Section II : L'implication des acteurs
non-étatiques
Dans une perspective d'accompagnement des Etats en vue du
renforcement de la démocratie, plusieurs acteurs et non des moindres
prennent une part active dans le processus. Parmi eux, on peut noter les
organisations internationales (Paragraphe I) à côté
desquelles se tiennent surtout la société civile (Paragraphe
II).
Paragraphe I : L'implication des organisations
internationales
L'examen de cette implication nous amène à
distinguer les organisations internationales (OI) suivant leur nature et
domaine d'intervention. Ainsi, nous avons des OI à vocation politique
(A) et celles à vocation économique (B).
A- Le rôle des organisations internationales
à vocation politique
Il s'agit dans cette partie de mettre en exergue
essentiellement le rôle de l'Organisation des Nations Unies (ONU) et de
ses institutions spécialisées, de l'Union Africaine (UA) et dans
une mesure de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest
(CEDEAO)68 dans le processus démocratique de l'Afrique de
l'ouest dans l'exécution duquel l'OIF intervient.
Au plan universel, L'OIF entretient des relations avec
l'Organisation des Nations Unies (ONU). En effet, le troisième
paragraphe du préambule de la Déclaration de Saint-Boniface
souligne le contexte actuel de l'interdépendance entre tous les Etats et
la nécessité de prendre en charge les différents dangers
qui menacent l'ensemble des Etats du monde par une approche
multilatérale, globale, concertée et complémentaire. La
Déclaration de Saint-Boniface inscrit l'action de l'OIF dans le cadre de
la coopération internationale, et s'engage à soutenir les
initiatives et les efforts de l'ONU en matière de gestion des crises.
Ce soutien de l'ONU concerne en particulier la
responsabilité de protéger, dont l'OIF a adopté le
principe depuis son sommet de Ouagadougou tenu en 2004. La Déclaration
de Saint-Boniface prend acte « avec satisfaction » de la
reconnaissance, par tous les Etats membres de l'ONU réunis à New
York lors du Sommet du millénaire en 2005, « du principe
68 La CEDEAO de plus en plus intervient dans le
domaine politique.
xlviii
de la responsabilité de protéger les populations
contre le génocide, les crimes de guerre, l'épuration ethnique et
les crimes contre l'humanité »69. L'OIF rappelle
également que cette obligation incombe à chaque Etat, et
subsidiairement à la communauté internationale au cas où
l'Etat concerné se montre défaillant, en soulignant notamment
« la responsabilité de la communauté internationale de
réagir d'une façon opportune et décisive, et en
conformité avec la légalité internationale... ».
Si l'OIF peut agir dans le domaine de la responsabilité
de prévenir, premier pilier de la responsabilité de
protéger, elle s'en remet à l'ONU pour la réaction, en
particulier au Conseil de sécurité (article 3)70
suscitant alors des interrogations quant à ses capacités
réelles de prévenir les crises. Malgré tout, il convient
de saluer l'approche multilatérale dans la recherche de la paix.
A la différence de l'ONU ou d'autres organisations
régionales comme l'Organisation de l'Atlantique Nord (OTAN), la
Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO),
l'Union Africaine (UA)..., l'OIF ne dispose pas de moyens logistiques pour
organiser dans son propre périmètre une réaction
adéquate. Bien évidemment, il ne s'agit pas seulement d'une
question de moyens, mais aussi d'une option politique. Ainsi,
conformément à l' article 1871 l'option pour la
prévention et, en cas de besoin, un soutien plus ou moins actif aux
opérations de maintien de la paix telles que le Programme de
Renforcement des Capacités Africaines de Maintien de la Paix (RECAMP),
le Programme de Renforcement des Opérations de Soutien de la Paix dans
le Monde (POSPM) et le Programme d'Aide à l'Instruction Militaire du
Canada (PAIM) peuvent également avoir un effet préventif en
empêchant que les conflits ne surgissent de nouveau.
En se spécialisant dans le domaine de la
prévention, l'OIF est bien consciente des limites de la seule
prévention si les autres dimensions dans la préservation de la
paix ne sont pas assurées de manière efficace « en temps
voulu » et avec les moyens adéquats. On sait qu'au sein même
de l'ONU, les appels à une réaction rapide lancés par le
Secrétaire Général, une
69 Cf. le paragraphe 10 du Préambule de la
Déclaration de Saint-Boniface,
70 Consulter l'article 3 Déclaration de
Saint-Boniface « Soulignons la responsabilité de la
communauté internationale de réagir d'une façon opportune
et décisive, et en conformité avec la légalité
internationale, les principes de la Charte des Nations Unies et les
prérogatives dévolues au Conseil de sécurité pour
protéger les civils contre le génocide, les crimes de guerre,
l'épuration ethnique et les crimes contre l'humanité, au cas
où les moyens pacifiques s'avéreraient insuffisants et où
il serait manifeste que les autorités nationales ne protègent pas
leurs populations contre de tels actes».
