a. Analyse iconique visuelle
Au niveau iconique, l'analyse va nous plonger au coeur des
intentions de l'énonciateur, évaluer ce qu'il affirme en fonction
d'un jugement posé en rapport avec le monde réel. Un jugement
à double versant, qui s'exerce par la reconnaissance des signes
mimétiques-objets, individu, lieux, actions-disposés dans le
texte télévisuel, et d'autre part par l'identification des choix
réalisés au tournage, ici les effets sont davantage
travaillés, recherchés parce qu'ils dépendent directement
de l'énonciateur d'origine, ce n'est pas comme dans d'autres niveaux
d'analyse où les niveaux indiciels à la construction
s'avèrent accidentels, mais ici ils résultent d'un choix
d'énonciation bien précis.37
Nous tenons à signaler que très souvent ou du
moins la plupart du temps lorsque l'on parle d'une analyse iconique et
même sémiologiquement parlant, on a tendance à ne nous
limiter qu'à une analyse visuelle uniquement, mais avec Muriel Hanot
nous allons tenter d'aller encore plus loin, c'est-à-dire nous allons
appliquer l'analyse iconique à l'élément sonore et
démontrer que cette analyse peut être utilisée au son, mais
pour le moment nous allons continuer avec le visuel.
A ce niveau on appelle le spectateur ou le
téléspectateur à faire un jugement sur les
éléments transmis par le tournage en fonction des connaissances
dont il dispose sur le monde réel. Autrement dit ce niveau lui permet de
se placer à l'intersection des codes perceptifs, des codes
anthropologique et visuel.
Mais il peut arriver qu'un individu reconnait un lieu ou une
autre chose, non pas par une vraie reconnaissance, par exemple que cette
personne a déjà fréquentée ce lieux ou cet endroit,
mais par la connaissance individuelle que possède cette personne, et
là une question mérite d'être
37 Hanot Muriel, Télévision
réalité ou réalisme ?, introduction à l'analyse
sémio-pragmatique des discours télévisuels,
éditions de Boeck Université, Belgique, 2002, page 58.
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posée. Que se produit-il lorsque reconnaissance et
connaissance ne trouvent pas d'encrage commun ? Pour répondre à
cette question nous allons recourir à Baggaley et Duck, cités par
Muriel Hanot :
`'Lorsqu'un individu reçoit une information qui lui est
déjà familière, il y réagit en fonction de ses
motivations propres et de ses connaissances. Dans le cas contraire, l'individu
est obligé d'utiliser des critères externes plus fragiles pour
évaluer le monde qui l'entoure, et, en conséquence, toute une
gamme des signes tout à fait superficiels peut déterminer des
jugements de valeurs, non seulement en ce qui concerne l'intérêt
propre de l'information mais aussi en ce qui concerne son degré de
crédibilité. Comme le soulignent Hovland et Weiss (1952), les
variables qui concourent à la crédibilité viennent des
observations et des attentes liées à la source immédiate
de l'information est transmise par le canal de la télévision on
peut en fait classer les variables importantes en deux grandes
catégories selon la distinction suivante :
1. les signes comportementaux fonctionnant dans les
situations d'interactions sociales normales se trouvent
altérés dans les mises en situation télévisuelles,
ce qui conduit le téléspectateur à des distorsions dans
l'interprétation des événements, des gens et des opinions
médiatisées.
2. Sachant que le degré d'intérêt et de
crédibilité accordé à un stimulus est
influencé par le contexte simultané ou successif qui l'entoure,
on peut en déduire que les techniques de médiatisations de
l'information peuvent produire toute une variété d'effets
spécifiques38.»
Il est évident que la plupart d'auteurs lorsqu'ils
appliquent une analyse iconique à un film, ils ont tendance à ne
s'accrocher qu'à la vision ou au visuel, parce que la plupart du temps
ils ne parlent que de la reconnaissance des individus, des lieux, des monuments
ou les différents plans du cinéma, etc. C'est le cas aussi
d'André Gardies cité encore par
38 Baggaley,J. et Duck,S. « les facteurs de
crédibilité dans le message télévisuel »,
communication, t.XXXIII : apprendre des médias, 1981, pp. 144-145.
Cité par Muriel Hanot, dans télévision
réalité ou réalisme, p61
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Muriel Hanot, qui dit : " Le descriptif s'articule donc sur la
question plus générale de la représentation et
particulièrement ici sur la fonction référentielle.
Comment suis-je amené à considérer ces divers plans comme
faisant référence à New York ? Nombre d'entre eux
pourraient avoir été filmés dans une autre grande
cité nord-américaine (les rues encombrées d'ordures ou des
travaux de voirie, quelques plans de foule, etc.), pourtant, je les
reçois comme ayant été prélevés sur l'espace
new-yorkais »39.
Si l'on considérait l'exemple qu'André Gardies
nous a donné ci-haut, nous nous rendons compte que c'est à partir
de quelques plans ayant valeur de cadrage référentiel qu'une
personne est capable de reconnaitre certains éléments dans une
image. Nous pouvons prendre l'exemple de la présence à l'image de
deux immeubles de la GECAMINES au niveau du carrefour, du boulevard M'siri, de
la place de la poste, les mausolées de Mzee Laurent Kabila ou de Moise
Tshombe, ces éléments feront appel à notre
encyclopédie personnelle et prendront une valeur de
vérité, à ce moment il suffira que les données
fournies par les autres vues soient compatibles avec ce que nous connaissons de
la ville de Lubumbashi pour que nous puissions les accepter comme
prélevées sur cette ville. C'est que le descriptif visuel
travaille sur et avec le visible, dans sa plénitude.
Nous venons de parler de deux auteurs qui nous ont
été présentés par Muriel Hanot, et nous voyons
clairement que leur tendance est de réduire l'analyse iconique à
la vision, mais Muriel H. va plus loin toujours dans le même ouvrage
parce qu'elle va appliquer l'analyse iconique au son ou aux
éléments sonores.
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