II. Communication et action diplomatiques
Monsieur Vincent FLOREANI, Porte-parole
Adjoint du MAEDI, a s'est appesanti sur la communication et action
diplomatiques : le cas du MAEDI. La fonction de communication des
missions diplomatiques ne figure nulle part dans les textes officiels, mais
elle valorise toutes les autres. Communiquer, c'est d'abord expliquer ce
que fait la France aux autorités locales et à tous les
acteurs qui peuvent exercer une influence ; pas seulement la politique de
la France envers le pays de séjour, mais ses positions sur les sujets
d'actualité. Depuis Paris, la Direction de la communication et de la
Presse (DCP) transmet chaque jour les textes et déclarations officiels
aux postes qui reçoivent aussi par télégrammes des
commentaires sur les événements internationaux. Il appartient aux
missions de faire le meilleur usage de ce matériel en fonction des
circonstances. Le MAEDI n'agit pas de même qu'aux États-Unis,
où le lobbying est la règle, et dans tel pays autoritaire,
où une ambassade trop active auprès de l'opinion serait vite
taxée d'ingérence. Communiquer, c'est plus largement faire
connaître la France, au-delà des clichés. La France n'a
certes pas à renier sa gastronomie et ses parfums, mais c'est une
tâche toujours recommencée que de rappeler qu'elle produit aussi
des Trains à Grande Vitesse (TGV) et qu'elle est la quatrième
puissance économique du monde.
Le rôle du Chef de poste : d'un
point de vue tiré d'une expérience diplomatique
particulière de quarante années et d'une vingtaine
d'années de Chef de Poste, Monsieur Pierre MOREL,
ancien Ambassadeur de France, nous a enseignés qu'il y a tout un
apprentissage à faire une fois que l'on est Chef de Poste. Il a
rappelé que les méthodes de travail sont organisées,
à savoir : instructions au départ, correspondance
diplomatique régulière, rapports de fin de mission.
L'écrit devient le support usuel des relations entre diplomates. Le
bilatéralisme devient le prototype de la structure diplomatique.
L'ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire est le
représentant du Chef de l'Etat à l'étranger ; il
assure ainsi une fonction traditionnelle telle qu'elle résulte de la
pratique internationale. Ses pouvoirs se fondent sur deux actes qui
confèrent sa qualité : sa nomination et son
accréditation. La nomination fait de lui le dépositaire de
l'autorité de l'État d'envoi dans le pays d'accueil mais n'est
pas suffisante ; ce n'est qu'après la présentation de ses
lettres de créance qu'il acquiert la pleine capacité à
exercer ses fonctions parmi lesquelles :
La représentation :
cette fonction confère à l'Ambassadeur le pouvoir de
représenter son pays auprès du pouvoir central étranger.
Cette mission de représentation a évolué sur trois
plans : l'étendue du champ des personnes
représentées, le contenu des politiques
représentées et l'éventail des personnes auprès
desquelles s'exerce cette représentation. La fonction de
représentant de l'État doit être renforcée. Elle
englobe désormais la coordination des interventions des diverses
administrations lorsqu'elles ont une incidence sur la conception ou
l'exécution de la politique étrangère d'un Etat, afin
d'assurer leur cohérence. Cette mission est d'autant plus importante que
les acteurs sont toujours plus nombreux sur la scène internationale.
Tous les ministères se sont dotés de services internationaux.
L'ambassadeur continue d'être l'intermédiaire obligatoire entre
deux gouvernements, le sien et celui après duquel il est
accrédité. Cette mission de représentation des
ambassadeurs peut se trouver affaiblie par le développement des contacts
directs entre dirigeants et experts. Il est plus que jamais indispensable que
les ambassades se tournent vers des interlocuteurs plus divers et
représentent l'Etat non seulement auprès des instances
dirigeantes du pays considéré, mais aussi auprès des
responsables de la formation de l'opinion : organismes professionnels,
universités, entreprises, associations. La représentation d'un
pays signifie également la promotion de son image dans les
médias, qui apparaît aujourd'hui aussi indispensable que l'analyse
des informations et la préparation des décisions. L'explosion des
relations internationales tant bilatérales que multilatérales
élargit considérablement la mission de représentation de
nos ambassades et de nos consulats. Ils ne sont plus seulement les
représentants de l'État ; ils deviennent une administration
au service de la nation et de toutes ses composantes. Les entreprises à
la recherche de marchés, les collectivités territoriales
engagées dans une action extérieure.
