SECTION II : LES DOMAINES DE LA PERFORMANCE
BANCAIRE
Le phénomène grandissant de l'expansion des
banques à l'internationale suscite un intérêt particulier
quand à l'impact qu'il génère sur la performance de ces
entreprises toutes particulières. Le plus souvent, une banque
décide de s'internationaliser pour des raisons bien définies,
mais qui aboutissent toutes à la quête d'une meilleure
performance. Aussi, il convient de déterminer les domaines de la
performance bancaire. La présente section se propose de présenter
les indicateurs quantitatifs ou financiers d'une part et les indicateurs
qualitatifs ou non financier d'autre part.
A : LES INDICATEURS FINANCIERS DE LA PERFORMANCE
BANCAIRE
Les banques accordent une très grande importance
à la performance bancaire. Les analystes financiers utilisent de
nombreux types d'indicateurs financiers afin d'appréhender la
performance des banques. Ces indicateurs peuvent être budgétaires
ou encore comptable. Dans cette section nous nous focaliserons essentiellement
sur la rentabilité bancaire d'une part, et sur les autres indicateurs
financiers d'autre part.
1 : La rentabilité bancaire
La rentabilité peut être globalement
définie comme « l'aptitude de l'entreprise à secréter
un résultat exprimé en unités monétaires
».28 Ainsi définie, cette notion renvoie à
l'appréciation de l'efficacité de l'entreprise, mais
privilégie une évaluation monétaire des performances.
Qu'elle apparaisse comme le reflet d'une conception
étroite de l'efficacité, ou, au contraire comme une expression
synthétique des performances de toute nature, la rentabilité est
généralement présentée comme une des
références fondamentales qui orientent les décisions et
les comportements des entreprises. Mais la façon dont ces
dernières la prennent en compte dans la formulation de leurs projets
donne lieu à des appréciations divergentes.
Afin de mieux appréhender la rentabilité
bancaire, nous présenterons d'abord ses différentes approches,
avant de nous appesantir sur sa mesure.
28 B. Colasse, Gestion financière de
l'entreprise, PUF, Paris, 1993
28
1.1 : Les différentes approches de la
rentabilité bancaire
Nouy (1993) définissait la rentabilité bancaire
comme la capacité d'une banque à dégager de son
exploitation des profits élevés lui permettant de poursuivre son
activité, tout en déduisant les coûts nécessaires
à la poursuite de l'activité. Les analystes financiers peuvent
mesurer cette rentabilité financière de trois manières
différentes.
D'abord, la rentabilité est évaluée
à partir des marges, des coûts et des rendements. Nouy (1993)
précise que la variation de la rentabilité est fonction de
l'évolution des taux mais également de la variation des volumes.
Pour lui, il convient donc de tenir compte de la variation de ceux-ci afin
d'apprécier la performance bancaire. Pour ce faire, l'étude des
rendements mais aussi des coûts est nécessaire. Cet examen est
réalisé habituellement en comparant les montants des
intérêts perçus et versés avec les montants des
prêts et emprunts qui correspondent.
Ensuite, l'analyse de la rentabilité des banques est
aussi effectuée à partir des Soldes Intermédiaires de
Gestion (SIG). Ces soldes permettent de comprendre et de connaître les
différents éléments qui ont permis d'obtenir le
résultat net de la banque. Les SIG représentent
généralement le Produit Net Bancaire (PNB), le Produit Brut
d'Exploitation (PBE), le Produit Net d'Exploitation (PNE) et le Résultat
Net (RN). Certaines études à l'image de Hubrecht et Guerra (2005)
étudient la performance des banques à partir du PNB. Ces auteurs,
qui analysent la performance des agences bancaires, considèrent que
celles-ci peuvent être analysées comme des succursales dans la
mesure où celles-ci sont organisées de telle sorte que les
décisions en dotation de ressources ou en amortissement de produits sont
prises par la direction générale. Le PNB est égal à
déduction des charges bancaires des produits bancaires, résultant
des activités de prêts et d'emprunt, de change et des
opérations de titres.
Enfin, les analystes s'intéressent également
à la structure de l'exploitation mise en exergue par les ratios
d'exploitation. Ces ratios sont représentés par le Return On
Equity (ROE) exprimant la rentabilité du point de vue de l'actionnaire ;
Le Return On Asset (ROA), représentant le rendement de l'actif, ou
encore le coefficient global d'exploitation mesurant la partie des profits
réalisés, absorbés par les coûts fixes bancaires.
29
1.2 : Mesure de la rentabilité bancaire :
rentabilité financière et rentabilité
économique
La littérature bancaire et financière assimile
souvent le concept de rentabilité aux concepts d'efficience et
d'efficacité. Ces deux concepts sont très proches dans beaucoup
d'études de rentabilité bancaire. Le concept d'efficience met en
relation les gains réalisés et les procédés
utilisés pour les obtenir. L'efficience peut être donc
définie comme un processus menant à la réalisation des
gains élevés accompagnés d'une minimisation des
coûts. L'efficience implique donc une rentabilité
élevée et une productivité. L'efficacité quant
à elle, est caractérisée par la capacité d'une
banque, à réaliser et à atteindre un résultat
désiré, prévu, et surtout appréciable. En effet,
l'efficacité d'un gestionnaire est ordinairement reconnue dans
l'aptitude à celui-ci à réaliser des objectifs
fixés. Ces deux notions font donc appel à celle de
rentabilité.
Comme nous l'avons souligné précédemment,
la mesure de la rentabilité peut être faite à partir du
résultat opérationnel (exprimant l'efficacité des
systèmes d'investissement et d'exploitation), et du RN ou encore des
ratios de rendement des capitaux propres (ROE) ou de rendement de l'actif
(ROA).
D'ailleurs, l'étude de la performance bancaire se fait
majoritairement dans la littérature, à partir du ROE et du ROA.
L'utilisation de ces ratios est très commune dans la mesure où
l'évaluation de la performance faite uniquement à partir des
coûts possède des limites. En effet, De Young, Hunter et Udell
(2004) utilisent ces indicateurs afin d'évaluer la performance des
banques. Ils stipulent qu'une mesure de la rentabilité prenant en compte
exclusivement des coûts ne révèle pas la rentabilité
réelle de la banque. En effet, celle-ci peut décider de mener une
politique d'investissement en personnel qualifié ou en équipement
de qualité ou en équipement de qualité pesant sur les
coûts, l'objectif étant de maximiser les bénéfices.
Dans ce cas, la banque se révèle moins efficiente en termes de
coûts. Ces différents investissements rapportés au total de
l'actif nous communiquent la rentabilité de l'actif bancaire.
En ce sens, le ROE, mesurant la rentabilité des
capitaux propres, évalue la capacité de la banque à
utiliser au mieux ses actifs pour réaliser de bons résultats. Ce
ratio correspond de ce fait, au bénéfice net perçu par
l'ensemble des actionnaires. Cette mesure traduit la santé
financière de la banque quand celle-ci connaît des
difficultés, aucun dividende ne sera versé aux actionnaires. De
même, si elle dépose son bilan, les investisseurs en capitaux
propres ne seront remboursés que si le créancier l'est. Dans le
cas contraire, si elle a une bonne santé financière, le ROE reste
aussi un bon indicateur, puisque les actionnaires perçoivent tous les
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bénéfices. Ce ratio permet
également de rendre compte de la réelle
capacité bénéficiaire de la banque, et de la
rentabilité des capitaux injectés dans celle-ci [De Coussergues
et Bourdeaux, (2010)]. Aussi, le ROE est calculé en rapportant le RN aux
fonds propres moyens. Les capitaux propres moyens représentent les
capitaux appartenant définitivement aux apporteurs, dont la
rémunération est assise sur le RN.
Résultat Net
ROE = Capitaux propres
moyens
La définition de ratio de rentabilité des
capitaux propres varie en fonction de l'activité. Par exemple, si on se
focalise sur des organismes de crédit, la définition du ROE peut
être faite à partir des fonds pour risque bancaire
généraux. Le ratio devient alors le suivant :
ROE = Résultat net +ou-dotations ou reprises
du fond pour risque bancaire généraux dans
l'année
Capitaux propres moyens
Le ROA, mesurant la rentabilité de l'actif, est
utilisé par tous les établissements financiers. Cet indicateur
est aussi assimilé à la rentabilité
économique. Il donne la rentabilité instantanée
de l'ensemble des actifs gérés. Le calcul du ROA se fait de la
façon suivante :
ROA = Résultat Net ou
ROA = Résultat net
Total du bilan Actifs
gérés
Ce taux représente également le niveau de
rentabilité des capitaux propres s'il n'y a aucun endettement. Cette
mesure est bien adaptée aux activités de banque
privée et de gestion d'actifs. Cependant, ce taux reste un
taux comptable qui ne prend pas en compte l'aspect
risqué de l'activité bancaire. Son utilisation reste
donc limitée, même si il indique l'efficacité
financière de la banque. Le ROA représente également un
indice permettant de mesurer l'efficience des managers puisque ce taux est
utilisé notamment dans le cas des filiales, afin de comprendre la
manière dont les dirigeants transforment les actifs en
bénéfices.
La rentabilité de l'actif (ROA) et la
rentabilité des capitaux investis (ROE) sont des taux à prendre
avec précaution. En effet, pour De Coussergues et Bourdeaux
(2010) le développement des activités hors bilan et des
prestations et services peuvent changer la valeur de la rentabilité de
l'actif (ROA). De plus, il existe une relation d'interdépendance entre
ces
31
deux ratios dans la mesure où le ROE
équivaut au ROA multiplié par le rapport entre le
total du bilan et les fonds propres29.
ROE = ROA Total bilan
Fonds propres
Tableau 1 : ROE et ROA des banques
européennes
Banques
|
ROE (%)
|
ROA (%)
|
BNP Paribas
|
5,83
|
0,18
|
Commerzbank
|
0,33
|
1,01
|
Crédit Agricole
|
2,7
|
0,08
|
Emporiki Bank of Greece
|
-66,67
|
-1,72
|
HSBC
|
5,52
|
0,27
|
Société Générale
|
7,69
|
0,25
|
Source : Statistiques Bankscope, taux de
rentabilité des capitaux propres et de l'actif, année 2008
Les niveaux de ROE et de ROA des banques européennes
représentées dans le tableau ci-dessus, nous montrent les
difficultés rencontrées par celles-ci lors de la crise
financière de l'année 2008. Pour De Coussergues et
Bourdeaux (2010), le ROE et le ROA d'une banque devraient être
respectivement être supérieurs à 15% et 1%. Ce qui n'est
pas le cas pour les banques susmentionnées. Le ratio de
rentabilité des capitaux propres (ROE) est aussi trompeur dans certains
cas puisque le haut niveau de celui-ci peut provenir d'une relative
faiblesse des fonds propres. Ces ratios doivent donc être pris avec
précaution.
Il existe d'autres indicateurs financiers de la performance
bancaire, le prochain paragraphe fera l'objet de leur présentation.
29 C'est-à-dire au levier des fonds propres
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