B- Les sanctions
L'Afrique a connu, dans la décennie 2000-2010, une
recrudescence particulière d'actes de déstabilisations politiques
qui sont la conséquence de la résurgence des coups d'Etat. A
titre d'illustrations, nous pouvons noter les coups d'Etat en
Guinée-Bissau (septembre 2003) et à Sao-Tomé- et-Principe
(juillet 2003), les tentatives de coup d'Etat au Burkina Faso et en Mauritanie
(octobre 2003), le renversement de M. Charles Taylor par une rébellion
au Liberia (août 2003), les remous politiques au Sénégal en
2003, la déstabilisation de la Côte d'Ivoire
38 M. Abdou Diouf a fait à ce propos la
déclaration suivante : "Nous devons, à présent, refuser
avec fermeté toutes les manoeuvres qui ne sont pas conformes à la
constitution et aux principes de la démocratie et de l'Etat de droit, et
exiger le strict respect des droits et des libertés".
39 Voir l'article 65 de la constitution togolaise
qui dispose : « En cas de vacance de la présidence de la
République par décès, démission ou
empêchement définitif, la fonction présidentielle est
exercée provisoirement par le Président de l'Assemblée
nationale. La vacance est constatée par la Cour Constitutionnelle saisie
par le Gouvernement. Le gouvernement convoque le corps électoral dans
les soixante (60) jours de l'ouverture de la vacance pour l'élection
d'un nouveau président de la République. ».
40 Responsable de la Rencontre Africaine de la
Défense des Droits de l'Homme (RADDHO), institution dont le siège
est à Dakar (Sénégal).
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(depuis septembre 2002)...Tout cela ajouté à la
situation récente au Mali montre que l'Afrique de l'ouest semble
s'être durablement installée dans la crise politique même si
certains pays parmi lesquels le Cap-Vert et le Ghana y échappent.
Ainsi, en cas de persistance de violations ou de prolongement
de la rupture de l'ordre constitutionnel, des sanctions allant jusqu'à
la suspension peuvent être prononcées à l'encontre des
Etats malgré l'attitude contraire de la France de sanctionner les reculs
de la démocratie. Les propos de l'ancien président
français M. Jacques Chirac au cours de la conférence de presse
finale ayant sanctionné le sommet d'Hanoi en 1997 sont édifiants.
Il a affirmé que « la sanction n'est pas dans la tradition de
l'espace francophone. C'est du ressort des Nations Unies. La France n'est pas
disposée à ce que la Francophonie soit le support à
quelque sanction que ce soit. Nous voulons convaincre, pas contraindre
».
Dans le passé, l'OIF a déjà marqué
sa désapprobation par rapport à certains régimes
antidémocratiques, mais d'une manière moins visible que la prise
de sanction ou le boycottage économique. En 1991, à l'initiative
du Canada, le sommet qui devait se dérouler à Kinshasa, au
Zaïre, avait été déplacé en France. Cependant,
cette mesure a semblé avoir donné le ton en matière de
sanctions. Quelques exemples peuvent être donnés.
La résolution adoptée à Paris le 26
août 2007 suspend la Mauritanie, avec la possibilité de
réexaminer sa décision lors de la prochaine session du Conseil,
à la lumière des avancées que le gouvernement aura su
faire quant au retour à la légalité constitutionnelle et
à la situation des droits et libertés individuels.
Aussi, le CPF a-t-il sanctionné les coups d'Etat
survenus en Côte d'Ivoire le 19 septembre 2002, au Niger en
février 2010 et la prise du pouvoir par des moyens non constitutionnels
au Togo à la suite du décès du président
Gnassingbé Eyadéma le 05 février 2005 évoqué
ci-dessus.
Il faut signaler que les sanctions sont de nature diverse et
généralement varient suivant la gravité de la faute et du
non respect de la Déclaration qui régule l'organisation. Les
décisions vont de la suspension provisoire à la suspension
définitive. Cette suspension consiste pour l'organisation de refuser
qu'un Etat sous le coup d'une telle mesure, participe aux activités de
l'organisation comme ce fut le cas notamment de la Mauritanie41.
41 Pour la Mauritanie, c'est une suspension totale
de toutes formes d'activités parce que le Coup d'Etat est
avéré. C'était un régime démocratiquement
élu qui était en place jusqu'à son renversement par les
militaires. Pour la Guinée-Conakry, il n'y a pas eu de renversement de
pouvoir à proprement parler car il y a eu décès du
président au pouvoir comme ce fut le cas au Togo. Les militaires se sont
accaparés du pouvoir de manière illégale. La
Guinée-Bissau pour sa part, fut suspendue à titre provisoire car
ceux qui dirigeaient cet Etat là
notamment la junte militaire, se sont engagés à
faire une transition politique rapide, après avoir mis les
mécanismes de démocratie en route.
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Les sanctions à l'endroit des Etats membres qui ne
respectent pas les textes en usant des voies anticonstitutionnelles pour
arriver au pouvoir peuvent aller jusqu'à l'exclusion. C'est la sanction
extrême que l'OIF n'a pas encore mis en exécution jusqu'à
présent. L'apport de l'OIF dans le processus de renforcement et de
promotion de la démocratie exige de sa part des actions d'appui à
la consolidation en cette matière.
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