La fonction de négociation est
coeur de la mission traditionnelle de l'ambassadeur. La vie internationale
actuelle étant marquée par une forte augmentation du nombre des
négociations, ainsi que par la diversification des domaines
abordés. Une part grandissante de l'activité diplomatique est
consacrée à cette tâche, qu'il s'agisse de participer aux
discussions sur les affaires stratégiques ou technologiques, à
des conférences réunies dans le cadre multilatéral. Si
l'activité de négociation s'accroît, la négociation
directe échappe de plus en plus aux représentations
bilatérales. Un nombre croissant de sujets est débattu dans des
enceintes internationales, qu'elles soient mondiales ou régionales.
Depuis le Congrès de Vienne en 1815, la négociation
multilatérale est devenue un métier à part entière,
laissé aux mains de professionnels. Les pourparlers ne sont plus le
monopole des souverains ou même des seuls ambassadeurs. Des nuées
de fonctionnaires veulent désormais contrôler que les
intérêts de leur État sont bien respectés.
L'accroissement du nombre des négociations portant sur des
matières techniques conduit à une modification de la nature de
l'activité diplomatique : elles portent sur l'économie, les
finances, l'environnement, la santé, l'action humanitaire, la lutte
contre le trafic de drogue ou le blanchiment d'argent sale. Ces sujets
requièrent des compétences spécialisées et,
souvent, des acteurs non étatiques. Nombre de ces négociations
aboutissent aujourd'hui à des résultats qui influent sur la vie
quotidienne des individus et des entreprises. Elles font plus que régir
les relations entre États ; elles ont une traduction pratique
immédiate. Cette évolution requiert une vigilance accrue.
La troisième grande mission classique des ambassadeurs
en particulier et du réseau diplomatique en général est
une mission d'information. Elle sera d'autant mieux exercée que
l'ambassadeur dispose d'un réseau étendu et varié. Les
progrès des communications, la multiplication des sources d'information,
l'instantanéité de la diffusion des événements
pourraient la rendre obsolète. Traditionnellement, la correspondance
diplomatique, des télégrammes alimentent encore de
manière continue le circuit diplomatique et contribuent de façon
décisive à la définition même de la politique
étrangère. Le réseau doit aider à la
préparation des décisions en fournissant l'analyse politique
qu'il est seul à même d'offrir. Il a donc avantage à
diversifier ses propres sources d'information, en faisant appel aux hommes
d'affaires, aux coopérants, aux expatriés, en participant
à des colloques internationaux ou en maintenant des contacts avec les
universités et les centres de recherche. Une grande partie du travail
diplomatique consiste à observer les réactions de l'opinion dans
certains événements. L'information politique doit être
recherchée dans des milieux variés. Il est plus aisé de
rendre compte de l'ensemble des réalités d'un pays quand le
cercle des contacts est élargi vers tous ceux qui, à des titres
divers, influent ou influeront sur la politique étrangère et sont
des analystes plus libres dans leurs propos que les interlocuteurs officiels.
Il serait également utile de les recevoir plus largement, en organisant
pour eux des programmes de visites.
Il est traditionnellement de la
mission des représentations diplomatiques de se préoccuper des
droits et des intérêts de leurs nationaux. À l'origine,
cette mission s'est principalement entendue de la protection des
intérêts en matière de commerce et de navigation, visant
à instaurer plus de liberté dans ces domaines. Elle s'est
progressivement élargie à la recherche du respect
général des droits des ressortissants de l'État
représenté. Le diplomate joue un rôle non
négligeable de protection des ressortissants, installés ou de
passage dans le pays d'accueil.
