2.1.2 Les contreparties de la masse
monétaire
La lecture du tableau ci-dessous, nous renseigne que depuis
2002, le niveau du crédit à l'Etat tend à
s'égaliser avec celui du crédit à l'économie. L'on
pourrait penser qu'il y a une réelle diminution de l'effet
d'éviction, et pourtant, les experts de la Banque Centrale nous mettent
en garde dans l'interprétation de cette baisse du crédit à
l'Etat45.
Etant donné que plusieurs opérations
financières ne suivent pas la chaine de dépense. Celles-ci se
placent dans le budget de l'Etat dans la rubrique dépenses à
régulariser. Dans la situation monétaire intégrée,
le compte Autres Postes Nets46 est aujourd'hui un compte fourre-tout
dans lequel sont placées toutes opérations financières
à régulariser financées par les avances de la Banque
Centrale et constitue la part la plus dominante dans les contreparties de la
masse monétaire.
45 Propos recueillis lors de nos recherches à la Banque
Centrale du Congo.
46Les APN comprennent les postes suivants: Comptes du
capital, Comptes de réévaluation, Fonds de contrepartie et Divers
nets. L'accroissement des APN est non seulement imputable aux Dépenses
à régulariser qui se logent au poste Divers Nets mais aussi
à la dépréciation monétaire laquelle s'est traduite
par une augmentation du poste « réévaluations ».
Serge KASEREKA KANYAMA Page 94
« Les Déterminants de l'Offre de Monnaie dans
l'Economie Congolaise de 1980 à 2013»
C'est ainsi que nous pesons que le crédit à
l'Etat reste toujours supérieur aux crédits à
l'économie.
Tableau n°13. Les contreparties de la masse
monétaire en millions USD
|
Années Avoirs Crédits à
Crédits à Autres
Extérieurs l'Etat l'économie Postes
Nets Nets
|
2002
|
-581,811
|
-27,192
|
36,51
|
831,122
|
2003
|
-695,25
|
-4,205
|
52,676
|
996,072
|
2004
|
-634,492
|
51,821
|
93,796
|
1092,072
|
2005
|
-784,206
|
196,085
|
147,165
|
1083,489
|
2006
|
-790,364
|
259,49
|
239,915
|
1173,21
|
2007
|
-343,15
|
350,33
|
391,933
|
910,722
|
2008
|
-464,231
|
389,319
|
743,594
|
920,2
|
2009
|
-45,374
|
191,475
|
760,651
|
803,234
|
2010
|
907,9
|
-3335,2
|
815
|
681
|
2011
|
834,9
|
-161,3
|
913,3
|
808
|
2012
|
1.337,8
|
-593
|
1.141,6
|
862,9
|
2013
|
1.450,4
|
-495,6
|
1.581,9
|
956,8
|
Source : BCC, Rapport Annuels 2002-2009
2.1.3 Les composantes de la masse monétaire en
millions USD
L'analyse des composantes de la masse monétaire, nous
renseignent une montée des dépôts en devises.
En effet, malgré la maitrise du taux d'inflation
à un niveau modéré en 2002, le phénomène de
dollarisation s'est accentué au point qu'aujourd'hui la quasi - monnaie
(M2-M1) est supérieure à la monnaie (M1). En effet, les
dépôts en devises sont compris, dans la situation monétaire
intégrée, dans la quasi-monnaie, et demeurent la part importante
du principal agrégat monétaire.
Ainsi, ils représentent 58,06% du total de la masse
monétaire en 2008 contre 65,98% à fin 2009. Cette progression
traduit une accentuation de la dollarisation de l'économie d'une
année à l'autre.
