La féminisation des conseils d'administrations.( Télécharger le fichier original )par Adeline Fourton ESC Clermont - Programme grande école 2015 |
1.2 La loi : facteur libératoire ?Devant des situations qui semblent inextricables, le dernier recours est bien souvent la loi. Coercitive, universelle, elle apparait comme le meilleur choix pour faire changer la société. Si H. Lacordaire (1848) déclara « Entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c'est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit », la pertinence du choix de la loi est bien posée. Plus concrètement depuis 1946 l'article 3 du préambule de la Constitution impose le principe universel de l'égalité hommes femmes selon les termes « la loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme ». Si nous revenons vers notre sujet, nous constatons que bien des pays ont eu recours à la loi pour augmenter le pourcentage de femmes au sein des conseils d'administrations. Nous allons donc étudier de plus près ces pays, voir qu'elle a été l'impact de ces lois, ses limites et dresser un bilan après plusieurs années d'existence. La loi est-elle une fausse bonne idée ? Selon DiMaggio et Powell (1983) il existe trois sortes d'isomorphismes. Ce concept renvoie à l'idée que « l'entreprise s'adapte à un contexte institutionnel particulier en adoptant des pratiques bien établies » (Scott, 1995.) Selon le premier auteur, l'isomorphisme normatif est le premier et nous renvoie aux normes et codes encadrant la pratique. Peu de rapport ont incité les entreprises à véritablement changer les pratiques vis à vis des femmes et du pourcentage au sein des CdA. L'isomorphisme coercitif ne s'est imposé aux pays européens qu'après les années 2000 et ne représente toujours pas la norme pour Bruxelles. L'isomorphisme mimétique conduit à reproduire le comportement d'une organisation similaire. Ainsi tant que les organisations ne se réfèrent pas à une autre entreprise, elles rechignent à vouloir intégrer les femmes au sein de leur propre CdA, se privant du potentiel de celles-ci11. Après avoir fait un rapide balayage de ce type d'isomorphisme juridique, nous allons poursuivre avec l'étude plus approfondie de l'environnement légale qui entoure cette problématique. Aux yeux du reste du monde, les pays d'Europe du Nord sont ceux où les taux d'activités féminins sont parmi les plus élevés au monde, où "l'égalité entre les sexes fait partie intégrante de l'identité nordique", souligne le Conseil nordique et représente pour le reste du monde un véritable modèle. D'ailleurs les trois pays où la plus grande proportion de postes dans les CdA est occupée par des femmes sont : la Finlande, la Norvège et la Suède. Le cas que nous allons aborder est la Norvège. Les femmes norvégiennes ont obtenu le droit de vote 11 Voir page 34, partie 2.2 : un apport en capital humain différencié 17 identique aux hommes en 1913 soit près de 30 ans avant la France. Presque autant d'années de luttes ont marqué ces norvégiennes pour obtenir ce droit. Un siècle plus tard, en 2003, la Norvège est le premier pays au monde à vouloir instaurer un quota de femme au sein des conseils d'administrations. Votée dans l'année, cette loi instaure un objectif de 40% de femmes au sein des conseils d'administration des entreprises cotées en bourse (regroupées sous l'acronyme ASA en Norvège.) Treize ans après le vote de cette loi, nous pouvons relever différents éléments. Un bond de 18% à 40.5% de femmes12 au sein de l'ASA est observé. Le chiffre est adopté de manière officiel. Pourtant ce qui peut apparaitre comme une réussite totale et toutefois marquée par certains points noirs. Richard Milne (2014) dénonce qu'au moment de l'adoption de la loi, les entreprises ont pris parti de détourner le système en sortant du référencement par l'ASA. Alors que 563 entreprises étaient référencées en 2003, aujourd'hui ce n'est plus que 179, soit trois fois moins qu'il y a bientôt quinze ans. Par ailleurs, il existe aussi des sociétés anonymes (SA) qui ne sont pas cotées en bourse. Le quota des 40% de femmes ne s'appliquent donc à pas à ces structures, faisant ainsi l'impasse sur nombres d'entreprises. Au sein de celles-ci, on retiendra le nombre de 17.9% de femmes siégeant au conseil d'administration, ce qui représente en Norvège 90 481 sièges appartenant aux femmes, sur un total de plus de 500 000. La structure du marché de l'emploi en Norvège est répartit également entre les deux sexes, pourtant deux dirigeants sur trois sont des hommes, 8 sur 10 dans les SA. La sous-représentativité des femmes au sein des organes de