4.2.1.1.De la neutralité de l'armée et du
gouvernement de transition
A ce niveau, deux tendances s'affrontent avec une
légère différence que le déroulement des
élections. La première est celle des enquêtés qui
attestent la neutralité de l'armée et du gouvernement durant le
processus électoral. Ils représentent 60 % de la taille de
l'échantillon et sont majoritairement des partisans du RPG, le parti
gagnant de l'élection et issus du groupe socioculturel malinké.
La position de ces enquêtés s'explique non seulement par leur
appartenance au parti gagnant mais aussi par leur lien socioculturel avec le
président de la transition qui dirigeait aussi l'armée en tant
commandant en chef des forces armées et ministre de la défense
nationale. La seconde tendance est celle des interviewés qui remettent
en cause la neutralité de l'armée et du gouvernement (40 % des
personnes interrogées). Pour eux, l'armée et le gouvernement ont
été partial en soutenant le candidat du RPG au second tour de
l'élection présidentielle. Ils estiment que si l'armée et
le gouvernement étaient restés neutres, leur candidat aurait sans
doute été victorieux au second tour. Cette tendance s'explique
par l'appartenance de ses tenants au parti du candidat perdant. Cette affection
partisane s'accompagne aussi du lien socioculturel existant entre ces
enquêtés et le candidat perdant. Ces affections partisanes,
ponctuées par une logique de lien socioculturel, ont engendré des
violences électorales, violences sur lesquelles les
enquêtés ont des opinions divergentes.
4.2.1.2.Des violences électorales
Tous les interviewés ont regretté ces violences
même si leurs opinions sont divergentes quant à la
responsabilité de ces violences. Les tendances majeures qui s'affrontent
ici sont celle des interviewés qui accusent les leaders politiques et
celle des interviewés qui trouvent que ces violences étaient
normales. Pour les premiers (52 % de l'échantillon), ils accusent les
leaders politiques d'avoir tenu des propos divisionnistes et haineux envers
leurs
adversaires. Pour eux, si les peuls ont été
agressés à Siguiri, Kankan et Kissidougou, cela est de la
responsabilité du leader du RPG puisque ces villes étaient tenues
par ses partisans et lui-même étant originaire de la Haute
Guinée. De même, le leader de l'UFDG est tenu pour responsable
quant aux empoisonnements des militants du RPG à Conakry et à
l'agression des leurs vivants en Moyenne Guinée, sa région
naturelle d'origine. Ce qui s'explique par une logique de « fils de
terroir ». Autrement dit, les leaders politiques se sont opposés
à la victoire de leur adversaire dans leur région naturelle
d'origine et pour cela, il fallait faire la chasse aux partisans de
l'adversaire vivants chez soi. Cette logique de « fils de terroir »
avait donné un caractère communautariste au premier tour des
élections présidentielles mais aussi au second tour parce que les
candidats perdants s'étant alliés aux gagnants avaient
mobilisé leurs partisans qui, pour la plupart entretiennent des liens
socioculturels et par ricochet, des liens de terroir. La seconde tendance
majeure (24 % de l'échantillon), est celle des interviewés qui
pensent que ces violences étaient normales puisque dans tout
mécanisme de concurrence, il y a toujours des manifestations violentes.
Le sens donné au normal ici par ces enquêtés, renvoi
à la vision durkheimienne du terme. Si pour Durkheim le normal se
caractérise principalement par sa généralité et sa
régularité, pour les enquêtés, les violences
électorales sont normales parce qu'elles se produisent dans tous les
pays à vocation démocratique. Pour eux, ces violences sont les
« ingrédients » des élections
démocratiques7 en Afrique. Voici les propos d'un
enquêté :
Encadré 4: extrait
d'entretien
`'Moi je pense que c'est normal parce qu'avec deux
candidats d'ethnies majoritaires pour un seul poste, la violence était
inévitable. Quand deux hommes sont opposés pour la même
chose, il y aura la violence et c'est pareil dans tous les pays
africains»
Source :Enquêtés de terrain
2011
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