Serge KASEREKA KANYAMA Page 95
« Les Déterminants de l'Offre de Monnaie dans
l'Economie Congolaise de 1980 à 2013»
Tableau n°14. Les composantes de la masse
monétaire en millions USD
Années
|
Circulation Fiduciaire
|
Dépôts à vue en MN
|
Dépôts à terme en
MN
|
Dépôts en devises
|
Provision pour paiements des importations
|
2002
|
130,207
|
21,289
|
0,423
|
94,296
|
12,415
|
2003
|
169,517
|
24,057
|
0,862
|
139,782
|
15,076
|
2004
|
228,484
|
35,152
|
0,816
|
220,293
|
15,664
|
2005
|
278,091
|
43,93
|
0,885
|
296,832
|
22,768
|
2006
|
376,345
|
59,093
|
0,877
|
423,245
|
22,692
|
2007
|
463,733
|
132,415
|
4,97
|
672,905
|
34,984
|
2008
|
476,393
|
137,515
|
2,042
|
945,779
|
67,152
|
2009
|
422,624
|
108,999
|
3,874
|
1128,328
|
46,16
|
2010
|
510,071
|
1075,3
|
96,6
|
1.364,8
|
45,012
|
2011
|
647,487
|
1637,2
|
167,5
|
1685,8
|
25,199
|
2012
|
642,56
|
2249,4
|
223,6
|
2.055,8
|
22,791
|
2013
|
760,458
|
2495,9
|
291,8
|
2385,1
|
21,652
|
Source : BCC, Rapport Annuels 2002-2009
L'évolution de la masse monétaire
observée durant la période sous analyse s'explique par
l'efficacité des instruments utilisés par la BCC.
En effet, dans le cadre de mise en oeuvre de sa politique
monétaire, la BCC a abandonné le dispositif de contrôle
direct resté en vigueur jusqu'à mi-décembre 2005 ainsi que
le certificat de dépôt en décembre 2002 et a adopté
le billet de trésorerie. C'est ainsi que la politique monétaire
de la BCC ne dispose plus que d'instruments indirects (le taux directeur, le
billet de trésorerie et le coefficient de réserve obligatoire)
lesquels s'inscrivent dans la logique du développement des
marchés et de l'ouverture vers l'extérieur.
Cette restructuration de la politique monétaire de la
BCC a eu le mérite de faire jouer à la politique monétaire
son rôle au travers des instruments utilisés, comme le montre
l'analyse suivante :
? Le taux d'intérêt
L'objectif poursuivi par la Banque Centrale du Congo en
matière de taux d'intérêt est le réajustement
régulier du taux directeur en fonction du taux d'inflation et le
maintien d'une marge de positivité en terme réel dudit taux
d'intérêt.
Depuis plus de huit ans, la BCC a fixé une marge de
positivité de 10 points au-dessus du taux d'inflation et ce, en vue de
garantir un redressement positif en terme réel des opérations
bancaires compte tenu de l'évolution favorable du cadre
macroéconomique et d'une très bonne maitrise de l'inflation. La
BCC a progressivement ramené la marge de positivité de 10
à 5 points avant de la fixer en 2003 à 3 points au-dessus du taux
d'inflation.
Serge KASEREKA KANYAMA Page 96
« Les Déterminants de l'Offre de Monnaie dans
l'Economie Congolaise de 1980 à 2013»
La politique rigoureuse de gestion de cet instrument a eu le
mérite de faire jouer au taux directeur de la Banque Centrale son
rôle de taux de référence du système bancaire. En
effet, au 30 juin 2004, les taux d'intérêt interbancaires se sont
situés au niveau du taux directeur de la BCC, soit 8% l'an.
Il est à noter que la BCC applique une politique
libérale en matière des taux d'intérêt. En d'autres
termes, les banques sont libres de fixer les conditions d'octroi de leur
crédit et de rémunération des dépôts de la
clientèle. S'agissant des taux débiteurs, ceux-ci varient d'une
banque à l'autre.
Quant aux taux créditeur, les banques commerciales les
fixent de commun accord avec les clients suivant les conditions du
marché.