Dans la même perspective, S.E Tomasz
ORLOWSKI, Ambassadeur de Pologne à Paris, s'est appesanti sur
son propre témoignage en qualité de Chef de
Poste. Pour lui, les missions du Chef de Poste telles
qu'énumérées plus haut n'ont pas changé depuis le
XVIIème siècle mais reconnait tout au moins que les pratiques ont
connu des mutations profondes. A cet effet, il a estimé qu'un Chef de
Poste doit défendre l'image de marque de son pays, se veut discret et
conduit ses missions avec prudence. Etant en poste à Paris depuis sept
(07) ans, ce qui l'a marqué dans ce poste est que, la France, bien
qu'étant un Etat laïc, attribue le titre de doyen du corps
diplomatique au Nonce Apostolique, tel que cela se pratique dans les pays de
tradition chrétienne. Aussi, a-t-il indiqué les activités
diplomatiques auxquelles il accorde une importance particulière :
la remise des décorations qui donne plus de facilités, de
plaisir, de reconnaissance, de rapprochements et de contacts ;les discours
publics dans lesquels il saisit l'occasion de vendre l'image de son pays ;
les visites d'Etats auxquels la France présente souvent tout ce qu'elle
peut offrir de mieux au Chef de l'Etat invité. Enfin, il a
évoqué les innovations introduites par le Ministère des
Affaires Etrangères de Pologne et auxquelles son ambassade s'est
appropriée, à savoir ; les NTIC, le perfectionnement des
cadres et le centre de crise basée à Varsovie et qui fonctionne
24h/24h avec son poste.
Les règles du protocole diplomatique: outils et
enjeux. Monsieur Frédéric BILLET, Chef
Adjoint du Protocole du MAEDI nous a entretenus sur les règles du
protocole diplomatique. Il nous a fait savoir que sans le protocole toutes les
réceptions officielles, toutes les occasions de rencontre entre
personnalités politiques, culturelles, économiques seraient
l'occasion de joutes incessantes. Le protocole donne donc le cadre et trace les
limites d'une organisation verticale des positions de pouvoir. L'organisation
des visites (Etat, officielle, travail ou privée), des voyages à
l'étranger, des cérémonies officielles, des
conférences et sommets internationaux constituent l'essentiel du travail
protocolaire, qui participe à la projection de l'influence et de l'image
d'un pays. Plus la cérémonie ou la visite se situe à un
niveau élevé, plus la préparation est délicate et
importante. La cadre protocolaire d'une visite d'un Chef d'Etat, par exemple,
nécessite une préparation minutieuse. Le service du protocole
prend contact avec l'ambassade de son pays concerné par la visite et
cette dernière, en collaboration avec les autorités du pays
d'accueil, élabore le programme. Un mois avant, une mission
préparatoire, conduite par le chef de protocole et composée de
tous les services concernés par le voyage (protocole, presse,
sécurité, transmissions, médical, intendance, aide de
camps), est effectuée in situ, afin de dessiner les grands axes
de la visite. C'est avec le protocole local que l'Ambassade s'occupe des
aspects matériels de la visite (hébergement, transport,
sécurité, liste des personnalités présentes, les
membres de la délégation qui participent aux entretiens,
échanges de décorations, tenues, modalités
d'échanges de cadeaux, etc.). Fort de ce qui précède, le
diplomate doit se montrer vigilant pour éviter tout faux pas concernant
le déroulement de la cérémonie. Les gestes, attitudes,
faux pas, propos déplacés, dispositions des hôtes, diners,
tout cela doit passer au scanner pour une cérémonie
réussie la mission du protocole est généralement
considérée comme du sacerdoce. Elle exige en tout cas, de
l'ensemble des personnes qui y sont affectées, des qualités
toutes particulières. Il faut reconnaître que l'activité en
elle-même est singulière au sein de la fonction publique d'Etat.
La particularité de la fonction protocolaire engendre une
singularité des services qui en assument la charge. Celle-ci se traduit
de quatre manières : l'unicité organique, le caractère
interministériel marqué, la capacité de couper en tant que
de besoin la chaîne hiérarchique, le caractère typique de
la position du chef du Protocole au sein de la haute fonction publique. Le
cérémonial et le protocole sont marqués par des
éléments à caractère universel mais aussi, en assez
grande part, par des traditions et des facteurs culturels nationaux. Le
protocole est d'abord politique dans ce qu'il a de négociable. En effet,
contrairement à ce que l'on pourrait penser a priori, le niveau de
traitement protocolaire d'une personnalité, d'une visite, se
négocie. A partir d'une base rétablie par le Protocole du pays
d'accueil selon ses usages et ses normes en la matière, le premier
niveau de la négociation est constitué par la qualification de la
visite (d'Etat, officielle, de travail, privée) ; le second se joue sur
l'ordonnancement cérémoniel interne du type de visite pour lequel
on s'est mis d'accord. Le résultat de cette négociation est
évidemment politique.
