Essai d'évaluation des mécanismes onusiens de protection et de promotion des droits de l'homme.par Ichrak Mekni Faculté de droit et des sciences politique de Tunis - Master de recherche en droit international humanitaire et droits de l'homme 2018 |
B-DES PROBLEMES DE RELATIVISME CULTUREL :286 TSHIKALA Biaya, « Le pouvoir ethnique. Concept, lieux de pouvoir et pratiques contre l'État dans la modernité africaine. Analyse comparée des Mourides (Sénégal) et Luba (Congo-Zaïre), in Revue Anthropologie et Sociétés, 1998, numéro 1, volume 22, p. 119. 287 Disponible sur http://www.rfi.fr/afrique/20140406-rwanda-origines-genocide-habyarimana-kagame-tutsis-hutus-france 288 Disponible sur http://wwww.lexpress.fr/actualite/monde/afrique/le-genocide-rwandais1321097.html 289 Ces estimations avaient été données par les autorités nationales de l'époque. Voir CHRÉTIEN Jean-Pierre, « Les racines de la violence contemporaine en Afrique », op.cit., p. 23. 290 Voir Alternatives Internationales, « Pourquoi les violences ethniques », n°39, juin 2008. Voir aussi BONZON (S), « Modernisation et conflits tribaux en Afrique noire », op.cit., p. 872. 100 Bien que plusieurs Etats prétendent adopter une approche universelle des droits de l'homme, ils refusent à la fois d'accorder des droits spécifiques afin de protéger des catégories de personnes vulnérables, tels que les femmes, les enfants, les immigrés, les apatrides, les réfugiés, les soldats, les personnes ayant une orientation sexuelle spécifique et autres. Ces Etats sont en réalité entrain de fragmenter l'universalité des droits humains et augmenter le problème de discrimination empêchant ainsi la participation à une approche évolutive du droit international des droits de l'homme. En effet, l'évolution des droits ne peut pas s'effectuer sans ces personnes vulnérables et groupes spécifiques. Dans le cadre de notre étude, on va distinguer entre diversité et relativisme culturel et aborder à ce titre la question des droits des LGBTQ . D'abord, la question des droits des LGBTQ, est discutée depuis longtemps à l'ONU. En effet, les experts indépendant du système onusien de protection et de promotion des droits de l'homme, a attiré l'attention de l'ONU à cette question depuis des années. Mais ce n'est qu'en 2011 qu'une première résolution a été adoptée par un organe onusien politique, c'est la résolution 17/19 intitulée « Droits de l'homme, orientation sexuelle et identité de genre », adoptée 17 juin 2011 adoptée par le Conseil des droits de l'homme.291 En effet, le Conseil se dit « gravement préoccupé par les actes de violence et de discrimination, dans toutes les régions du monde, commis contre des personnes en raison de leur orientation sexuelle et de leur identité de genre292.Le Conseil se réfère de ce fait, aux principes de la Déclaration universelle des droits de le l'homme en soulignant l'importance des principes d'égalité et de non discrimination entre les individus dans la jouissance de leur droits. Cependant, beaucoup d'Etats ont voté contre cette résolution et ont soumis deux autres, l'une par la Russie portant sur les valeurs traditionnelles, et l'autre par plusieurs Etats portant sur la protection de la famille dont la Tunisie, le Maroc, le Qatar, la Chine, la Namibie et d'autres. Ainsi, la question de l'orientation sexuelle constitue une question complexe au sein du Conseil. D'une part, elle préserve un problème de droits de l'homme qu'il faut régler et, de l'autre part, cette thématique soulève des questions qui renvoient de manière plus générale aux modèles de sociétés que les États et leurs populations veulent construire. En effet, la question du modèle de 291 Conseil des droits de l'homme, « Droits de l'homme, orientation sexuelle et identité de genre », A/HRC/ RES/17/19, 14 juillet 2011, disponible sur http://daccess-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/G11/148/77/PDF/G1114877. pdf?OpenElement. 292 Ibid, préambule 101 société et du modèle familial est liée dans une certaine mesure aux valeurs que souhaitent promouvoir les sociétés. En effet, manière dont la famille doit être définie ne fait pas l'unanimité293. Ensuite, Le relativisme culturel ne saurait être invoqué pour ne pas respecter les droits de l'homme des LGBTQ294 et justifier les violations qu'ils subissent dans la jouissance de leurs droits. De ce fait, il faut distinguer entre la diversité culturelle et le relativisme culturel. En effet, on ne saurait admettre que des pratiques attentatoires à la dignité humaine, telles que les violences subies par les LGBTQ, l'emprisonnement de ces personnes et les discriminations dont elles font l'objet, puissent être justifiées par le relativisme culturel. le relativisme culturel n'a aucune place dans l'édification de l'universalité des droits de l'homme. Il n'est ni plus ni moins qu'un détournement et une instrumentalisation de la diversité culturelle. En effet, lorsque la diversité culturelle devient un prétexte pour justifier les violations, il n'est plus question de diversité culturelle, mais de relativisme culturel. La diversité culturelle ne saurait être instrumentalisée pour s'opposer à l'universalité des droits de l'homme. Elle est, au contraire, indispensable à sa construction et à sa consolidation. C'est essentiellement dans cette optique que la diversité culturelle prend tout son sens. Le cadre international agréé au niveau onusien est clair à ce sujet. On ne peut invoquer la diversité des cultures pour nuire aux droits de l'homme universellement acceptés. Dès lors, la diversité culturelle ne doit pas effrayer, sous prétexte que certains États l'utilisent pour parler en fait de relativisme culturel. Inversement, au lieu de chercher à contourner leurs obligations internationales à l'égard des LGBT en invoquant le relativisme culturel et l'impérialisme culturel occidental, les États prônant le respect des valeurs traditionnelles devraient plutôt se pencher sur la manière dont ils pourraient enrichir le socle universel des droits de l'homme qu'ils ont, au fur et à mesure, contribué à édifier, y compris en adhérant aux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme de l'ONU. La politisation se poursuit également sous les traits du relativisme culturel. Le relativisme culturel est incontestablement une menace pour l'universalité des droits de l'homme, étant donné qu'il a pour objectif de s'affranchir des droits de l'homme. Il doit être distingué de la diversité culturelle qui a toute sa place dans la construction de l'universalité des droits de l'homme. |
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