Tableau 15. L'évolution du taux d'inflation, du
taux directeur réel et du taux de la croissance en %
Années
|
Taux d'inflation fin période en %
|
Taux
directeur
réel
|
Taux
croissance
|
2002
|
15,8
|
8,2
|
3,47
|
2003
|
4,4
|
3,6
|
5,79
|
2004
|
9,2
|
4,8
|
6,64
|
2005
|
18,2
|
7,5
|
7,8
|
2006
|
21,3
|
2,8
|
5,6
|
2007
|
9,96
|
13,24
|
6,3
|
2008
|
27,6
|
12,4
|
5,9
|
2009
|
51,2
|
13,8
|
2,5
|
2010
|
19,8
|
22
|
7,1
|
2011
|
15,4
|
20
|
6,9
|
2012
|
2,7
|
4
|
7,2
|
2013
|
1,07
|
3
|
8,5
|
Source : BCC, Rapport Annuels 2002-2009
Au regard de ce tableau, il ressort qu'en 2002, on a
assisté à un ralentissement considérable du taux de
croissance de l'inflation. En effet, le taux d'inflation fin période est
passé de 135,1% en 2001 à 15,80% en 2002 tandis que le taux
directeur est passé de 140% en 2001 à 24,4% en 2002. Ces
résultats très encourageant ont continué de 2003 à
2004, avec une situation relativement apaisée.
Cependant, en 2005, il a été observé de
fortes pressions inflationnistes marquées par une hausse
prononcée des taux d'inflation fin période par rapport à
l'année précédente. En effet, le taux d'inflation fin
période a été de 21,30% en 2005, contre 9,20% en 2004,
alors que le taux directeur a été de 28,8% en 2005, contre 14% en
2004. En 2006 et 2007, l'inflation a été relativement
maitrisée à l'instar de la période 2003-2004. En 2008, on
a constaté de nouveau une augmentation remarquable du taux de croissance
de l'inflation par rapport à l'année 2007. Le taux
Serge KASEREKA KANYAMA Page 97
« Les Déterminants de l'Offre de Monnaie dans
l'Economie Congolaise de 1980 à 2013»
d'inflation fin période est passé de 10% en 2007
à 27,6% en 2008 alors que le taux directeur est passé de 22,5% en
2007 à 40% en2008.
? Le Billet De Trésorerie
(BTR)
Depuis le 16 décembre 2002, la Banque Centrale a
émis le « Billet de trésorerie » qui est un instrument
de régulation des liquidités. Cet instrument permet à la
Banque Centrale d'éponger la liquidité ou réguler la masse
monétaire en circulation dans l'économie et a essentiellement
pour mission d'assurer le financement sain du déficit budgétaire
de l'Etat.
Le taux d'intérêt des billets de
trésorerie est un taux créditeur et ce taux réagit
à des chocs permanents sur la liquidité bancaire.
L'utilisation du billet de trésorerie par voie d'appel
d'offre a permis d'éponger l'excédent des liquidités en
circulation. Par exemple, le BTR a permis de stériliser 47,0 milliards
de CDF en 2008 contre 32,9 milliards une année auparavant, soit une
ponction nette de 14,1 milliards. Au cours de l'année 2009, cet
instrument a permis de stériliser la liquidité pour une valeur de
9,7 milliards de CDF.
? Le coefficient de réserve
obligatoire
Depuis juin 2001, l'assiette de calcul de la réserve
comprend les dépôts de la clientèle tant en monnaie
nationale qu'en monnaies étrangères.
Cet instrument de régulation monétaire a subi,
au 31 juillet 2003, une modification importante dans le but notamment
d'accroitre son efficacité. Pour un meilleur contrôle des
ressources pouvant exercer un effet direct sur la base monétaire, seuls
les dépôts de la clientèle sont ciblés.
Toutefois, la compression de l'assiette de calcul de la
réserve obligatoire a été composée par
l'incorporation des ressources en monnaie étrangère jadis exclues
de la réserve ce qui a mis fin au traitement discriminatoire à
l'égard des ressources en monnaie nationale.
Notons, que le calcul et le contrôle de la
réserve s'effectuent sur une base mensuelle contre une base hebdomadaire
précédemment.
Néanmoins, le coefficient de la réserve
obligatoire a été fixé à 2% au 31 juillet 2003 afin
d'éviter toute stérilisation excessive des ressources des banques
et même de financer l'économie. La non constitution de la
réserve obligatoire est sanctionnée par une
pénalité égale au taux appliqué aux avances en
comptes courants augmenté de la moitié.
Ces innovations ont eu pour effet d'améliorer
l'efficacité de cet instrument par la stérilisation d'un volume
beaucoup plus important de liquidité étant donné que 55%
des dépôts bancaires sont en devises.
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« Les Déterminants de l'Offre de Monnaie dans
l'Economie Congolaise de 1980 à 2013»
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