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La contribution de l'organisation internationale de la francophonie (OIF) à  la consolidation de la démocratie en Afrique de l'ouest.

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par Kofi Nagno M'BEOU
Ecole nationale d'administration - Diplôme de 'ENA, option Cycle III Diplomatie 2013
  

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DEDICACE

Nous dédions ce mémoire à nos parents Patrice M'BEOU et Véronique OGNAMIDIKOU pour nous avoir permis d'accomplir d'inestimables réalisations sur cette terre.

REMERCIEMENTS

Au terme de ce travail, nous exprimons nos sincères remerciements à :

- Monsieur Kossi Mawuli AGOKLA qui a accepté de tout coeur la direction de ce travail malgré ses multiples occupations professionnelles;

AVERTISSEMENT

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- Messieurs les membres du jury pour leurs remarques bienveillantes et utiles ;

Nos remerciements vont également à:

- Mademoiselle Nadège Hezouwè Tchilalo EKPAO pour son courage et son soutien moral;

- Monsieur Hubert Kokou Nayo M'BEOU pour son soutien multiforme ;

- Monsieur Kokou Dzifa ADJEODA ;

- Toute l'administration de l'Ecole Nationale d'Administration (ENA) ;

- Tout le personnel du Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération ;

- Tous nos professeurs pour nous avoir cédé une partie de leur connaissance et au-delà, tous ceux, parents, collègues et amis, qui, chacun à sa manière, a contribué, par l'aide et les encouragements constants, à l'élaboration de ce document.

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« L'ENA N'ENTEND DONNER AUCUNE APPROBATION NI
IMPROBATION AUX OPINIONS EMISES DANS CE MEMOIRE.
ELLES DOIVENT ETRE CONSIDEREES COMME PROPRES A LEUR
AUTEUR »

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Introduction

Dès leur accession à l'indépendance, les Etats se sont trouvés dotés de la souveraineté1, un attribut qui leur permet de s'affirmer sur le plan international et d'agir d'égal à égal2 avec leurs homologues de la communauté internationale. La souveraineté implique l`exercice plein et entier des prérogatives reconnues aux Etats, notamment la libre détermination de leur statut politique. La Cour Internationale de Justice pour sa part, dans son arrêt du 27 juin 1986 dans l'Affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua, a reconnu une valeur coutumière au principe de non-ingérence et donc l'exclusivité dans l'exercice de la souveraineté3. Dans l'exercice de cette souveraineté, certains Etats ont opté pour le régime politique démocratique4 dont les principes fondamentaux sont malheureusement, pour la plupart, bafoués, ce qui amène les observateurs à parler de déficit démocratique.

Ce déficit démocratique, qui est à la base de nombreuses crises politiques en Afrique, a eu pour conséquence la mise au ban des accusés, par la communauté internationale, de bon nombre de pays. Les séries de coups d'Etat, formes décriées d'accessions antidémocratiques au pouvoir, ont malheureusement jalonné l'histoire de nombreux pays africains, majoritairement francophones5. La communauté internationale, qui était au départ permissive sur la gestion politique des Etats, a fait désormais de la démocratie une condition de la reconnaissance internationale de gouvernement, comme le témoigne le discours de la Baule dont la substance peut être ainsi résumée : « la France liera tout son effort de contribution aux efforts qui seront accomplis pour aller vers plus de liberté »6. Ce discours venait d'annoncer le début du processus de démocratisation de l'Afrique.

En effet, si les années 1960 ont été considérées comme celles des indépendances et des régimes de partis uniques caractérisés par une gestion peu démocratique des affaires de l'Etat,

1 Caractère suprême du pouvoir politique, la souveraineté a fait son apparition avec le concept d'Etat avec Jean Bodin en 1615 avant d'être systématisée par le traité de Westphalie de 1648.

2 Cf. paragraphe 1er de l'article 2 de la Charte des Nations Unies.

3Voir Cour Internationale de Justice, Affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. /USA, fond, Arrêt du 27 juin 1986), Rec., 1986, p. 133, § 263.

