DEUXIEME PARTIE :
LA SECURITE ALIMENTAIRE DANS LE CONTEXTE DE LA
LIBERALISATION ECONOMIQUE AU TOGO DE 1985 A 2008
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Au Togo, à partir des années 1980, le contexte
de décollage économique commencé un peu plus tôt
dans les années 1970, fit rapidement place à une situation de
déséquilibre budgétaire, et d'endettement public. La
principale cause fut la mauvaise gestion des investissements publics dont la
grande partie provenait des bailleurs de fonds, le plus souvent
étrangers. Ayant constaté cela, le pays s'était vu
obligé de réduire ses dépenses, en se désengagent
du secteur de production, grâce à une libéralisation
économique. Le secteur primaire, autrefois « priorité des
priorités », va recevoir un coup d'arrêt dans sa politique.
L'Etat va passer à un stade de diminution de son intervention dans le
secteur. La plupart des structures de soutien et d'encadrement du monde rural
seront soit liquidées, ou soit cédées aux privés.
Cette politique souvent appelée Programme d'ajustement structurel (PAS),
fut imposée au Togo, comme à la plupart des pays en
développement d'alors, par les institutions de Bretton Woods,
notamment la Banque mondiale (BM) et le Fonds monétaire internationale
(FMI).L'agriculture était devenue en ce moment-là le parent
pauvre de la politique de développement du pays. Au même moment,
il fallait faire face au défi de l'insécurité alimentaire
dont l'ampleur ne cessait d'augmenter, dans un contexte de crise sociopolitique
à partir des années 1990 qui voit partir la quasi-totalité
des partenaires économiques occidentaux du pays à cause du
déficit démocratique. Dans une telle situation, ce secteur
était privé de tout appui financier, or il urge de mettre en
place des politiques agricoles convenables à cette situation et capables
de garantir une nourriture suffisante aux populations. Eu égard à
tout ce qui précède, la question se pose en ces termes : quelles
stratégies de développement agricoles pour promouvoir la
production alimentaire au Togo de 1985 à 2008 ?L'analyse de la Nouvelle
stratégie du développement rural (NSDR) au Togo de 1985 à
1996, et de la Stratégie nationale de la sécurité
alimentaire du Togo de 1996 à 2008, permettra de répondre aux
préoccupations de cette interrogation.
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CHAPITRE TROISIEME
LA NOUVELLE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT RURAL (NSDR)
FACE AU DEFI DE LA SECURITE ALIMENTAIRE AU TOGO DE 1985 A 1996
Lancée en 1977 avec pour objectif principal
l'autosuffisance alimentaire sur une période de cinq ans, la
révolution verte, faute de ne pas pouvoir atteindre son objectif,
était devenue caduque au début des années 1980, vu les
exigences du moment123. C'est alors que les pouvoirs publics
togolais conscients de la situation, avaient pris la mesure de la chose en
initiant une nouvelle politiques agricole capable de rimer avec la situation de
déséquilibre financier national, de stabilisation
économique et d'ajustement structurel. C'est de là qu'est
née la Nouvelle stratégie de développement rural (NSDR).
Celle-ci n'est en fait que le réajustement en profondeur de la
révolution verte précédente, mais avec un objectif
redéfinit et bien précisé : parvenir à la
sécurité alimentaire grâce à un développement
agricole capable de fournir aux populations rurales (souvent
vulnérables), aussi bien des denrées alimentaires que des revenus
raisonnables pouvant leur permettre de faire face à leurs besoins en cas
de déficit de la production familiale. Dans cette perspective, on peut
se poser la question de savoir quelle fut la portée de cette politique
agricole sur la sécurité alimentaire au Togo de 1985 à
1996 ? Ce chapitre se propose d'analyser les moyens institutionnels, techniques
et financiers de cette politique agricole. Il aura aussi pour tâche
d'analyser les résultats de celle-ci par rapport à
l'évolution de la situation alimentaire des populations durant sa
période d'application afin d'en saisir la portée.
1. Cadre institutionnel de la NSDR
Sous l'effet des PAS124, de profonds changements
sont intervenus dans les institutions en charge du secteur rural, aussi bien
dans leur champ normatif que dans leur principe d'intervention sur le
terrain.
123 Même si en 1980, le Plan d'action de Lagos (PAL)
avait réitéré la volonté des pays africains de
poursuivre la politique d'autosuffisance alimentaire, le rapport de la Banque
mondiale paru deux ans plus tard, leur proposa une nouvelle orientation.
Celui-ci indique que les pays africains n'ont pas besoin de produire tout ce
qu'ils consomment. Il leur suffit d'orienter leurs ressources dans les
productions dans lesquelles ils sont compétitifs et d'acquérir
à moindre coût les autres produits. Le contexte des années
1980 marquée par la priorité donnée au marché dans
la régulation de l'économie joua un rôle important dans la
naissance de la sécurité alimentaire.
124 Les Programmes d'ajustement structurel (PAS) furent
imposés aux pays africains pour assainir leurs économies
exsangues afin de les stabiliser au travers d'une politique
d'austérité budgétaire.
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1.1. Une réforme institutionnelle pour le secteur
agricole togolais
Au cours de la révolution verte, de deux
ministères étaient chargés du secteur rural. Le
ministère de l'économie rurale (MER) qui s'occupe de
l'exécution des programmes et projets agricoles, et le ministère
de l'équipement rural(MER) qui se chargeait de travaux de génie
rural, de traçage et d'entretien des pistes rurales de desserte. Mais
avec la politique d'austérité budgétaire le Togo dû
réformer ces ministères ayant en charge le secteur primaire.
Ceux-ci sont fondus en un seul connu alors sous l'appellation
du ministère du développement rural (MDR)125. En
plus des deux fonctions traditionnelles qui furent fondues en une, le
ministère devait aussi s'occuper de la production forestière. En
effet, le MDR s'occupait de la programmation et de la mise en oeuvre de toutes
les opérations de développement dans le domaine rural en
conformité avec la politique nationale définie par le
Gouvernement et selon les objectifs qu'il fixe. Ces opérations visent
les productions végétales et forestières, l'élevage
et la pêche ainsi que l'aménagement rural, l'équipement en
infrastructures, l'organisation des producteurs, la réglementation et
les interventions d'intérêt national.
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