gouvernances restent bien ancrée. Par ailleurs, si au regard des chiffres officiels on voit une hausse conséquente, c'est que la sanction est de taille. En effet, en cas de violation de ces dispositions, l'entreprise peut se voir dissoute de manière définitive. Pour aider les entreprises à respecter au mieux ces quotas, l'organisation patronale a pris le parti de créer un programme de formation de préparation au mandat de conseils d'administration. Cette aide à destination des femmes doit permettre de contrebalancer le manque d'expérience des femmes dans le management d'entreprises commerciales13. Pour améliorer la visibilité et augmenter la part des femmes au sein des CdA, la gouvernement à créer une série de base de données. Ainsi les femmes intéressées peuvent s'inscrire et, les entreprises peuvent sélectionner les candidates plus facilement aux postes d'administratrices. 12 « Le capital humain des femmes récemment nommées dans les conseils d'administration des sociétés françaises cotées à Paris » Isabelle Allemand et Bénédicte Brullebaut, 2014 13 Voir page 31, partie 2.2 Un apport en capital humain différencié 18 L'Espagne est le second pays à partir duquel nous allons appuyer notre réflexion. La loi pour l'évolution de la place de la femme dans la société a été votée le 15 mars 2007. Plébiscitée par le socialiste José Luis Rodriguez Zapatero, elle instaure parmi d'autres mesures plus larges 40% de femmes de au sein des CdA des entreprises espagnoles (article 75.) Avec une proportion de femme à hauteur de 51% dans le pays, le gouvernement entend tirer parti de ce talent entrepreneurial pour relancer l'économie du pays. La loi prévoie dans une de ses recommandations que : « si le nombre de femmes dans le CdA d'une société cotée est faible ou nul, celui-ci doit veiller à ce qu'en cas de places vacantes, le processus de sélection ne porte pas préjudice à la sélection de femmes et que la société inclue parmi les candidats potentiels, des femmes qui remplissent les critères du profil recherché » (le Code Unifié de Gouvernement d'entreprise des sociétés cotées de l'Autorité des Marchés Financiers espagnole, la Comisión Nacional del Mercado de Valores.) Figure numéro 1 : Société avec 40%
ou plus de femmes dans son conseil Maria Alvarez, 02-2014, Les mujerers en los consejos de aministracion y organismo de decisión de las empresas españolas, Maria Alvarez Sur 1 077 840 sociétés référencées en 2014 seule 16 836 soit 1.56% des sociétés commerciales sont directement concernées par cette loi. De plus sur les 1.56% seule 12.19% respecteraient le seuil des 40% imposé par la loi, ce qui nous ramène à seulement 2053 entreprises. La pertinence de cette loi est donc remise en question par bien des aspects. Tous comme la loi norvégienne sur les quotas, l'Espagne est aussi affectée par ce biais. 19 Parallèlement à l'article 75, une autre loi stipule que les entreprises de plus de 250 salariés ont le devoir de mettre en place un plan d'égalité des sexes au sein de leurs organes de gouvernance. Comme l'illustre le graphique ci-dessus, 10.41% des entreprises concernées par l'article 45 respectent la parité des sexes au sein du CdA. Mais le constat va plus loin et l'on remarque que sur le nombre total d'entreprises (1 077 840), 26.32% (soit 283 735) sont hors champs d'application de l'article 75 et du plan d'égalité. Pourtant celles-ci respectent la proportion des 40% de femmes au sein de leurs conseils. Ainsi, dans le cas de l'Espagne, la loi est moins efficace que l'autorégulation. Elle permet cependant d'impulser une tendance à suivre. Contrairement à la France14, l'Espagne n'a pas adopté de lois concernant les sanctions en cas de non-respect des quotas (loi 75) par les entreprises. Certains avancent même le fait que ce soit une « recommandation de type soft law.» Il s'agit de règles de droit non obligatoire ce qui contredit l'essence même du droit qui se veut coercitive. Cependant la doctrine confirme qu'il s'agit «d'une norme juridique authentique dotée de force contraignante, alors que la recommandation du code d'éthique n'a aucune force contraignante pour ses destinataires car étant une règle de soft law.» Différents aspects peuvent être mis en avant concernant l'Espagne. Le premier est qu'il existe une disparité sur le plan spatial de la féminisation des CdA. Les régions avec le plus grand nombre de femmes siégeant au sein des conseils sont la Galice (29.11%), Asturias (28.84%) et Madrid (28.31%.) Contrairement aux idées reçut, qui affirme que les îles ont souvent un temps de décalage dans les résultats suite à