Le protocole est également politique parce qu'il
nécessite de la part de ses acteurs une compréhension de la
portée de l'événement traité : ce que l'on pourrait
considérer comme la compréhension du moment politique et le
discernement nécessaire à celle-ci. L'agent du Protocole doit
s'intéresser aux relations internationales, à la politique
étrangère de son pays et en suivre l'évolution pas
à pas. Cette culture constamment à jour lui permettra de saisir
avec toute la finesse souhaitable, la finalité et l'importance de
l'événement au déroulement harmonieux duquel il a la
charge de veiller. Cela peut influer sur le placement de certaines
personnalités, sur l'espace et le temps donnés à la
presse, et sur beaucoup d'autres choses. Les règles afférentes
aux préséances doivent être observées avec rigueur
et avec discernement, car elles tiennent au positionnement des
personnalités et des corps ou institutions qu'elles représentent
lors des cérémonies, repas et réceptions publiques. Il
faut aujourd'hui veiller avec d'autant plus de soin à cet ordonnancement
que nous sommes dans ce que l'on pourrait appeler, comme certains sociologues,
une « société de l'image ». Photographes de presse et
de télévision sont systématiquement sur les lieux, et
cela confère d'autant plus d'importance au positionnement physique des
personnalités que prévoit et organise le protocole. C'est un
signe, objectif : quand ces personnalités ont à jouer des coudes
pour défendre leur place protocolaire lors d'une cérémonie
publique, cela signifie que ceux qui ont la responsabilité du protocole
en cette occasion ne remplissent pas convenablement et efficacement leur
mission. Lors d'une réunion ou conférence à laquelle
participe une haute personnalité et a fortiori le chef de
l'Etat, on ne pénétrera pas dans la salle après
l'arrivée de celle-ci. Il s'agirait là d'une inconvenance. Le
principe est en la matière de respecter scrupuleusement les indications
portées sur l'invitation. Il convient de donner une réponse
à toute invitation qui appelle à « RSVP »
(Répondre, s'il vous plaît), à moins qu'après un
premier échange téléphonique le carton ait
été envoyé « PM » (Pour mémoire),ou
précise « Regrets seulement, » ce qui signifie que l'on ne
répond qu'en cas d'impossibilité d'assister à
l'événement auquel on a été convié. Cette
réponse doit intervenir le plus rapidement possible après
réception du carton. Elle permet en effet aux organisateurs de prendre
les dispositions pratiques pertinentes. S'agissant des différentes
catégories de repas, la terminologie n'est pas due au hasard et
revêt un sens protocolaire précis. La dénomination «
dîner d'Etat » s'applique exclusivement au dîner qui est
donné par le président de la République, chef de l'Etat,
en l'honneur de la visite d'Etat d'un souverain ou président
étranger. Sera qualifié de « repas officiel », celui
où ne figureront que des femmes et des hommes présents en raison
de leurs fonctions ou titres, sans leurs conjoints. Une exception est faite
pour les déjeuners et les dîners auxquels, outre les officiels
présents, prennent place les épouses et époux des chefs de
mission diplomatique. Ceux-ci participant en effet à la fonction de
représentation de leur conjoint chef de mission, les deux époux
sont associés dans la même dignité. Il n'y a donc dans ce
cas, de toute façon, que des officiels à table. On parle aussi,
communément, de « repas de travail. ». A l'opposé, sera
dénommé « repas intime », quel que soit le nombre des
invités, le déjeuner ou le dîner auxquels les conjoints
autres que ceux des chefs de mission diplomatique, sont présents. C'est
donc un repas de couples, les conjoints étant invités
indépendamment de toute considération portée à leur
fonction. On pourra alors se trouver dans un repas intime comportant plusieurs
dizaines d'invité dans une intimité toute relative.
