Paragraphe II : La relative efficacité des actions
de l'OIF
L'OIF, dans l'accomplissement de ses missions, est
amenée à poser des actions sur le terrain dans ses Etats membres.
Ces actions font intervenir le Secrétaire Général en tant
que porte-parole de l'organisation. Il dispose en la matière des
compétences définies par la Charte.
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Seulement certaines de ses actions ou prises de position sont
jugées inconstantes (A). Aussi, le statut du Secrétaire
Général parait fragile (B).
A-L'inconstance des prises de position
L'OIF prend des mesures et des positions souvent à la
suite des coups d'Etat, des violations des droits de l'homme et des
révisions anticonstitutionnelles non consensuelles ainsi qu'en situation
de conflits armés. Ces actes se traduisent par des déclarations,
des condamnations et sanctions des régimes ne respectant pas les
principes démocratiques par eux souscrits. On ne peut ignorer les appels
à l'apaisement.
D'abord, pour ce qui est de la définition des concepts,
il semble opportun de s'interroger sur la conception francophone des notions de
« démocratie », de « culture démocratique
intériorisée», de « droits de l'homme » et
d'« Etat de droit » dans ses diverses déclarations. Un constat
s'impose : chacune de ces notions fait l'objet d'interprétation de
façon très variable selon les auteurs. Ceci est d'autant plus
vrai qu'il est permis aux négociateurs d'utiliser dans les grandes
conférences ces concepts, chacun avec la signification que lui accorde
chaque partie, selon que cela l'arrange dans le seul but d'aboutir à la
conclusion des conventions auxquelles elle est censée adhérer
sans réserve. En même temps, l'on peut regretter qu'une
institution qui fait l'éloge du français comme d'une langue qui
puise sa supériorité au plan diplomatique, dans sa
précision, ne montre pas plus de rigueur terminologique dans ses
documents les plus solennels.
Ensuite, il n'est point nécessaire de rappeler, car ce
n'est un secret pour personne, que l'OIF aujourd'hui connait une
évolution quant à ses missions. Le processus de leur
accomplissement fait observer que derrière cette évolution, se
cachent en réalité des « perceptions et
représentations plus difficiles à harmoniser et des tensions
résultant d'un risque de fonctionnement à deux vitesses à
apaiser » comme le disent si bien Martin et Michel-Louis dans l'ouvrage
« La francophonie, objet de la théorie des relations
internationales : brèves remarques de synthèse ».
S'agissant des sanctions, certains membres souhaitent que
l'OIF ne s'aventure pas trop hors de son domaine d'action traditionnel afin
d'éviter que l'intervention de l'institution ne constitue une source de
divisions comme l'a relevé l'ancien président Jacques Chirac pour
qui la sanction « n'est pas la tradition de l'espace francophone [...]
cela relève de l'ONU ». Il faut noter que les mécanismes
francophones reposent, avant tout, sur l'accompagnement des
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Etats pour approfondir et pour consolider leur
expérience démocratique, plutôt que sur la
dénonciation des violations.
Dès lors, comment assurer l'effectivité d'un
droit francophone respectueux de valeurs et de principes démocratiques
si au sein même de la communauté des Etats membres de l'OIF, parmi
lesquels la France, des voix s'élèvent pour refuser d'en
sanctionner les violations? Les professeurs André Cabanis et Albert
Lourde, s'étaient attachés à relever ces distorsions par
rapport aux missions de l'OIF au cours d'un colloque organisé à
l'Université Jean-Moulin de Lyon92.
Dans l'ensemble, l'intervention de l'OIF semble être en
fonction des intérêts des Etats membres qui sont prêts
à faire l'impasse ou à fermer les yeux sur certains conflits de
l'espace francophone.
Il convient également de noter que sur la question de
l'engagement démocratique, le constat est celui d'une timidité de
l'action, l'absence d'un dessein réel car pour l'instant le verbe ne
fait que se substituer à l'action.
Une autre cause, non des moindres qui peut expliquer le manque
d'efficacité des actions de l'OIF, trouverait sa source dans la
fragilité du statut du Secrétaire Général.
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