3.2. La liquidation de la CNCA et l'asphyscie de
l'agriculture togolaise
La CNCA était devenue inefficace pour le
développement rural (comme nous l'avions dit un peu plus haut), surtout
à partir de 1987, suite à un grand détournement de fonds
qui l'avait paralysée presque totalement159. De plus, elle
n'accordait ses prêts qu'aux agriculteurs intégrés à
un groupement ou liés à un projet. Encore faut-il se poser la
question de savoir combien de cultivateurs togolais étaient
intégrés, ou étaient bien groupés ? La situation
est beaucoup plus grave du côté des producteurs des cultures
vivrières car certains producteurs de cultures industrielles
étaient liés à des groupements, ceci depuis
l'époque coloniale. Ainsi, cette situation a permis aux productions de
rente de garder toujours leur prépondérance grâce aux
avantages qu'ils avaient vis-à-vis des décideurs. Au fait, c'est
que leur financement venait aussi de l'extérieur qui en tire aussi grand
profit et qui n'a rien à gagner en investissant sur le maïs ou
l'igname par exemple. Cela va aboutir à la liquidation de la CNCA (en
1990) portant ainsi un coup sévère aux paysans, donc à
NSDR en ce sens qu'elle limita la capacité d'accumulation productive de
ces derniers160. Comme la réussite de toute politique
agricole dépend indubitablement du niveau de son financement, il est
clair que cette situation explique des mésaventures des tentatives de
modernisation agricoles mises en place dans le pays.
3.3. La libéralisation des échanges des
produits agricoles
La Société nationale du commerce (SONACOM),
était une Société mixte qui s'occupait de la
commercialisation de tous les produits au Togo. Mais dès 1989, elle fut
amputée du monopole de l'importation et de la distribution de tous les
produits et denrées alimentaires. La commercialisation de ces produits
fut alors libéralisée et exemptée de toutes les taxes de
monopole. Il s'agit par exemple du riz et du sucre. Après l'abolition de
ce monopole, l'Etat engagea la politique des prix aux producteurs, notamment
des productions de rente, en référence au « prix plancher
»161. Cette politique vise à assurer la croissance
économique auto-soutenue à moyen terme des agriculteurs, tout en
continuant d'améliorer la position de la balance des payements et des
finances publiques. A titre d'exemple, au cours de la campagne agricole
1986-1987, les prix aux producteurs de café et de cacao ont
été élevés : le prix du
159 Schwartz, 1989 : 99.
160 Maman, 2011 : 108-109 ; et Schwartz, 1989 : 99.
161 Hausse du prix aux producteurs, ou baisse de ce dernier
par rapport au prix plancher, en fonction des cours mondiaux et de
l'intervention de la caisse de stabilisation.
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café est passé de 365 FCFA le kg à 400 F
CFA le kg et celui du cacao de 300 FCFA à 360 FCFA, soit une hausse
respective de 9,6% et de 9,1%162.
La lecture attentive de cette politique de prix montre que
l'Etat voulait tout simplement inciter les paysans à produire plus, car
ceux-ci étaient déjà découragés par des
mesures d'austérité. Pour les cultures vivrières, la
libéralisation devait consister en la mise en place, d'un système
d'attribution de licence d'exportation, et d'une ligne de crédit pour
les groupements de paysans et les exportations en vue d'alléger les
contraintes immédiates qui se posait à eux dans la
commercialisation. Quant à TOGOGRAIN qui s'en chargeait, dès 1986
avec la NSDR, ce dernier fut restructuré, et il devait évoluer
selon un certain nombre de règles qui lui sont tracées. A cet
effet la règle de stock de TOGOGRAIN ne devrait pas dépasser 12
000 tonnes renouvelables par tiers annuel (Maman, 2011 : 110). L'objectif
visé par la politique agricole du Togo durant cette période de
déséquilibre et d'austérité budgétaire
accentuée par les troubles sociopolitiques, était bel et bien la
sécurité alimentaire.
Il paraît donc important de visiter les performances de
l'agriculture pour voir s'il était arrivé à la hauteur de
ce défi.
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