Nécessité de la rétention et de l'exécution de la peine de mort en droit positif congolais.( Télécharger le fichier original )par Chrispin BOTULU MAKITANO Université de Kisangani - Licence 2014 |
II. POSITION DU PROBLEMELa problématique est définie comme étant l'ensemble d'éléments ou d'informations formant le problème de l'étude.14(*) Cependant, la question de la peine de mort continue à diviser les opinions. Plusieurs pays dans le monde ont fait de la peine de mort un instrument légal, et certains l'on rejetée. D'autres Etats qui la maintiennent pratiquent du moins l'abolitionnisme en ne condamnant plus à mort. Et bien d'autres encore qui condamnent, ne l'exécutent plus, c'est notamment le cas de la RDC. Les abolitionnistes tentent de se justifier du fait que la tendance générale est l'abolition à travers le monde par le caractère sacré qu'accordent plusieurs instruments juridiques à la vie humaine.15(*) Par contre, les rétentionnistes estiment que la montée de la criminalité, notamment les assassinats et les associations des malfaiteurs16(*), mérite qu'il soit retenu une sanction ayant une force irrévocable ou un caractère véritablement coercitif et dissuasif pour servir de leçon à la population qui se veut orientée vers avenir meilleur dans le respect de la loi, de l'ordre public et de bonnes moeurs, d'où le maintien de la peine de mort. Et en outre, paradoxalement aux rétentionnistes qui soutiennent toujours l'application de cette peine par le fait qu'elle n'est pas expressément abolie dans l'arsenal juridique congolais, les abolitionnistes estiment que cette peine est déjà tacitement abolie en RDC, en vertu du moratoire de fait pris en 2006 suspendant l'exécution de cette peine. Et, la question reste beaucoup plus controversée car le droit positif congolais qui prévoit la peine de mort renvoie le pays dans une inconstitutionnalité notoire en rapport avec l'article 16 de la constitution du 18 Février 2006 qui consacre le caractère sacré de la personne humaine17(*) ; le statut de la Cour Pénale Internationale qui a tacitement prévu l'abolition de la peine de mort, mais en laissant du moins la latitude aux Etats membres d'apprécier souverainement cette option18(*) ; et aussi la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme qui garantit le droit à la vie et l'exclusion des peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants.19(*) En effet, tenant compte d'une multitude de prétentions abolitionnistes sur la question sous-examen, notre étude s'est focalisée sur le contexte du droit positif congolais et sur les réalités socio-économiques du pays. Au-delà de tout, le constat sur les crimes les plus graves qui se perpètrent dans la société congolaise ; une certaine gravité des faits infractionnels auxquels la société fait face, notamment les assassinats, les meurtres à grande échelle, les associations des malfaiteurs, les crimes de guerre ou les crimes contre l'humanité, font en sorte que la peine de mort paraisse comme un châtiment le plus efficace et coercitif en vue de dissuader tous les criminels éventuels mettant en péril des vies humaines innocentes. Car, les meurtres et les assassinats reflètent un caractère odieux en ce qu'ils ôtent des vies aux paisibles citoyens et créent un climat de terreur dans la société ; les associations des malfaiteurs et quelques crimes les plus graves font montre d'un palier élevé de criminalité, tendant à occasionner la perte massive des vies humaines. Le droit à la vie étant consacré dans la constitution en vigueur, ce qui renvoie à l'abolition de la peine de mort selon une certaine opinion abolitionniste alors que le code pénal la retient encore parmi les lourdes peines prévues, certains individus disposant d'une énorme potentialité économique et financière se flattent de jouir seuls de ce droit au détriment de celui des autres. Etant donné que la situation socio-économique du pays ne parait pas plausible pour le secteur judiciaire d'oeuvrer en toute indépendance et en toute loyauté, et surtout l'état actuel de délabrement avancé des établissements pénitentiaires, et encore moins que la loi prévoit certaines modalités de remise en liberté des criminels en détention ou en prison, une fois détenus ou incarcérés, ces individus, se sentant même aussi plus puissants que l'Etat à cause de cette potentialité économico-financière dont ils disposent, sont convaincus de leur liberté éventuelle parce qu'ils sont « intouchables ». De même pour justifier leur inhérence intouchable, ces individus considèrent leur fortune comme des raisons légitimes pouvant les amener à railler avec des vies humaines : « soki osakani na ngai, nakoboma yo, nakofuta prison na poche ya likolo pe nakobima ». Cette parole est fort menaçante comme si on vivait dans une jungle où la loi n'existerait que pour protéger les plus puissants qui croient avoir seuls droit à la vie, et les plus faibles ne doivent exister que pour promouvoir leurs intérêts. Alors que les défenseurs des droits humains et certains abolitionnistes plaident pour la réinsertion sociale de ces criminels susceptibles d'encourir la peine de mort, les concernés eux-mêmes voient d'un autre oeil cette option, en la transformant au libertinage ou au laisser-faire, parce que leur fortune leur permettra de recouvrer la liberté une fois poursuivis ou incarcérés dans l'éventualité pour homicide ou n'importe quelle infraction portant atteinte aux vies humaines. Par-delà cette argumentation, la question semble toujours contourner l'opinion tant nationale qu'internationale. Pour les uns encore, abolir la peine de mort trouve sa cause à la primauté que la RDC accorde aux traités internationaux ratifiés, parmi lesquels, aucun ne fait recours à la peine de mort. Ça trouve aussi sa cause du fait que la constitution du pays proclame la vie parmi les droits sacrés dont nul ne peut porter atteinte. C'est l'idée de la reconnaissance universelle de la vie humaine et les conséquences qui pourraient naître de l'exécution d'un condamné à mort.20(*) Pour les autres, aucun de ces instruments n'a expressément aboli la peine de mort, et l'utilité de l'abolition de la peine de mort semble sacrifier la vie des plus faibles à la merci des plus forts qui se croient au dessus du seuil. C'est ce qui renvoie les doctrinaires à converger leur positionnement pour trouver solution quant à l'abolition ou à la rétention de la peine de mort. Néanmoins, bien que retenue dans le code pénal congolais, la peine de mort pose problème quant à son exécution effective. En pratique, elle est requise par l'officier du ministère public et prononcée par le juge répressif, mais demeure non exécutée en raison du moratoire pris en 2006 qui suspend son exécution pour une période donnée sur tout le territoire de la République. Il ressort de ce moratoire que cette peine demeure lettre morte bien que la finalité d'une décision judiciaire soit l'exécution afin que la victime de l'infraction soit rétablie dans ses droits. Enfin, se rendant compte de la situation sécuritaire du pays qui engendre une montée en flèche du taux de criminalité, ce moratoire semble intriguer la commission massive des atteintes à la vie qui demeureront impunies sans un châtiment proportionnel. Donc, la question gravite autour de l'utilité de abolition ou de rétention de cette peine, en se fondant sur les réalités politiques et socio-économiques du pays, et compte tenu de la mentalité des congolais qui ne s'est pas encore humanisée. Face à cette réflexion qui suscite toujours un débat sans fin quant à l'abolition ou à la rétention de la peine de mort en droit positif congolais, une question principale et fondamentale mérite d'être retenue : en quoi se dégage la nécessité de la rétention et de l'exécution de la peine de mort en droit positif congolais ? Outre cette question principale, deux questions spécifiques viennent expliciter le fondement du problème : · Vu différents traités internationaux qu'a ratifiés la RDC en rapport avec la vie humaine et vu la position du législateur congolais face à la question, la peine de mort est-elle vraiment abolie ? · Quelles en seront les conséquences une fois la peine de mort abolie en RDC ? L'économie de toutes ces questions constitue le point focal de notre étude qui s'inscrit dans la perspective de la rétention de la peine de mort et de son exécution effective en droit positif congolais. * 14 OTEMIKONGO MANDEFU, J., Cours d'initiation à la recherche scientifique, G2, FD, UNIKIS, 2010-2011. * 15 NYABIRUNGU Mwene SONGA, Droit pénal général, notes de cours polycopiées, UNIKIS, FD, G2, 2009-2010. * 16 ABIA MAMBASA, S., Op. Cit. * 17 ALIKA MOBULI, P., Op. Cit. * 18 Les articles 77 et 80 du statut de la Cour Pénale Internationale. * 19 Les articles 3 et 5 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme. * 20 ALIKA MOBULI, P., Op. Cit. |
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