l'application d'un loi comparé à la métropole, les îles Baléares font mieux. En effet, les îles affichent un résultat de 27.78% d'entreprises assujetti au plan d'égalité et 25.44% à l'article 75 qui ont, tous deux plus 40% de femmes nommés. Le second aspect concerne la forme juridique des entreprises. En effet, on remarque une féminisation plus ou moins importante selon que l'entreprise soit une société anonyme ou une société à responsabilité limité. Au global, on note que les femmes sont plus présentes dans les sociétés à responsabilités limités : 26.63% contre 22.12% dans les sociétés anonymes. Ce trait se vérifie dans la plupart des pays européens. Pour aller plus loin, on observe que plus une entreprise est petite, plus la proportion de femmes administrateurs est importante. On passe ainsi de 11.39% pour les grandes entreprises à 27.58% pour les micros entreprises (à plusieurs administrateurs) 14 Voir page 19, partie 1.2 : la loi : facteur libératoire ? 20 On dénotera également une disparité au sein des secteurs d'activités. Celui de l'éducation et de la santé sont les secteurs où les femmes sont le plus largement représentées au sein des CdA avec au taux supérieur à 40%. A contrario, ce sont les métiers des transports et de l'énergie qui recensent le moins de femmes administrateurs. Cet aspect, bien que très controversé rejoint l'idée que nous avons développé précédemment 15: le taux de féminisation des métiers influe directement sur la féminisation des organes de gouvernance. Les secteurs de la construction, des transports et de l'énergie sont des métiers à la fois très marqués par le genre mais aussi par des profils ingénieurs où les hommes sont plus largement représentés. Sur le secteur hispanique, cette analyse est vraie au niveau d'un secteur d'activité mais se révèle fausse lorsque l'on parle en termes d'entreprises. En effet, on peut voir que la proportion de femmes salariées n'influe pas réellement sur leur représentation au CdA. Les entreprises ayant entre 25 et 50% de femmes sont celles où les femmes sont le plus représentées au conseil d'administration (25.26%). Après cela le taux baisse sur la tranche 5075% et remonte lorsque les femmes représentent 75% de l'effectif total (28.56%). De manière générale, la loi hispanique a généré une hausse du nombre de femmes dans les conseils d'administration. La participation des femmes est ainsi passée de 4% en 2006 à 10% en 2010. Pourtant en 2014, seul trois des entreprises de l'Ibex 35 (principal indicateur de la bourse de Madrid) étaient représentées par une femme à sa tête. De plus, il existe encore des entreprises sans aucune présence féminine au sein du CdA. Huit des entreprises de ce classement n'ont seulement qu'une femme au sein de leur organe de gouvernance principale. L'entreprise la mieux noté est Red Electrica Espanola avec cinq femmes sur 12 administrateurs, même s'il faut noter qu'elles ont toutes le statut d'administrateurs indépendants. Avec ces différents aspects, on voit que la loi ne couvre pas tous les champs d'applications qu'elle devrait, afin de faire évoluer les choses à long terme. Malgré la promulgation de la loi sur le territoire hispanique, le manque cruel de sanctions laisse aux entreprises le choix de poursuivre dans un mode de gouvernance unisexe. En effet on a d'abord retenu la loi comme contrainte et comme punition. La loi conduit donc à une obligation, et c'est à l'aune de cette obligation que mène la sanction. Sans elle la loi perd en parti de sa valeur puisque l'obligation n'est pas universelle. 15 Voir partie 1.2 : Préjugé, généralité concernant les femmes - approche théorique, page 12 21 Enfin pour finir, nous allons étudier le cas de la France. La loi Coppé-Zimmerman a été promulguée et définitivement adoptée en janvier 2011. Pour permettre aux entreprises d'appréhender cette nouvelle loi, deux paliers ont été prévus : le premier a eu lieu en 2014. Il prévoyait alors que les conseils d'administrations et de surveillance soient dotés de 20% de femmes (les comités exécutifs ont été exclus de cette loi.) En 2011, au moment de l'adoption de la loi, tout conseil d'administration ne comprenant aucune femme a eu l'obligation d'en nommer une dans les six mois suivants. La seconde étape aura lieu en 2017 et instaure un taux de 40% de femmes au sein de ces instances : on ne parle donc pas de parité puisque le taux de 50% n'est pas envisagé. D'ici deux ans, les entreprises françaises vont devoir faire face à un important processus de recrutement d'administratrices. Ce chiffre est estimé à 1 000. Le gouvernement via le ministère