À Agadez en lien avec la migration, un changement
important est à souligner, celui des moyens de transport avec
l'introduction des véhicules de type Hilux. Sur les destinations en
direction de l'Afrique du Nord, les voitures-talibans surnom
donné à ce type de véhicules ont
révolutionné le transport. Importées de Libye, au
lendemain de la crise libyenne, les voitures-talibans ont
réduit la durée du voyage entre les deux espaces de 6 à 7
jours auparavant à 2 à 3 jours aujourd'hui. Dotées de
quatre roues motrices, légères, pouvant contenir 20 à 25
personnes, elles sont très adaptées à la traversée
du désert. Ces véhicules ont profité du contexte de 201516
marqué par la forte demande de transport lié à l'afflux
des migrants internationaux de transit vers l'Afrique du Nord. Leur expansion a
donné de l'emploi aux jeunes de la région d'Agadez.
Photo 12 : Véhicule Hilux (Talibans) utilisés
pour le transport Agadez-Libye Crédit photo : B Ayouba Tinni, Agadez,
juillet 2017
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Dans les lieux de transit, les voitures-taliban ont
contribué à l'arrivée de jeunes chauffeurs ; les
propriétaires des véhicules sont souvent des Toubous libyens,
mais qui opèrent jusqu'Agadez. Propriétaires d'un à
plusieurs véhicules, ils engagent des chauffeurs payés à
chaque tour. L'immixtion des voitures-taliban dans la chaine de
transport en direction de l'Afrique du Nord a coïncidé
également avec l'exploitation de l'or au Djado. Ces véhicules ont
satisfait à la fois la forte demande de transport sur le site
aurifère, mais aussi la migration transsaharienne. Selon le Maire de
Dirkou, l'or a surtout permis aux jeunes de se procurer les moyens de s'acheter
des voitures-talibans et d'investir dans le transport. À
Dirkou, aux dires de l'édile, rares sont les familles qui ne
possèdent pas de voiture-taliban.
Les voitures-taliban ont permis une
réorganisation de la chaine de transport, mais aussi du coût du
voyage. Avant par exemple, les camions étaient chargés à
la gare et les passagers logés dans un coin de la gare. Les convois
étaient organisés chaque semaine en direction du nord. Les
syndicats avaient une forte main mise dans l'organisation du transport et il
yavait un système de tour de chargement entre les chauffeurs. Monsieur
Hamissou chauffeur se rappelle encore :
« Il y a des années ce sont les camions 32,
Octros, Telem et Toyota. Aujourd'hui ce sont des petits véhicules Hilux.
Le mode de transport a changé, car au début ce sont des camions
alors que maintenant ce sont des Hilux Taliban. Le mode de transport est
resté le même pour les autres lignes sauf au niveau de la ligne
Agadez-Dirkou qui utilisait des camions 32 avant et utilise aujourd'hui des
véhicules Toyota Hilux. ». (Entretien Hamissou, Agadez,
février 2021).
Les coûts étaient relativement moins chers (35
000 FCFA jusqu'à Dirkou) comme le souligne cet acteur : « Les
tarifs du transport ont connu des changements. Par exemple Agadez-Dirkou avant
c'était 7500FCFA aujourd'hui c'est 10 000FCFA, par contre Agadez-Sebha
(en Libye) qui était auparavant de 150 000FCFA a chuté et est de
60 000FCFA aujourd'hui à cause du manque des clients (passagers de
nationalité étrangère) ». (Entretien,
Adjoint-chef de ligne Dirkou-Agadez, Agadez, 24-02-2018)
À cette période, les propriétaires de
véhicules étaient des Nigériens et quant aux passagers ils
étaient à la fois Nigériens et étrangers.
Après chargement, le chauffeur présente la feuille de route au
commissariat de la gare pour obtenir l'autorisation de partir. Les camions de
transport pouvaient prendre entre 50 à 100 personnes. Le départ
vers l'axe Libye était organisé au rythme des convois qui
quittaient chaque lundi sous escorte militaire pour des questions de
sécurité.