2.2. De la SONAPH aux industries d'huilerie du Togo
Tout comme TOGOFRUIT, la Société nationale pour
le développement de la palmeraie et des huileries (SONAPH)
créée en 1968 par décret n° 68-164 du 4 septembre
1968 avait deux principaux objectifs qui épousaient ceux de la
révolution verte, et s'est rapidement transformée en un
élément clé de la politique agro-industrielle
prônée par cette dernière. En effet, la SONAPH avait pour
vocation première le développement de la palmeraie
sélectionnée au Togo, de même que la revalorisation de
celle naturelle menacée par les abattages anarchiques pour la
fabrication de la boisson locale sodabi.
Pour atteindre cet objectif elle se charge de la
sélection et de la fourniture des plants aux paysans tout en veillant
à leur mise en terre selon les normes techniques modernes
définies par les organismes spécialisés.
(Domtsè,2009 : 36).Ces mesures ainsi prises devaient se traduire sur le
terrain par une production de 39 198 tonnes de régimes de palmeraies
sélectionnées en 1980 à la fin du troisième
quinquennat, et de 75 050 tonnes à la fin du quatrième en
1985.Une production qui propulserait les usines de transformation des produits
du palmier à huile, qui constituait en fait le deuxième objectif
de la SONAPH. En effet, le second volet de ses objectifs concernait la
transformation industrielle. Pour gagner ce pari, l'Etat par le biais de la
société procéda à l'installation des unités
de transformation des matières premières de palmeraie en huile de
palme. Ainsi deux principales usines seront les chevilles ouvrières de
cette politique. Il s'agit de l'huilerie d'Alokoégbé
installée depuis la période coloniale, et dont les objectifs
furent reprécisés à partir de 1977 par des travaux
d'extension et de rénovation. La seconde usine était celle mise
en place en 1979 à Agou dont la mission principale était la
transformation des régimes de palmiers (principalement des noix
palmistes) en huile de palme102.Ainsi, à en croire les
documents officiels, l'huilerie d'Alokoégbé exploitée par
la Coopérative des producteurs de noix de palme (CPNP) de la
localité fit une progression de production encourageante de 1977
à 1980 passant de 4 970 tonnes d'huile de palme à 10 000 tonnes,
soit un taux de croissance de 101,20 % ; puisque la production a presque
doublé en
102 Ministère du plan et des mines, plan de
développement socio-économique 1976-1980, p. 224-225.
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l'espace de trois années103. Quant à
l'huilerie d'Agou dotée d'une capacité de production de 50 000
tonnes de régimes palmistes et exploitée par la Compagnie
générale du Togo, la production ne fut pas très
encourageante comme le montre le tableau 3.
Tableau n° 3: Evolution de la production d'huile de
palme et de palmistes de la SONAPH de 1979-1980 à 1985-1986 en
tonnes
Campagnes agricoles
|
Production d'huile de palme
|
Production de palmistes
|
Production totale (régimes
palmistes)
|
1979-1980
|
2319,802
|
996,909
|
3316,711
|
1980-1981
|
2751,589
|
1008,060
|
3759,649
|
1981-1982
|
3125,900
|
1047,060
|
4172,960
|
1982-1983
|
1915,153
|
724,368
|
2639,521
|
1983-1984
|
829,894
|
265,770
|
1095,664
|
1984-1985
|
1435,067
|
489,440
|
1924,507
|
1985-1986
|
1390,586
|
387,275
|
1777,861
|
Totale production
|
13767,991
|
4918,882
|
18686,873
|
Source : SONAPH, rapports annuels
1976-1996, p. 25, cité par Domtsè, 2009 : 67.
Il ressort de l'appréciation des données de ce
tableau que l'huilerie d'Agou depuis sa création jusqu'à la fin
de la politique de la révolution verte n'a jamais avoisiné
même la moitié de sa capacité de production de 50 000
tonnes par an. Dès sa première année d'installation, elle
n'avait produit que 3316,711 tonnes de régimes de palmistes (toutes
productions confondues, huile de palme + palmiste), soit environ 6.63 %
seulement de sa capacité normale de production. Ce qui devait en
principe être qualifié de situation déplorable. Mais
bizarrement, les années suivantes ont aussi aligné de mauvaises
performances, le comble étant la campagne 1983-1984 avec une production
totale de 1095,664 tonnes, soit une contre-performance de 2,19 % par rapport
à la campagne initiale 1979-1980. Par ailleurs, sur sept campagnes
agricoles, c'est-à-dire de la campagne 1979-1980 à celle de
1985-1986, l'usine ne traita que 18 686,873 tonnes de palmistes, soit 37,37 %
de sa capacité. C'est dire que la production cumulée de sept
années de l'usine n'atteignit même pas sa capacité
annuelle. Situation unique dont l'explication est à chercher dans
l'insuffisance de production des plantations de palmier à huile que la
SONAPH est censée entretenir. Cependant, si la très mauvaise
performance de la
103Annuaire économique officiel de la
République togolaise, 1987, p. 62.
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campagne 1983-1984 peut s'expliquer en partie par la
sécheresse de cette année, la vétusté des
plantations était aussi l'une des causes de cette situation. En effet,
la majorité des régimes palmistes traités par l'usine
provenait des plantations naturelles dont la durée de vie serait
arrivée à terme, dans un contexte d'une mauvaise politique de
vulgarisation des plants sélectionnés de palmier à huile.
Le désir de modernisation de l'agriculture ne peut réussir que si
une bonne politique de crédit agricole est définie.
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