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La question de la performance des banques africaines au Cameroun.


par Jean Pierre Dany Menguele
Institut des Relations Internationales du Cameroun - Master professionnel en relations internationales 2017
  

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2 : Les crises bancaires des années 80-90

La première crise bancaire qui va secouer l'ensemble du système économique et financier s'est manifestée au milieu des années 80 et à travers au moins cinq facteurs : les défauts de paiement, les créances douteuses, la suspension des découverts, les pertes financières des agents économiques du fait de l'illiquidité des banques, et les faillites (fermetures d'agences ou de certaines banques).

A la fin des années 80, la situation du secteur bancaire camerounais était donc très critique. Par exemple, en 1988, la plupart des banques affichaient un résultat négatif et une situation de fonds propres tout aussi négative (voir tableau 3). La SCB et la CAMBANK ont été les premières à faire faillite en 1988 (tableau 3). Elles ont été suivies respectivement par la BMBC et la BCC en 1991, la BICIC en 1995. Mais l'un des faits majeurs a été le retrait rapide des succursales des banques américaines dès 1985 (CBC, BBC, BAC). De nombreuses autres banques ont aussi connu des difficultés. Il s'agit entre autres de la BCD, de la Banque de Paris et des Pays bas Cameroun (Parisbas-Cam), de la First Investment Bank (FIB), du Crédit Agricole du Cameroun (CAC), pour ne citer que quelques cas. Pour la seule année 1989, quatre établissements bancaires (SCB, BIAO, BCD, et CAMBANK) parmi les plus importants du pays ont déposé leur bilan. La perte pour l'ensemble du secteur se chiffrait à près de 700 milliards de FCFA en bilan cumulé, soit un peu plus de 40% du total des bilans bancaires qui était estimé

69

à l'époque à 1520 milliards de FCFA63. Par la suite, la perte atteindra le chiffre record de 52,884 milliards en 1990 et 50 milliards au cours de la première moitié de 1995. Cette situation traduit à elle seule la profondeur du mal, dans un pays qui comptait à l'époque 15 banques.

Tableau 3 : état de quelques banques commerciales en 1988 (en milliards de FCFA)

Banque

Résultat 1987/1988

Situation nette des fonds
propres au 30 Juin 1988

Groupe des banques déficitaires

SCB

-11

-130,3

BCD

-4

-37,9

CAMBANK

-4

-56,3

Paribas Cameroun

-4,2

-39,0

Total

-23,2

-264

Groupe des banques préoccupantes

BIAOC

-1,7

-10,2

SGBC

-1,8

-13,2

CBC

-0,4

-3,5

IBAC

-0,4

-0,9

Méridien Bank

-0,4

+0,7

Total

-4,7

-27,1

Groupe de banques saines

BICIC

1,8

-6,9

BCCC

2,7

-

Total

4,7

-6,9

Source : Rapport de la société d'ingénierie bancaire internationale

Tableau 4 : Situation des banques au cours des années 80 et 90

Banque

Situation en fin des années 80

Situation en fin des années 90

SCB

En faillite en 1988 et liquidée en

1989

Est devenue la SCB-Crédit
Lyonnais

BICIC

En restructuration

Est devenue la BICEC en 1977
avec la banque Populaire

SGBC

En restructuration

En restructuration

BIAOC

En faillite et reprise en 1991
Encore en faillite en 1995

Reprise par la Meridian Bank
Cameroon en 1991

CAMBANK

En faillite en 1988 et liquidée

-

Chase Bank

Fermée en 1985

 

Boston Bank

Fermée en 1985

 

Paribas Cameroun

En faillite en 1989

 

BCCC

Fermée en 1991

Reprise par la Standard Chartered
Bank en 1991

Bank of America

Fermée en 1985

Est devenue l'IBAC avec des
intérêts camerounais

BCD

En faillite et liquidée en 1989

 

Source : Rapports annuels du Conseil National du Crédit du Cameroun

63 Voir : Rentabilité consolidé du secteur bancaire dans les différents rapports National du Crédit et les documents de la BEAC (Direction de la Recherche et de la Prévision)

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L'examen des données relatives au secteur bancaire laisse croire que la crise bancaire de la fin des années 80 était une crise financière au sens des monétaristes car celle-ci était caractérisée par la contraction de l'offre de monnaie. Après avoir subi une augmentation régulière de 1970 à 1985, la masse monétaire a connu une baisse de 1986 à 1987 et la situation monétaire a commencé à fluctuer à partir de 1988 jusqu'en 1992. La contraction monétaire de 1987 s'est traduite par une nette diminution des billets en circulation et de la monnaie divisionnaire. Avec l'avènement de la crise bancaire, les crédits alloués au secteur privé ont commencé à baisser au début des années 80. Cette baisse va même s'accentuer courant 1990 (voir graphique 3).

En fait, déjà en 1984, on a observé une substitution entre billets et dépôts. Cette substitution a donné lieu à une hausse sensible du ratio billets/dépôts à vue entre 1984 et 1990. La crise de confiance des clients met en relief le début du retrait progressif de leurs avoirs des banques et l'accentuation de la baisse observée des dépôts (tableau 5). La réduction des dépôts s'est faite sans distinction, aussi bien dans les banques solvables que dans les banques insolvables. Face à l'ampleur du marasme, l'Etat a essayé de camoufler la baisse des dépôts privés des banques en augmentant substantiellement ses propres dépôts. La situation dégradante et progressive caractérisée par une sortie massive des capitaux a annulé l'effet de camouflage des difficultés financières du pays.

Tableau 5 : Evolution des dépôts (en milliards de FCFA) dans les banques de 1984 et 1990

Banque

1984/85

1985/86

1986/87

1987/88

1988/89

1989/90

BIAOC

15,54

-19,89

-5,93

-4,83

-26,15

-20,11

BCCC

15,18

-10,45

36,62

24,18

-19,24

5,09

BICIC

-2,88

35,95

-11,05

30,71

6,52

-40,97

CAMBANK

7,57

-2,69

1,69

-

-

-

IBAC

-9,99

70,74

-20,54

-12,93

53,24

-26,77

MBC

30,13

-44,11

0,26

4,03

-1,97

-9,57

SCB

-26,20

-9,25

-3,77

-10,86

1,46

22,06

SGBC

30,09

14,13

37,94

-12,54

-5,34

-7,14

Source : études statistiques de la BEAC

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