Pour le cas spécifique du Souverain pontife, c'est la
préfecture de la Maison pontificale qui gère l'ensemble des
mouvements d'audience ainsi que l'organisation et le déroulement de
l'audience publique. Il est d'usage que les catholiques fassent une
génuflexion devant le pape et baisent son anneau en signe de respect et
de soumission, tout comme ils baisent l'anneau cardinalice. Mais c'est le genou
gauche que l'on plie en ce cas et non le genou droit, réservé au
Saint Sacrement, c'est-à-dire le crucifix, et plus spécialement
celui qui domine l'autel dans chaque église. Cet usage ne s'applique pas
nécessairement aux chefs d'Etat qui ont le loisir de s'adresser au chef
de l'Eglise catholique, chef de l'Etat du Vatican, comme à un
égal, encore que ce soit avec une déférence
particulière. Il est d'usage que les reines des pays catholiques soient
en blanc en présence du pape, signe de distinction et d'honneur. La
reine d'Espagne porte toujours en cette circonstance une mantille. Nombre
d'épouses de chefs d'Etat adoptent également cette pratique.
Toutes les autres dames reçues en audience et n'ayant pas le rang de
souveraine doivent être en noir. Quand il reçoit un chef d'Etat de
pays catholique ou chrétien, le pape porte la mozetta rouge
avec l'étole. Pour recevoir les autres chefs d'Etat, il porte uniquement
la mozetta (mozette ou camail en français), une courte
pèlerine à petite capuche qui ne recouvre que le buste.
Monsieur Jean PANCRACIO, Professeur à
l'Université de Poitiers, a exposé sur le
thème : « Le Protocole d'Etat : entre
pérennité et modernité ». Sommet de
l'art protocolaire, la visite d'Etat consiste à recevoir avec la plus
grande solennité le premier personnage d'un pays que l'on veut honorer
particulièrement. En France, les visites d'Etat sont marquées par
un somptueux dîner à l'Elysée. Généralement,
elles se préparent 3 ou 4 mois à l'avance et donnent
souvent lieu à des négociations serrées, chaque hôte
de la France désirant recevoir des marques d'estime exceptionnelles. Du
fait de leur rareté, cinq à six par an, et de leur
caractère éminemment symbolique, elles mobilisent un dispositif
lourd tout au cours de leur déroulement, qui suit un programme
fixe : accueil au pavillon d'honneur de l'aéroport d'Orly (parfois,
mais cela est moins prisé, à Roissy), trajet en
hélicoptère jusqu'à l'esplanade des Invalides,
hébergement à la résidence de Marigny, entretien avec le
Président français à l'Elysée, dîner d'Etat
au palais présidentiel, réception à l'hôtel de ville
de Paris.
La tradition, qui est souvent respectée, est que quand
un chef d'Etat étranger atterrisse un ministre français
l'accueille à l'échelle de coupée de l'avion,
accompagné d'une délégation comprenant les deux
ambassadeurs des pays intéressés, le gouverneur militaire de
Paris, le chef du Protocole et le préfet du Val-de-Marne. Par la suite,
le Chef du Protocole, monte à bord de l'appareil en compagnie de
l'ambassadeur étranger, invite l'hôte de la France à
descendre. Les honneurs lui sont alors rendus par un détachement
interarmes, disposé en équerre. Le chef d'Etat
invité se rend devant le drapeau et écoute les hymnes nationaux,
d'abord l'hymne de son pays, puis la Marseillaise. Après avoir
passé les troupes en revue, il rejoint le pavillon d'honneur
pavoisé où lui sont présentées les
délégations officielles. Cela dure environ 15 minutes. Lors de
visites exceptionnelles, ou lorsque la France veut honorer au plus haut point
un visiteur, le Président de la République n'hésite pas
à venir l'accueillir lui-même au pavillon d'honneur.