71Voir l'article 18 de la Déclaration de
Saint-Boniface
xlix
fois qu'a été atteint un seuil critique dans
l'imminence d'un conflit, n'ont été suivis d'effet. C'est ce que
relève le Rapport fait par Monsieur Lakhdar Brahimi72: «
A moins de changements institutionnels importants, d'un appui financier plus
solide et d'un engagement renouvelé de la part de ses membres, l'ONU
n'aura pas les moyens, dans les mois et les années qui viennent,
d'exécuter les tâches cruciales de maintien et de consolidation de
la paix que les États membres lui confient ».
Lors du sommet de Montreux (Suisse), les Etats membres de
l'OIF ont appelé au renforcement de la coordination des initiatives
prises pour accroître leur contribution aux opérations de paix.
Dans cette optique, elle a entrepris des efforts pour consolider la paix dans
les pays en sortie de crise en apportant une assistance technique en vue du
renforcement de la participation francophone aux opérations de paix par
l'entremise de l'unité de la Police Francophone
(FRANCOPOL)73.
L'OIF a également accompagné l'ONU dans les
efforts entrepris pour la consolidation de la paix. Dans ce sens, elle a
apporté son appui à la réforme des systèmes de
sécurité à travers plusieurs actions. En effet, elle a
dépêché en mars 2011 en Guinée-Conakry, un expert
dans le domaine de la police et capable d'apporter à la mission
d'évaluation du secteur de sécurité menée
conjointement avec l'Union Africaine, la CEDEAO, l'ONU et l'UE.
De même, elle a collaboré avec le Haut
Commissariat aux Droits de l'Homme des Nations Unies (HCDH) pour dispenser des
formations en droits de l'homme à l'intention des forces de
défense et de sécurité guinéennes. Elle a, en
outre, participé au séminaire consacré à la
politique cadre sur la réforme des systèmes de
sécurité (RSS) en cours d'adoption par l'UA.74 Dans le
cadre de ses actions en faveur de l'appui aux processus de consolidation de la
paix, l'OIF s'est particulièrement mobilisée au Tchad, en
Guinée-Conakry et en République Centrafricaine (RCA) à
l'exemple des formations Guinée et RCA de la Commission de Consolidation
de la Paix des Nations Unies (CCP) dont la Francophonie est membre. Nous
72 A ce sujet voir le rapport fait par M. Lakhdar
Brahimi, ancien Ministre algérien des affaires étrangères
et Président du Groupe d'étude sur les opérations de paix
des Nations Unies, New-York, 17 août 2000, paragraphe 1er.
73 Précisons qu'elle a entre autres soutenu
l'organisation de séminaires portant sur le matériel à
l'usage des contingents des Nations Unies. Aussi grâce aux
activités de plaidoyer menées par l'OIF, un nombre important de
documents relatifs aux opérations de maintien de la paix a
été traduit en français par le Département des
Opérations de Maintien de la Paix des Nations Unies (DOMP). Un autre
séminaire portant sur les négociations relatives au Traité
sur le Commerce des Armes (TCA) a été organisé à
New York en lien avec l'Institut des Nations Unies pour la Recherche sur le
Désarmement (UNIDIR).
74 L'OIF est devenue aussi membre observateur des
conseils de fondation du Centre pour le contrôle démocratique des
forces armées (DCAF) rejoignant ainsi les principaux acteurs
internationaux oeuvrant en faveur de la RSS puis membre du comité de
pilotage du Réseau africain pour le secteur de sécurité
(RASS).
l
pouvons citer entre autres l'élaboration d'un cours en
ligne sur la gestion de la sécurité publique en contexte
électoral en lien avec l'Institut des Nations Unies pour la formation et
la Recherche (UNITAR).
La coopération entre l'OIF et les organisations
internationales en matière de consolidation de la paix et de la
promotion de la démocratie, loin de se limiter aux organisations
internationales à vocation politique, s'étend également
à celles dont le rôle premier est la promotion du
développement à travers celui de l'économie.
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