4 Le régime politique en droit constitutionnel peut être défini comme un mode de gouvernement d'un Etat. Il résulte de la combinaison de multiples éléments notamment juridiques (cadre constitutionnel, qui forme le régime politique au sens étroit de l'expression) et extra-juridiques (système de partis, personnalisation du pouvoir, idéologie...) Cf. le Lexique des termes juridiques, Dalloz, 13è Ed. 2001, p. 473.

5 Au nombre de ces pays, figurent le Togo, le Burkina-Faso, le Mali, le Niger...

6 Cf. Extrait de l'allocution prononcée le 20 juin 1990 par M. François Mitterrand, alors président de la République française, à l'occasion de la séance solennelle d'ouverture de la 16ème Conférence des Chefs d'Etat de France et d'Afrique à la Baule.

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les années 1990 au contraire ont rimé avec la démocratie, le multipartisme et une série de conférences nationales7 devant servir de cadres transitionnels des Etats vers la démocratie. Cette période, quoique tardive, selon Hubert Védrine, et qui a été témoin de l'accouchement heureux des constitutions africaines néo-libérales, cadres de consécration des principes démocratiques et des droits et libertés publiques, constitue désormais une réalité.8

Plusieurs institutions ont joué et continuent de jouer un important rôle dans ce processus9. C'est justement dans cette optique que nous avons choisi de réfléchir sur « la contribution de l'Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) à la consolidation de la démocratie en Afrique de l'ouest ».

En effet, l'OIF joue un rôle considérable dans la promotion et la consolidation de la démocratie en Afrique de l'ouest de sorte que la démocratie est devenue un principe majeur et intrinsèque de l'existence de cette organisation. Nous en voulons pour preuve la Déclaration de Bamako : «Francophonie et démocratie sont indissociables; il ne saurait y avoir d'approfondissement du projet francophone sans une progression constante vers la démocratie et son incarnation dans les faits; c'est pourquoi la Francophonie fait de l'engagement démocratique une priorité qui doit se traduire par des propositions et réalisations concrètes »10. Les Chefs d'Etat et de gouvernement ont réaffirmé cette vision en prenant l'engagement de « renforcer le rôle de la francophonie en faveur de la consolidation de la paix, de la démocratie et des droits de l'homme » au cours du sommet de Ouagadougou en 2004.

Cependant, parler des actions de l'OIF revient tout d'abord à la présenter. L'OIF est un regroupement d'Etats ayant en partage la langue française. L'idée d'une communauté organique francophone et de l'édification d'un Commonwealth à la française fut lancée par les Chefs d'Etat africains en juin 1966 lors du sommet de l'Organisation Commune Africaine et Malgache (OCAM) afin d'éviter le morcellement des pays africains nouvellement

7 Parmi ces conférences nationales, on peut mentionner celles tenues au Bénin ( du 19 au 28 février 1990), au Congo ( du 25 février au 10 juin 1991), au Gabon ( du 27 mars au 19 avril 1990), au Niger ( du 29 juillet au 3 novembre 1991), au Mali ( du 29 juillet au 12 aout 1991), au Togo ( du 10 juillet au 28 aout 1991), au Zaïre ( du

7 aout 1991 au 6 décembre 1992), au Tchad ( du 15 janvier au 7 avril 1993) etc.

8 Pour Hubert Védrine, le discours de la Baule est un « discours tardif mais réel », in les Mondes de François Mitterrand, 1981-1995, Fayard, Paris, 1997, p.593.

9 Il s'agit notamment de l'Organisation des Nations Unies (ONU), de l'Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), de l'Union Africaine(UA), de la CEDEAO.

10 Voir l'article 1er, chapitre 1 de la Déclaration de Bamako, 3 novembre 2000.

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indépendants et de faire contrepoids au mouvement panafricain provenant des anciennes colonies anglaises.

La première pierre institutionnelle a été posée à Niamey le 20 mars 1970 lors de la deuxième conférence constitutive intergouvernementale des Etats francophones, par la création de l'Agence de Coopération Culturelle et Technique (ACCT)11. La Convention signée à cette conférence assigne à l'ACCT de développer entre ses membres une coopération multilatérale sous forme d'une nouvelle solidarité dans les domaines de l'éducation, de la culture, des sciences et des techniques afin de devenir un « facteur supplémentaire de rapprochement des peuples par le dialogue permanent des civilisations».12

C'est depuis le milieu des années 1990 et à la faveur de la chute du mur de Berlin13 puis du renouveau du constitutionnalisme14, que la Francophonie jusque-là essentiellement consacrée à la coopération culturelle, technique et économique, a commencé à prendre aussi une dimension politique.

