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La question de la performance des banques africaines au Cameroun.


par Jean Pierre Dany Menguele
Institut des Relations Internationales du Cameroun - Master professionnel en relations internationales 2017
  

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B : LE SYSTEME BANCAIRE CAMEROUNAIS : DE L'INDEPENDANCE AUX CRISES BANCAIRES DES ANNES 80-90

L'évolution du système bancaire camerounais durant cette période se déroule harmonieusement jusqu'à la fin des années 70. Par la suite, dès le début des années 80 des signes d'essoufflements apparaissent mais se présentent différemment.

1 : Une relative stabilité jusqu'à la fin des années 70

Après l'indépendance du Cameroun, le développement économique, conçu sous le signe du dirigisme économique et de l'endettement extérieur a beaucoup influencé le mode de financement économique établi dans le pays [Bekolo-Ebe, (1990), Mathis, (1992)]. Le financement du développement était tel que les crédits que les banques locales consentaient devaient compléter le prêt extérieur. En plus, ces banques pouvaient distribuer des fonds que l'Etat obtenait des prêteurs extérieurs et leur rétrocédait, à charge pour elles de gérer les crédits. Dans un cas comme dans l'autre, l'influence de l'Etat était patente. L'Etat s'est engagé dans la consolidation du secteur financier privé en y prenant des parts de capital et en mettant en place des organes de contrôle.

En fait, à cette époque, le tissu bancaire camerounais était très embryonnaire. Plus précisément, ce secteur se caractérisait par une forte concentration [Abega, (1995)]. Jusqu'en 1970, seules 4 banques étaient répertoriées par le Conseil National du crédit (CNC), et en 1984, l'effectif s'élevait à 11 banques. Le système était majoritairement composé de banques privées étrangères60 au rang desquelles on peut citer : La Société Générale de Banque du Cameroun (SGBC) ; La Banque Internationale pour le Commerce et l'Industrie du Cameroun (BICIC) ; La Société Camerounaise de Banque (SCB) ; et la Banque Internationale pour l'Afrique Occidentale du Cameroun (BIAOC). Ces 4 banques représentaient plus de 75% des actifs du

60 La quasi-totalité de ces banques n'étaient que des émanations des banques françaises à savoir : La Société Générale, la BIAO de Paris, la Banque Nationale de Paris (BNP) et du Crédit Lyonnais (CL)

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système bancaire, collectant plus de 80% des dépôts et distribuant près de 90% des crédits. En réalité, toutes ces banques n'auront véritablement leurs agréments qu'après « l'ambitieuse réforme » du système bancaire camerounais de 1973.

Dès 1970, une nouvelle banque est venue s'ajouter au paysage bancaire camerounais, La Cameroon Bank Limited (CAMBANK) dont le capital était entièrement détenu par les intérêts publics camerounais. En 1971, le Cameroun comptait 5 banques commerciales61 parmi lesquels les 4/5 étaient détenus par les intérêts français et 47 agences dont 8 pour la CAMBANK. Le 30 Août 1973, une réforme est venue bouleverser le paysage bancaire camerounais. Cette réforme, au-delà de l'implication des nationaux dans le domaine financier, prévoyait la possibilité d'une ouverture des banques étrangères non françaises dans le système bancaire. Pourtant, jusqu'en 1978, le paysage bancaire n'a pas beaucoup évolué, hormis la multiplication d'agences commerciales des banques existantes sur le territoire national qui sont passées de 47 à 103. Cependant, en 1976, on note la création d'une banque d'Etat orientée vers le financement du développement : La Banque Camerounaise de Développement (BCD).

Au début des années 80, le paysage bancaire a connu une entrée des banques anglo-saxonnes pour la plupart américaines. Il s'agit de la Chase Bank Cameroon (CBC) créée en 1979 ; la Boston Bank Cameroon (BBC) en 1980 ; la Bank of America Cameroon (BAC) ; la Standard Chartered Bank Cameroon (SCBC) en 1981 ; et la Bank of Credit and Commerce (BBC) en 1983. L'installation de ces banques a entraîné un accroissement rapide des agences bancaires. Le nombre d'agences est passé de 103 à 145 en 1984. A cette période, le Cameroun comptait alors 11 banques commerciales et 2 banques de développement62.

En dehors de la CAMBANK et la Banque Unie de Crédit (BUC) dont le capital était entièrement détenu par des camerounais, la participation de l'Etat au capital social des banques atteignait les 67%. Ainsi, dans la plupart des cas, l'Etat était actionnaire principal. Le gouvernement était omniprésent dans les processus de décision au sein des banques, directement ou par le biais des entreprises publiques qu'il contrôlait. Indépendamment de la présence du financement extérieur, le gouvernement a souhaité contrôler la distribution du crédit interne dans le but de mieux planifier les investissements dans des secteurs ciblés. Cette

61 La SCB était la plus importante au regard du montant du capital (5 Milliards de FCFA), et la BICIC la plus importante en terme de crédits distribués (plus de 180 Milliards de FCFA) et de dépôts collectés (125 Milliards de FCFA)

62 La BDC et le Fonds National de Développement Rural (FONADER)

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politique d'encadrement de crédit s'est malheureusement traduite par le non-respect des normes de prudence.

Durant les années 70, l'exploitation pétrolière a doté le pays de ressources importantes et engendré un gonflement des ressources bancaires. Les établissements de crédit se sont alors lancés vers une distribution généreuse et incontrôlée des crédits à l'économie pour le financement des projets jugés « rentables pour les locaux ». Par exemple, le volume de financements accordés aux projets s'est accru d'environ 374,13% entre 1976 et 1977. Durant cette même période, le montant des garanties s'est accru de 352,4%. Dans cette lancée, sans que des études sérieuses visant à mesurer le degré d'élasticité de l'investissement par rapport au taux d'intérêt des prêts bancaires aient été menées au préalable, les banques ont orienté leur intervention vers les financements courts au détriment des financements longs. Cette préférence marquée pour les financements à court terme était essentiellement conditionnée par les projets axés vers les produits de base et le commerce de distribution. On assistait alors à un renouvellement des prêts courts pour financer des investissements longs. Or le développement exige aussi et surtout des financements à long terme.

Graphique 3 : Rythme de progression des crédits au secteur privé de 1960 à 2005

Source : Indicateurs de la Banque Mondiale (2007)

Etant donné les facilités d'obtention de financements, la progression des crédits au secteur privé (en pourcentage du PIB) est passée de 14,20% en 1970 à 24,53% en 1977, pour se situer à 3,24% en 1982 (voir Graphique 3).

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Il convient de relever que la plupart des crédits octroyés n'étaient pas toujours remboursés. Evalué à 5,6 milliards de FCFA en 1980, le montant des créances douteuses a atteint 38 milliards de FCFA au plus fort de la crise bancaire. Quoiqu'à partir de 1982 déjà, les banques accumulaient des pertes dues à la mauvaise gestion et à la fraude, l'Etat les soutenait en alimentant le système bancaire de ses ressources pétrolières.

La surveillance et la sanction des banques dépendaient du Ministère de l'Economie et des Finances (MINEFI) et, comme l'Etat avait des intérêts dans la plupart des banques, la réglementation prudentielle était peu appliquée, aucune règle juridique sérieuse permettant de poursuivre les débiteurs indélicats n'ayant cours. De ce fait, la crise bancaire était presque inévitable.

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle