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Politiques agricoles et sécurité alimentaire au Togo (1977-2008).

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par Halourou MAMAN
Université de Lomé - Master en Histoire économique et sociale 0000
  

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2.2. La libéralisation du financement agricole, du monopole de l'Etat au Système financier décentralisé (SFD)

Dans le domaine de l'appui financier agricole, deux remarques importantes s'imposent. Il s'agit d'une démission de l'Etat en matière de crédit rural et d'un faible budget agricole. En effet, depuis les années 1990, le secteur du crédit agricole togolais était en crise, après la fermeture de l'organe bancaire en charge, la CNCA. Elle a été liquidée en raison d'une accumulation d'impayés, de malversations et d'une mauvaise gestion, et il n'y avait donc plus d'établissements spécialisés dans le financement du secteur agricole et le financement du secteur a été intégralement libéralisé. Ce qui veut dire en réalité que, comme les banques commerciales n'interviennent qu'exceptionnellement au profit du secteur 187, il n'y avait pratiquement plus de crédit à moyen et long terme en dehors des lignes de crédit prévues dans le cadre de projets de développement sur financements extérieurs et de quelques ONG agissant en milieu rural, ce qui constitue une contribution très marginale. Ce fut un coup dur pour les paysans producteurs des cultures vivrières puisque les associations de producteurs de coton continuaient à bénéficier néanmoins d'un système performant de crédit de campagne pour les intrants destinés à la culture du coton. La SOTOCO délivrait à crédit, un engrais coton, les pesticides et les piles des pulvérisateurs UVB. Les semences sont cédées gratuitement. La valeur du forfait est déduite du produit payé au producteur après collecte et égrenage par la SOTOCO, et ceci sans intérêt. Tout le coton produit étant centralisé et égrené par la SOTOCO, le taux de remboursement des crédits à la SOTOCO est voisin de 100 % 188 .Le relais devrait être pris par les institutions financières rurales à caractère mutualiste (les SFD. L'objectif visé par l'Etat était de promouvoir par le biais de ces structures privées, le crédit rural et agricole au Togo. Aussi assista-t-on à un foisonnement de

187 Pour ces banques les paysans n'offrent pas de garanties nécessaires pour qu'ils bénéficient de leurs prêts.

188 FAO, 1996, Etude sur les phosphates naturels du Togo et leur exploitation dans les systèmes de culture, p. 21.

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ces structures financières privées. Parmi elles nous pouvons citer entre autres la FUCEC189, dont les activités couvrent l'ensemble du territoire togolais, la SYNORSEC 190 et la SOCODEVI191 (Maman 2011 : 123). Mais la réalité du terrain montra que la passation du témoin n'a vraisemblablement pas avantagé les agriculteurs. En effet, à en croire une étude menée par l'UEMOA en 2000, sur les 42 SFD recensés en 1997, 26 ont déclaré financer des activités agricoles. Les 16 autres essentiellement urbains, financent des activités de commerce, d'artisanat, de service, mais représentent une fraction marginale du secteur des SFD. Le montant total de crédit estimé allouer à l'agriculture par ces SFD était de l'ordre de 780 millions en 1997, soit environ 12% du volume de crédit global traité par ces 26 SFD, et environ 10% du portefeuille global de tous les SFD confondus192. La simple comparaison avec le montant estimé des besoins annuels de financement de court terme des exploitations cotonnières (10.5 milliards pour les intrants coton et vivrier) montre la faible contribution relative des SFD au financement de l'agriculture, et plus précisément à la production vivrière193. Par ailleurs, les financements octroyés à l'agriculture sont en très grande majorité de court terme (<1an). De plus, les crédits agricoles n'occupent qu'une infime partie des financements de ces SFD. Par exemple, bien que la FUCEC, soit le plus grand réseau national la part qu'elle accorde à l'agriculture est faible. En décembre 1998, le réseau regroupait 152 COOPEC, disséminées sur l'ensemble du territoire national et comptait environ 108 000 membres, mais celui-ci n'avait octroyé que 7 % seulement des ses crédits au secteur agricole 194 .Les crédits sont de court terme parce que les petits paysans n'offrent pas assez de garantie de solvabilité, tant ils sont soumis aux caprices des aléas climatiques d'une part, et d'autre part, avec la dissolution de l'OPAT, le prêteurs (les SFD), ne sont pas assurés de recouvrer leur emprunt par les producteurs de cultures de rente. Car avec l'OPAT, le recouvrement des crédits se faisait après la vente par celle-ci. Tout ceci laisse entrevoir que les paysans togolais, qu'ils soient producteurs de produits vivriers ou de rente étaient dans une réelle impasse, et éprouvaient d'énormes difficultés

189 FUCEC : Fédération des unions de coopératives d'épargne et de crédit, créée depuis 1968 est un SFD qui est le plus proche des ruraux actuellement.

190 Synergie nord/sud pour l'épargne et le crédit (SYNORSEC) est un SFD fortement orienté vers l'agriculture, mais très peu développé.

191 Société de Coopérative pour le Développement International, est une ONG travaillant essentiellement dans le genre en milieu rural.

192 UEMOA, Etude sur les financements des filières agricoles des pays de l'UEMOA, rapport par pays, Togo, janvier 2000, 64 p.

193 Notons que ces chiffres reflètent une situation « d'après libéralisation »puisqu'avant celle-ci, la contribution de la FUCEC (Faitière des unités coopératives d'épargne et de crédit) par exemple, était au moins deux fois plus importante et dépassait le milliard annuellement.

194 UEMOA, Etude sur les financements des filières agricoles des pays de l'UEMOA, rapport par pays, Togo, janvier 2000, pp. 32-48.

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pour faire face à leurs besoins basiques, car leurs activités ne leur procurant plus de revenus conséquents. De l'autre côté, l'austérité budgétaire et la libéralisation de l'économie avaient amené l'Etat à porter moins d'investissement que ne l'exigeait le secteur.

En effet, les investissements publics dans le secteur agricole ont fortement baissé depuis que le Togo s'est lancée dans le processus de désengagement. Situation rendue pire par la rupture de la coopération avec ses partenaires bilatéraux et multilatéraux. Ainsi, de plus de15 milliards (soit 12 % du budget national) dans les années 1980, ils baissèrent à 11 milliards de F CFA dans les années 1990, avant de dégringoler pour se situer autour de 3 milliards (soit 3 % du budget) en 2000 et même à moins d'un milliard en 2003195. La raison de cette chute vertigineuse paraît simple, car plus de 80 % du financement agricole togolais est assuré par les fonds extérieurs des partenaires au développement. Or, ceux-ci avaient coupé leur coopération avec le pays, aboutissant ainsi à un arrêt de financements des bailleurs de fonds importants tels que les institutions de Bretton Woods (Banque mondiale, FMI), le FIDA et la BAD ont tous cessé leur décaissement pour non apurement des arriérés de paiement depuis 2001, et surtout à cause du déficit démocratique. Conscient que l'insécurité alimentaire, est un phénomène transnational, le Togo avait à partir des années 2000 opté pour une lutte intégrée contre ce fléau.

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