Dans ce contexte et afin de donner à l'OIF sa pleine dimension politique, les Chefs d'Etat et de gouvernement ont décidé en 1995 au sommet de Cotonou (Bénin) de se doter d'un premier Secrétariat Général, clé de voûte du système institutionnel francophone. Ce qui fut concrétisé à Hanoi (Vietnam) en 1997 par l'élection de son premier Secrétaire Général15. Il lui a été assigné plusieurs objectifs à atteindre, dont l'instauration de la démocratie.

La démocratie en question, au centre de notre étude, fait l'objet de définitions variées. Elle peut s'entendre d'un régime dans lequel tous les citoyens disposent à l'égard du pouvoir d'un droit de participation (vote) et d'un droit de contestation (liberté d'opposition)16. Bref, tous les citoyens sont libres d'exercer et de jouir des droits et libertés à eux reconnus dans le

11 L'ACCT a été créée sous l'impulsion de trois Chefs d'Etat africains à savoir Léopold Sédar Senghor du Sénégal, Habib Bourguiba de la Tunisie, Hamani Diori du Niger ainsi que du Prince Norodom Sihanouk du Cambodge.

12 Cf. Léopold Sédar Senghor, Discours de réception à l'Académie des sciences d'outre-mer, 2 octobre 1981.

13 La chute est intervenue le 9 Novembre 1989.

14 Le constitutionnalisme est une théorie du droit qui considère que le pouvoir souverain et les droits fondamentaux doivent être garantis par une constitution écrite. Il est fondé sur la suprématie accordée à la constitution dans la hiérarchie interne des normes juridiques et la loi en particulier. Une autre perception du constitutionnalisme le définit comme un courant politique qui voit en la constitution écrite le meilleur garant des libertés individuelles ; sur cet aspect, voir C. Debbasch et Y. Daudet : Lexique de Politique. Dalloz. 6ème éd. Paris. 1992. P.116.

15 M. Boutros Boutros-Ghali est élu premier Secrétaire Général et dirige l'organisation en tant que représentant légal et porte-parole de l'OIF. Il est remplacé par M. Abdou Diouf, ancien président sénégalais depuis 2006.

16 Voir le Lexique des termes juridiques, 13è Ed, P.193. Parmi les grands théoriciens, on peut citer l'ancien Président américain Abraham Lincoln (1809-1865) pour qui la démocratie est le « Gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple».

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respect des lois qui les garantissent17. Ceci est en conformité avec l'article 16 de la Déclaration des Droits de l'Homme et des Citoyens (DDHC) adoptée le 26 août 178918 dont la substance indique que « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de constitution ».

La démocratie implique le respect des droits de l'homme sans lesquels on ne peut parler d'Etat de droit19. Cela signifie que tout le monde y compris les gouvernants doivent être soumis au respect du droit considéré par Del Vecchio comme « la colonne vertébrale du corps social »20. Aussi, les Etats doivent observer les règles de droit international. La souveraineté, tout en excluant la soumission de l'Etat à l'ordre juridique d'un autre Etat, ne serait pas incompatible avec celle relative à l'ordre juridique international produit par leur action commune d'où la réflexion suivante: « l'autolimitation de l'Etat est le mécanisme qui concilie souveraineté et obéissance».21

L'Afrique de l'ouest, cadre de notre étude, est un espace géographique composé de seize Etats. Cet espace est couvert par la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO)22. Nous allons limiter cette étude comme l'indique le thème, aux Etats d'Afrique de l'ouest. Cependant, dans un souci d'illustration de certaines actions menées par la Francophonie, nous pourrions être amenés à citer l'exemple de d'autres Etats de l'espace francophone.