des droits des femmes (de la ville, de la jeunesse et des sports) mène également une action pour forcer l'engagement des grands groupes en faveur de l'égalité professionnelle et de la féminisation des comités directeurs. Actuellement vingt-sept grands groupes ont déjà signé cette convention (Accor, Air France BNP-Paribas, Michelin,Total...). Dix autres devraient les rejoindre au cours des prochains mois. Cette démarche représente aussi pour les entreprises, une très bonne occasion de donner un coup d'accélérateur à leur image en mettant en lumière son intégrité (par le respect des lois en matière de droit du travail) et sa bonne gestion des carrières. En effet cela permets aussi à l'entreprise d'améliorer ses processus de recrutement et à terme une meilleure rétention des talents. A l'image de la Norvège, des mesures disciplinaires, des sanctions ont également été prévues par la loi. La première étant la nullité des nominations masculines qui devront être remplacé par des femmes. La seconde est pécuniaire puisqu'elle prévoit la suspension temporaire des jetons de présence16 (rémunération des administrateurs.) La loi s'applique aux groupes français cotés et aux sociétés réalisant au moins 50 millions d'euros de chiffres d'affaires et employant plus de 500 salariés. Le champ d'action de cette loi s'est depuis, étendu aux entreprises réalisant un chiffre d'affaires de plus de 50 millions et dont le nombre de salarié compte a minima 250 salariés. Cette extension a eu lieu dans le cadre de la loi sur l'égalité réelle17. En 2006, les femmes représentaient 47% de la population active et seulement 8% des sièges au sein des conseils d'administrations des 500 plus grandes entreprises françaises. Quatre ans 16 Articles L. 225-45, alinéa 2 et L. 225-83, alinéa 2 du Code de commerce, 17 Loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000029330832&categorieLien=id 22 après le vote de cette loi, la coercition de la loi a-t-elle permis de de faire évoluer radicalement la situation sur le territoire français ? Figure numéro 2 : Place des Femmes dans les
conseils d'administration et de Source : Ethics and Boards , governance analytics, Juin 2014 Le graphique ci-dessus montre que les entreprises du CAC 40 entres autres ont connu une très forte hausse du nombre de femmes siégeant au sein des CdA et conseil de surveillance. Avec près de 17.4 points de hausse, la France s'est positionné en leader de 2011 à 2013. Les entreprises du SBF 120 affichent une progression plus raisonnée avec une augmentation de 3,1 points pour atteindre 28,8 %. Cependant pour les entreprises du SBF 12018, les femmes comptent en moyenne pour presque un quart des membres des conseils. Certaines sociétés à l'image de Derichbourg ou Ubisoft sont, pour le moment toujours unisexes. En mars 2014, sept cent entreprises ont été mises en demeure et 10 ont été sanctionnées financièrement. Pourtant l'idée que les entreprises préfèrent payer plutôt que de respecter la loi est une réalité pour celles-ci. Au travers de ces trois cas, nous pouvons voir que sur le plan légal, il subsiste de nombreuses failles. Des groupes de travail de l'IGOPP préfèrent une manoeuvre plutôt incitative que législative, qui viserait à atteindre une masse critique minimale de « 40% de représentants de femmes et d'hommes en s'appuyant sur l'échéancier de renouvellement des membres des conseils ». Pourtant à l'heure actuelle, l'Union Européenne réfléchit sérieusement à appliquer le système de quotas à tous les pays membres. De nombreux auteurs militent en faveur d'une 18 SBF 120 : CAC 40 + 80 entreprises de moindre capitalisation 23 meilleure intégration des femmes au sein des conseils en passant par le recueil du gouvernement d'entreprise. Cela passerait en outre par l'inclusion de dispositions en matière de mixité et de promulgation de l'information. Plus généralement, on peut dire que les quotas présentent des avantages et des inconvénients. A terme, les avantages sont les suivants : cela conduit à « augmenter la probabilité d'avoir des administrateurs qualifiés dans les conseils » (I.Allemands et B.Brullebaut, 2014) Les femmes qualifiés se retrouveraient donc comme véritables candidates potentielles et non remis en bas de liste. La loi permettrait aussi de mieux connaitre les caractéristiques et les compétences des administratrices permettant ainsi d'évaluer de façon plus concrète et sans biais les capacités des candidates à ces postes (Mateos de Cabo et al. 2011) Les points négatifs sont principalement articulés autour de la coercition de la loi et de ses dérives. En effet, en