Le trajet ne s'effectue en hélicoptère qu'avec
l'accord du visiteur. Le cortège aéroporté est
composé de 3 appareils. Il est strictement réservé aux
visites d'Etat. L'escorte qui l'accompagne jusqu'à l'hôtel de
Marigny où est hébergé l'hôte de la France compte 28
motocyclistes de la garde républicaine. L'escorte à cheval,
encore de rigueur sous François Mitterrand, a été
supprimée en son temps par Jacques Chirac. Pour une visite officielle un
chef d'Etat invité est accompagné de 5 motards de la
préfecture de police et de 3 motards pour les déplacements
privés.
Le dîner d'Etat a lieu au soir de son arrivée
à l'Elysée, suivant un faste impressionnant qui en fait un
événement mémorable. Pour un dîner d'Etat la garde
républicaine rend les honneurs. La musique joue des aubades dans la cour
de l'Elysée. Les invités prennent l'apéritif en
attendant les 08 coups fatidiques de 20 heures qui annoncent
l'arrivée du Président et de son hôte. Traditionnellement
les quarante invités les plus importants, comme les ministres et les
personnalités étrangères, prennent place dans
un salon séparé. Les présentations aux deux couples
présidentiels se font au salon selon un ordre précis :
d'abord les invités étrangers, puis les officiels français
par ordre protocolaire, enfin les personnalités privées. Peu
à peu, les invités sont introduits dans la salle à manger
où l'orchestre de la garde républicaine joue des morceaux de
musique de chambre en attendant les Présidents. Le dîner d'Etat
réunit un maximum de 216 invités, soit la capacité de la
table en forme de la lettre « U » de la salle des
fêtes de l'Elysée, qui admet en son extrémité et
dans les premières places latérales 22 couverts sans
vis-à-vis. Le Président préside avec le souverain ou le
chef d'Etat invité à sa droite, l'épouse de ce dernier
étant à sa gauche, l'épouse de président
français à la droite du visiteur.
La matinée suivante, le chef d'Etat invité, se
rend, en compagnie d'un membre du gouvernement qui est venu le chercher
à sa résidence, sur la tombe du Soldat Inconnu à l'Arc de
Triomphe. Le cortège officiel emprunte l'avenue des Champs
Elysées, pavoisée aux couleurs des deux pays. Après la
cérémonie, le cortège se rend à l'Hôtel de
Ville où le maire de Paris reçoit le chef d'Etat invité en
compagnie de personnalités et de membres de la communauté
concernée. Ensuite le cortège se rend à l'hôtel
Matignon pour un entretien, suivi d'un déjeuner, avec le Premier
Ministre français. L'après-midi est consacrée à
une réception à l'Assemblée Nationale ou au Sénat,
parfois suivie d'un dîner. L'honneur de s'adresser aux
députés ou aux sénateurs dans leur hémicycle n'est
accordé qu'avec parcimonie et est réservé aux
personnalités internationales de tout premier plan.
Le troisième jour, est organisé un
déplacement en Province. La ville d'accueil est choisie en fonction de
l'histoire des nations ou des intérêts économiques.
Accompagné d'un Ministre français, le visiteur se rend sur un
site industriel ou économique, déjeune à la
préfecture, puis part directement après que les honneurs
militaires lui auront été rendus par une garnison
implantée dans la région. Moins prestigieuse que la visite
d'Etat, la visite officielle peut concerner un chef d'Etat mais aussi un Chef
de gouvernement. Elle est un peu moins solennelle et le
cérémonial moins élevé.
Par ailleurs, les Nouvelles Technologies de
l'Information et de la Communication (NTIC) impactent
considérablement sur les méthodes de travail du diplomate. A ce
sujet, Monsieur Nicolas CHAPUIS, Diplomate, Directeur des
Systèmes d'Information du MAEDI, a indiqué que, effectivement, le
développement des relations diplomatiques aujourd'hui passe par les NTIC
et les réseaux sociaux. Il nous a également entretenus sur les
exercices pratiques de rédaction de télégrammes
diplomatiques.
Ce dernier nous a édifiés sur le fait que le
terme « diplomatie » apparaît dans le langage courant, à
la fin du XVIIIe siècle, pour désigner une mission au service de
l'État. La particularité de la production diplomatique
réside dans l'élaboration d'un discours à finalité
politique, mais un discours qui n'est pas public et ne doit être ni
partagé ni divulgué. Porté par des initiés, il
prend sa valeur dans le rapport exclusif avec le décideur ultime. Avec
la propagation des technologies de l'information et de la communication, ce
rapport exclusif a volé en éclats et l'exposant l'a
illustré à travers l'affaire WikiLeaks qui est
survenue en 2010. La diplomatie numérique est devenue à la mode.