De ce qui précède, une question mérite d'être posée. Quel est le rôle de l'OIF dans la démocratisation de l'Afrique de l'ouest? Autrement, comment l'OIF oeuvre-t-elle pour la promotion et la consolidation de la démocratie en Afrique de l'ouest? A-t-elle su bien jouer ce

17 Au nombre de ces actes, figurent les constitutions, la Charte africaine de la démocratie et des élections adoptée à Addis-Abeba (Ethiopie) le 30 janvier 2007 ; le Protocole de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance ; la loi N° 2011-010 du 16/05/2011 fixant les conditions d'exercice de la liberté de réunion et de manifestation pacifiques publiques au Togo in Journal Officiel de la République Togolaise (JORT) du 27 juin 2011. EDITOGO. Lomé. P. 21.

18 Voir Dominique Rousseau et Alexandre Viala, Droit Constitutionnel, Montchrestien, EJA, Paris, 2004, p.46.

19 Un Etat de droit est un Etat dans lequel tous les citoyens sont soumis à la règle de droit y compris les gouvernants et où les droits et les libertés individuels et collectifs sont garantis puis respectés non seulement dans l'ordre des buts mais aussi dans celui des moyens. Suivant l'article 2 de la Déclaration de Bamako, cela implique la soumission de l'ensemble des institutions à la loi, la séparation des pouvoirs, le libre exercice des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ainsi que l'égalité devant la loi des citoyens, femmes et hommes.

20 Cf Del Vecchio cité par Eric Oliva, Aide-mémoire Droit constitutionnel, Philosophie du droit, 1953, réimp. Dalloz, Paris, 2004, p.279.

21 Voir Jean Combacau, Droit International Public, Montchrestien, 4è Ed. Paris, 1987.

22 Depuis 2000, la Mauritanie pour des raisons de convenance, s'est retirée de la CEDEAO, ce qui réduit l'organisation à quinze Etats membres.

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rôle? Sinon quelles adaptations faut-il apporter pour une OIF plus dynamique dans le domaine de la démocratie?

Il est à noter que l'OIF a énormément contribué au processus démocratique en Afrique de l'ouest23. Cependant, la persistance des coups d'Etat, des violations graves des droits de l'homme et des révisions anticonstitutionnelles des textes fondamentaux, constituent des signes de fébrilité de cette démocratie naissante. L'OIF se trouve donc confrontée à nombre de difficultés de divers ordres qui noient du coup les efforts consentis par celle-ci en dépit des avancées enregistrées comme le souligne en termes non équivoques la Déclaration de Bamako24.

On peut supposer que ces difficultés ont, en partie, amené les Chefs d'Etat et de gouvernement à penser à une OIF plus modernisée et efficiente. Ainsi M. Abdou Diouf, Secrétaire Général de cette organisation a rappelé ce souhait des Chefs d'Etat lors de la séance inaugurale de la Conférence ministérielle de l'OIF, réunie à Antananarivo (Madagascar) les 22 et 23 novembre 2005 en ces termes :« Préparer l'avenir, renforcer la Francophonie, la rendre plus dynamique, plus cohérente et plus visible, voilà ce que nos Chefs d'Etat et de gouvernement nous avaient demandé à Ouagadougou [etc.] et nous ont donné en particulier le mandat de mieux fonder juridiquement l'OIF et de mieux définir le cadre d'exercice des attributions du Secrétaire Général ». Il paraît donc judicieux de revoir ses modes d'intervention et ses mécanismes de gestion des crises au gré des mutations.

Cette étude est consacrée à l'évaluation des actions de l'OIF en faveur de la démocratie en Afrique de l'ouest. Il s'agit de mettre en lumière l'apport de cette organisation au processus démocratique dans cette sous-région.

Fruit d'une recherche documentaire, cette étude a pour but de faire ressortir la nature de la contribution de l'OIF en vue de la consolidation de la démocratie en Afrique de l'ouest. Elle s'articule autour de deux (2) grandes parties dont la première porte sur la contribution généreuse de l'OIF en matière de consolidation de la démocratie en Afrique de l'ouest; La deuxième permet de voir à quel point cette contribution est perfectible.

23 L'OIF a permis la tenue de plusieurs séminaires de formation, de renforcement des capacités des membres des diverses institutions. Elle a offert également son expertise en matière de prévention et de gestion des conflits sans oublier l'assistance dont bénéficient les Etats surtout en matière électorale.

24 Il s'agit en l'occurrence du chapitre 1er de la Déclaration de Bamako.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault