I.2 La morale dans l'Antiquité
Il convient déjà de noter que la perception de
la philosophie présocratique comme une philosophie de la nature est
assez réductionniste. En plus d'être une philosophie de la nature,
elle s'intéresse au poli notamment au bonheur de l'individu dans la
cité. Epicure est un des représentants de la philosophie
morale
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dans l'antiquité grecque. Nous connaissons
l'épicurisme qui est une école philosophique qu'il a
fondée à Athènes en 306 avant Jésus Christ. Cette
école entrait en concurrence avec une autre grande pensée de
l'époque, le Stoïcisme fondé en 301 avant Jésus
Christ. L'Epicurisme est axé sur la recherche d'un bonheur et d'une
sagesse dont le but est l'atteinte de l'ataraxie5c'est-à-dire
l'absence d'agitation, la tranquillité de l'âme et de l'esprit.
L'enseignement d'Epicure vise à rendre l'individu
heureux en lui montrant comment se hisser au plaisir absolu qui naît de
l'ataraxie. Pour lui, toute sa vie durant, l'homme est à la recherche du
plaisir, qui est lié à la satisfaction de nos divers besoins.Dans
sa lettre à Menécée, Epicure écrit : «
Nous affirmons que le plaisir est le commencement et la fin de toute vie
heureuse car nous avons reconnu ceci comme le premier bien né avec nous
et c'est par rapport à lui que nous commençons tout choix et tout
refus la racine de tout plaisir est le plaisir du ventre, même la sagesse
et la culture doivent lui être rapportées...quand la chaircrie,
l'âme crie. »6 La morale épicurienne est donc
une morale du plaisir. Selon Epicure les sensations douloureuses de l'âme
naissent dans la non satisfaction de notre besoin alors que les sensations
positives qu'il appelle plaisirs naissent de la satisfaction de ces mêmes
besoins.
L'homme selon Epicure recherche toute sa vie durant les
sensations négatives ou douloureuses. La recherche du plaisir est donc
l'axe d'orientation principale de nos conduites et attitudes. C'est la
recherche du plaisir qui oriente tous nos choix à tous les niveaux.
Ainsi les critères du bien et du mal sont ramenés à un
niveau psychosomatique c'est-à-dire au niveau de la sensation et non du
plaisir.
Dans sa pédagogie philosophique du bonheur, Epicure
trace deux voies complémentaires. L'élaboration d'abord d'un
ensemble de concepts qui constituent une cosmologie ou une physique qui permet
à l'homme de vaincre toutes les fausses craintes qui le rendent
malheureux.Ensuite l'élaboration d'une technique de
5Epicure, Lettre à
Ménécée, in Doctrines et maximes, Hermann, p.79.
6http: // philia-oneline-fr /text
/cpcr_001.php.consulté le 16 Août 2012 à
22h12.
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quête de plaisir qui paradoxalement inclut beaucoup
d'ascétisme'et de plaisir pour accéder à
l'ataraxie.L'homme doit donc savoir se débarrasser de la peur et des
craintes et rechercher le vrai bonheur. 0r l'homme vit en permanence dans la
crainte des dieux, de la mort, du chagrin et de la douleur. Pour vaincre la
crainte des dieux, Epicure dans son enseignement démontre que le monde
est fait d'atomes qui s'agrègent et se désagrègent au fil
de l'histoire. Les dieux sont faits d'atomes ainsi que chaque être
existant.Ainsi, les dieux vivent un bonheur parfait qu'ils ne
sauraientaltérer en se mêlant aux problèmes des hommes.Les
hommes de ce fait n'ont pas de compte à rendre aux divinités
lesquelles d'ailleurs n'ont rien demandé aux hommes.
De même nous ne devons pas avoir peur de la mort, caril
n'y a pas une vie de l'âme en dehors du corps.Unique au corps,
l'âme meurt en même temps que lui. Ainsi, « la mort n'est
rien pour nous, aussi longtemps que je suis là, elle nÿest point,
et dès qu'elle arrive c'est moi qui nÿsuis plus. La mort ne nous
est rien car ce qui est privé de sensation n'est rien pour nous.
»8
S'agissant de la crainte du chagrin et de la douleur, la
morale épicuriennetrouve qu'elle résulte d'une
méconnaissance du fonctionnement du monde.Le monde est le lieu
d'agrégation et de désagrégation des atomes dont la
logique et le temps échappent à l'être humain.C'est cette
méconnaissance qui apporte le chagrin où il n'y a que psychologie
des événements qui créent la crainte.
L'homme ainsi débarrassé des différentes
sources de peur et de crainte définit sa pédagogie du bonheur par
le plaisir.Mais il convient avant toute chose,de savoir ce que le plaisir n'est
pas et ensuite ce qu'il est véritablement. Car,« lorsque nous
disons que le plaisir est un bien principal,nous ne parlons pas des plaisirs de
l'homme débauché ou de ceux qui reposent dans le plaisir car ce
ne sont pas les beuveries ou les orgies continuelles qui rendront la vie
agréable »9Le véritable plaisir pour
l'épicurisme se définit
8 Epicure, Lettre à Menacée, in
Lettre, Nathan, P76-77.
9Jacques (Brunschwig), « Epicure »in
collectif, philosophie grecque, Paris, Puf, 1998, p447.
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comme une absence de douleurs et de troubles intérieurs
résultant d'une vie équilibrée.Ceci résiderait non
pas dans la satisfaction positive et quantitative des plaisirs mais dans leur
restriction.Trois catégories de plaisirs sont donc à accepter ou
fuir pour l'atteinte du bonheur de l'individu.Les plaisirs qui sont à la
fois naturels et nécessaires qu'il faut poursuivre avec
modération comme boire quand on a soif et dormir quand on a sommeil. Les
plaisirs qui sont naturels mais non nécessaires comme boire du vin quand
on a soif.Les plaisirs qui ne sont ni naturels ni nécessaires qu'ils
convient de fuir comme ceux du luxe.
La recherche du plaisir sain par l'individu après que
celui-ci ait philosophé pour se débarrasser des
différentes sources de craintes et de peur est pour l'épicurisme
la voie saine pour atteindre le bonheur.
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