Il s'agit là de la continuation de la diplomatie traditionnelle par
d'autres moyens. Le numérique accélère et s'implique
à la diffusion et la gestion des informations, longtemps aux mains des
seuls Etats, à l'ensemble des acteurs sociaux. Cette révolution
de l'information s'explique par la spectaculaire diminution des couts de
transmission des données et la possibilité offerte à
chacun, dans un cadre individuel ou collectif, de publier son propre contenu en
temps réel.
Nous avons appris que cette gouvernance sur internet participe
non seulement à la communication mais aussi à la diplomatie de
l'influence. A cet effet, que ce soient des Etats, des experts (think tanks,
ONG, lobbyistes), des acteurs de la société civile ou des
organisations terroristes, tous sont présents sur internet pour
influencer. Leur but est de faire passer des valeurs et des
messages. Cependant, une part de cette influence n'est pas quantifiable,
car on ne sait pas aujourd'hui plus qu'hier ce qui se passe dans le secret des
Chancelleries. Le concept de transparence qui est né de cette
utilisation du numérique n'est qu'un nouveau vocable dans la
rhétorique de la diplomatie, via lequel on peut prétendre que la
diplomatie ne se fait plus à huit clos. Il n'y a donc pas de disparition
du secret d'Etat avec l'utilisation du web social mais plutôt un
déplacement du secret, car Il y a des étapes de la
négociation dans lesquelles on a besoin du secret et le travail des
diplomates est toujours de faire en sorte qu'on passe des phases de guerre
à des phases de paix.
Il nous a été présenté le cas
spécifique de la France, où la diplomatie numérique est
l'une des priorités du Ministère des Affaires Etrangères
et du Développement International (MAEDI). Ce dernier fait sien les
innovations et les usages induits par les technologies de l'information et de
la communication (TIC) et de nombreuses initiatives ont été
prises en la matière. Cette diplomatie numérique française
recouvre des domaines très divers, à savoir : les enjeux
internationaux du numérique, la diplomatie d'influence, la gestion de
l'information et des connaissances, les questions de service public. Ainsi,
près de 265 postes diplomatiques et consulaires français
disposent d'un site internet qui leur permet de communiquer dans une
quinzaine de langues. Ces postes sont également près d'une
centaine sur les réseaux sociaux. Ils utilisent principalement Web,
Twitter et Facebook et, savent s'adapter aux usages et aux plateformes les plus
utilisées dans le pays d'accueil.
Au demeurant, il a résumé son propos en disant
que les Etats ont compris l'image et l'influence qui découlent de
l'utilisation du web 2.0, à savoir twitter et facebook qui sont
aujourdh'hui utilisés dans les chancelleries, sans pour autant remettre
en cause le secret des échanges diplomatiques.
Après nous avoir entretenus sur les
opportunités du web pour la diplomatie, Mesdames Anne
CHOUNET-CAMBAS et Noémie PINTA, toutes
Diplomates, respectivement Adjointe au Sous-directeur de la Communication
(Responsable Pole web) et Animatrice des réseaux sociaux du MAEDI, ont
conduit des exercices pratiques sur la diplomatie, la situation de crise et la
communication web.
Selon elles, la stratégie de diplomatie d'influence
numérique du Quai d'Orsay inclut le réseau
diplomatique dans ses principaux axes de
développement pour ce qui concerne les outils et services
(soutien éditorial, maquette type pour le site de l'ambassade
ou du consulat, solution d'hébergement, assistance
téléphonique et en ligne) et leur communication sur le site web
institutionnel et sur les réseaux sociaux. Aussi, convient-il de citer
le programme de formation au web social pour tous les diplomates partant
en poste à l'étranger mis en place par le MAEDI.
Il en est de même, s'agissant du domaine de la gestion
de crise qui est aujourd'hui primordial pour le MAEDI. Le numérique
permet ainsi d'obtenir des informations de veille stratégique,
essentielles notamment à la création et au fonctionnement
quotidien de la cellule de crise.