se focalisant exclusivement sur les quotas et la peur des sanctions, on peut assister à un recrutement bâclé de femmes non compétentes. On assisterait donc à une perte non seulement de capital humain mais aussi en terme de performance. Par ailleurs, d'autres auteurs tels qu'Adams et Ferreira mettent en avant le libre fonctionnement du marché sans tenir compte des déterminations sociales. Finalement, le bien de l'entreprise doit passer avant la question de genre imposée au conseil d'administration. Une autre étude menée récemment par Dalton et Dalton, met cependant en avant l'importance de l'interaction de certaines lois sur la féminisation des CdA. La loi Sarbanne-Oxley par exemple a considérablement fait augmenter l'influence des femmes. Les chiffres relevés sont les suivants : Entre 2001 et 2009, la féminisation des sous-comités des organisations du Fortune 50019 est passée de 5 à 13% pour les comités de vérification, de 4 à 17% pour les comités de rémunération et de 8 à 20% pour les comités de nomination ou gouvernance. Rétrospectivement, on peut observer que l'après 2010 a été marquée par une hausse conséquente du nombre de femmes dans les organes de gouvernance au sein de l'Union Européenne. Pour rappel, la France est le pays ayant connu la plus forte hausse. Cependant, les progrès sont annoncés comme « glacials » par l'OIT et « 100 à 200 ans nécessaires pour parvenir à la parité au sein de la hiérarchie des entreprises, si rien ne change » (OIT, 2015). En effet, même si les certains aspects se sont améliorés, on voit encore les biais des lois. Notamment en ce qui concerne les comités exécutifs, et de direction. Les applications coercitives ne couvrent pas ce champ. Pourtant, à la base ces comités peuvent être un 19 Fortune 500 est le classement des 500 premières entreprises américaines, classées selon l'importance de leur chiffre d'affaires. Il est publié chaque année dans le magazine Fortune http://fortune.com/fortune500/ 24 excellent tremplin pour accéder par la suite à des postes d'administrateurs. Mamadou Toé (2014) confirme d'ailleurs cet aspect avec une meilleure féminisation des CdA lorsque les comités exécutifs sont eux-mêmes dotés de plus de femmes. Mais avec l'arrivée des quotas on voit l'inverse se produire, les CdA se féminisent tant bien que mal et les COMEX se replient sur eux même car hors champs d'application des lois et restent indéniablement aux mains de la gente masculine. Par exemple, en France de nombreuses entreprises du secteur bancaire et des télécommunications tels que BNP Paribas, Crédit agricole et Axa mais aussi Vivendi ou Iliad ont un COMEX presque exclusivement masculin20. Pourtant la coercition de la loi permet d'améliorer à court terme une situation critique. En effet, malgré les biais cités, les pays où le pourcentage de femmes a crû rapidement sont ceux où la loi a agi. L'autorégulation a, pour le moment peu porté ses fruits. Nonobstant, la Commission Européenne tend à conserver une forme d'autorégulation via une manoeuvre incitative pour donner « une chance aux sociétés cotées de se rattraper et les a invité à s'engager à atteindre volontairement 30% de femmes dans les conseils en 2015, et 40% en 2020.» A l'image de la Norvège, une nouvelle situation est également apparue dans les entreprises. De manière à détourner le système des quotas, les entreprises non cotées peuvent changer de régime juridique en société par action simplifié (S.A.S) pour ne citer qu'un exemple. La S.A.S étant le régime juridique le plus proche de celui de la société anonyme. La Norvège affirme que l'ensemble du processus, depuis les premières discussions jusqu'à l'application complète de la loi, a duré dix ans. Si la Norvège reste le pays ayant amorcé à l'échelle européenne les politique de quotas, rétrospectivement, elle considère avoir été trop lente dans sa mise en place. Le gouvernement norvégien incite donc les pays qui voudraient poursuivre dans la voie légale à le faire plus rapidement qu'elle ne l'a fait, et donc rapprocher les paliers entres eux, voir les supprimer. Pour conclure, nous rappellerons que la loi agit non pas au profit du sexe féminin, mais bien dans l'intérêt général des sociétés. L'Autorité des Marchés Financiers espagnole, nous rappelle ainsi que « Ne pas profiter du talent potentiel de 51% de la population (les femmes), ne peut être économiquement rationnel pour l'ensemble des grandes entreprises de notre pays.» 20 Voir annexe 3 page http://www.agefi.fr/articles/place-aux-talents-feminins--1336070.html, 2014 25 |
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