Section II : Les difficultés
extrinsèques
Les difficultés dont il est question ici sont
dépendantes des Etats membres. Le degré d'implication du à
la multiplicité des missions de l'OIF est de plus en plus
récusé. Cette dernière en plus est davantage
contestée par ses membres (Paragraphe I) d'où la perte de
séduction de l'OIF (Paragraphe II).
Paragraphe I : La contestation de l'implication de
l'OIF
L'appréciation de la contestation de l'OIF par les
Etats membres se fera à travers le prisme du regard porté sur
elle par ces derniers qui trouvent que leur souveraineté semble
être menacée d'où leur résistance (A). En outre, ils
refusent l'idée d'une nouvelle colonisation (B).
A- La résistance du souverainisme
La démocratisation des Etats d'Afrique fait intervenir
plusieurs acteurs extra étatiques comme l'OIF. Ceux-ci à travers
leur implication posent de nombreuses actions dont la mise en oeuvre est
confrontée à la résistance des Etats membres.
La contestation de l'intervention de l'OIF se justifie par le
fait que les Etats membres n'adhèrent pas à certaines de ses
actions. En effet, ils ne sont pas disposés à recevoir des
injonctions en matière démocratique et de surcroît venant
de l'extérieur. Dès lors, le constat est qu'il existe une
inadéquation entre le principe de souveraineté et les processus
de démocratisation dont il est question.
La confrontation des définitions des professeurs Jean
Combacau et Serges Sur selon lesquelles « dans l'ordre international au
contraire, affirmer qu'il est souverain (l'Etat) signifie qu'on ne trouve au
dessus aucune autorité dotée à son égard d'une
puissance légale : la souveraineté internationale se
définit négativement comme la non soumission à une
autorité supérieure, le fait de n'être le sujet (au sens
d'assujetti) d'aucun sujet (au sens de personne juridique) »94
et de M. Boutros Boutros Ghali pour qui « la démocratisation est
un
94 Voir Jean Combacau et Serges Sur, DIP, 4è
éd., 1999, Paris, p.227.
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processus conduisant à une société plus
ouverte et participative, et moins autoritaire »95,
révèle qu'en théorie souveraineté et
démocratisation sont compatibles. Ceci traduit la libre
détermination des Etats dans le choix ou non du régime
démocratique. Cependant dans la réalité des faits, il
existe une incompatibilité96.
Les Etats dénoncent alors cette implication surtout
s'agissant de la sanction des Etats qui n'observeraient pas les obligations
internationales en matière des droits de l'homme et de l'Etat de droit.
Les Etats en effet considèrent ces actions comme une ingérence
dans leurs affaires internes, ce qui est contraire à l'article 2 de la
Charte des Nations Unies aux termes duquel « l'Organisation est
fondée sur le principe de l'égalité souveraine de tous ses
membres ».
Au plan des élections, il existe également des
critiques. Elles sont relatives notamment à l'observation internationale
des élections et aux rapports des commissions accréditées
dont les conclusions ont pour conséquence la reconnaissance ou non de la
légitimité des élus et des gouvernements mis en place par
les institutions étatiques en principe autonomes. Ainsi, à
travers les dons qui sont faits en matière d'assistance
électorale, les Etats sont contraints de respecter certaines conditions
préalables même si pour certains, l'observation internationale des
élections à la suite des accords de paix consécutifs
à des conflits armés ou à des crises politiques, est
compatible avec la souveraineté étatique puisqu'étant
expressément prévue ou consacrée, voire
consentie97.
Et lorsque l'OIF se retrouve en pareille situation, il est
clair qu'elle subtilise anormalement une prérogative fondamentale
appartenant aux Etats. Cette analyse est confortée par les propos de
Jiang Zemin qui pense qu'« aucun pays n'a le droit d'imposer aux autres
son système social et son idéologie et encore moins, de les
accuser à tort et à travers pour ce qui est de leurs affaires
internes »98.
A côté de la résistance du principe de
souveraineté, nous ne devons pas ignorer le fait que les Etats
réfutent le modèle démocratique. Dans la
Déclaration de Bamako notamment en son chapitre 3, l'OIF en faisant de
la démocratie le meilleur système de gouvernement entre en
95 Cf. le document de M. Boutros Boutros Ghali,
A/51/761, 20 décembre 1996.
96 Voir notamment, Kpadé A. Agossou, «
Implication de l'Organisation des Nations Unies dans la démocratisation
de l'Afrique Subsaharienne », Mémoire pour l'obtention du
diplôme de l'ENA, Cycle III, 2010, p.51.
97 Cf Itsouhou Mbadinga, « Brèves
remarques sur l'assistance électorale internationale des Etats africains
» (sept.-déc.1998) Rev. Jur. Pol. Ind. Coop. 309, pp. 309-326.
98 Se rapporter à l'allocution de M. Jiang
Zemin, ancien président de la République populaire de Chine,
à la cérémonie d'ouverture du forum sur la
coopération sino-africaine à Béijing, le 10 oct. 2000.
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contradiction avec les dispositions de sa Charte pour ce qui
est de la souveraineté. Pour preuve, on peut relever l'exemple de
l'alinéa 2 de l'article 1er99 .
D'une façon globale, la résistance du
souverainisme ainsi que le rejet du modèle démocratique
considéré comme le meilleur système de gouvernement
constituent les entraves aux actions de l'OIF dans le processus de
démocratisation de l'Afrique en général et en Afrique de
l'ouest en particulier. Ces entraves ont également pour origine, le
refus des Etats de subir une nouvelle fois la colonisation.
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