Le compte Twitter est le premier compte ministériel
français. Le site de micro-blogging, dont le principe consiste à
diffuser des tweets limités à 140
caractères est essentiellement utilisé pour diffuser
l'actualité, de l'information grand public, ainsi que des informations
pratiques, notamment les actualités destinées aux
expatriés ou les conseils aux voyageurs. Twitter est également un
outil de communication très précieux en temps de crise.
Facebook quant à lui permet au MAEDI de centraliser sa
présence et celle du réseau diplomatique sur le web social. On
peut ainsi y retrouver le compte Twitter et la chaîne Youtube du
ministère, ainsi qu'un annuaire des postes diplomatiques et consulaires.
Espace d'échange avec les internautes, la page Facebook permet de mettre
en avant des informations pratiques mais aussi les actions souvent
méconnues du ministère, notamment dans ses aspects de
coopération. Le MAEDI s'adresse également aux internautes
anglophones sur une page Facebook en anglais.
S'agissant de Youtube et Dailymotion, ce sont des sites de
partage qui permettent une diffusion plus large des vidéos du
ministère.
Pour ce qui concerne Flickr, c'est un site de partage de
photographies qui permet de valoriser le fonds d'images du ministère.
Classées en albums thématiques, ces photos illustrent la
réalité de l'action diplomatique sur le terrain.
Google+ est l'application de réseau social de Google.
La page Google+ permet au ministère d'échanger avec les
internautes présents sur cette plateforme. Une version anglaise de la
page Google+ a aussi été ouverte.
Storify permet au ministère de rassembler divers
contenus, issus essentiellement des réseaux sociaux, en une seule
"histoire" qui peut ensuite être partagée sur d'autres sites.
Enfin, Linkedin est un réseau social professionnel qui
permet au MAEDI de présenter sa politique de ressources humaines et ses
métiers. Il est aussi utilisé pour identifier des profils aux
compétences spécialisées pour certaines de ses missions
non permanentes.
Par ailleurs, à l'heure où le nombre de
mobinautes français est en constante progression, le MAEDI veille
à proposer systématiquement des services spécialement
conçus pour une consultation depuis des terminaux mobiles via les
smartphones et tablettes.
Monsieur Justin VAISSE, universitaire,
Directeur du Centre d'Analyse, de Prospective et de Stratégie (CAPS)
nous a édifiés sur l'analyse et la prospective comme
instruments de travail du diplomate. Il ressort de son exposé
que, depuis la fin de la seconde guerre mondiale la plupart des pays
industrialisés et bon nombre Etats du Tiers Monde se sont dotés
de structures administratives destinées à réfléchir
aux problèmes à moyen et à long termes relevant du secteur
des relations internationales. L'origine de ce phénomène existe
presque toujours et les analystes ont la conviction que la bureaucratie est
inapte à saisir les transformations du système international et
que, entre impossibilité de prédire l'avenir avec
précision et la gestion au jour le jour des affaires diplomatique, il y
a une place pour la réflexion prospective et l'analyse des mutations
irréversibles du système international actuel.
Le diplomate doit effectuer, en collaboration avec tous les
acteurs (universitaires, chercheurs, journalistes spécialisés)
ayant une parfaite connaissance sur le fonctionnement du système
international, des études prévisionnelles sur l'évolution
à moyen et à long termes du contexte international. Il devra
analyser certains problèmes internationaux d'actualité dans tous
leurs aspects (diplomatique, économique, militaire) puis évaluer
les différentes options entre lesquelles le décideur pourra faire
son choix, car la décision politique implique toujours implicitement un
jugement sur l'avenir et même sur le passé. L'analyse et la
prospective se veulent avant tout un instrument de travail efficace du
diplomate. Ce dernier doit également prendre conscience que
l'efficacité nécessite sa bonne information, son
intégration dans les circuits de décision et sa participation aux
réunions importantes.
Nul ne se fait illusions sur les possibilités d'une
planification rigoureuse en politique étrangère. Celle-ci
supposerait que le planificateur qu'est le diplomate, puisse prévoir
avec certitude l'évolution du système international.
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