondant.
Dans ce contexte, 42,9 % des répondants motivent leur
départ par l'insuffisance du salaire. « Le jeune candidat à
l'émigration reste insatisfait de l'assistance familiale qui permet de
survivre, voire de vivre décemment mais sans réelle
considération familiale et sociale. Cette prise en charge familiale
interdit de satisfaire non seulement des ambitions personnelles, mais surtout
d'entrer dans le rôle social que la société attend de lui.
Aussi, le projet migratoire s'inscrit-il dans une volonté de rupture
initiatique dans l'optique d'un futur retour glorieux permettant d'obtenir la
reconnaissance sociale de son groupe et d'accéder à une
véritable majorité sociale (Timéra, 2001, P 38).
Ces jeunes migrants ne sont pas satisfaits de leur salaire
qu'ils jugent insuffisant pour satisfaire leurs besoins. Près de la
moitié des répondants (45,7%) affirment avoir quitté leur
emploi à cause du salaire jugé peu intéressant contre 32,3
% qui le motivent par l'absence de travail dans leur pays. Il ressort que la
majorité des répondants n'ont pas accès à un
travail suffisamment rémunérateur. Les motivations
économiques sont des facteurs déclencheurs de la migration comme
le souligne ce migrant : « Les gens quittent pour subvenir à
leurs besoins. C'est la pauvreté qui pousse les gens à quitter
leur pays. La principale cause de départs des jeunes c'est la
pauvreté. Il y a des déceptions après les études
universitaires, les jeunes se retrouvent au chômage. Ils continuent
à dépendre de leur famille pour tous leurs besoins. Alors
qu'à côté, les camarades qui ont quitté
l'école pour l'aventure ont déjà construit pour eux et
leur famille. Ils ont réussi. J'ai perdu mon père en 2004, c'est
lui qui me soutenait. J'ai donc perdu tout espoir de solution sur place pour
mes problèmes. J'ai donc décidé de migrer »
(Entretien, Franklin, Agadez, 22 août 2018).