La féminisation des conseils d'administrations.( Télécharger le fichier original )par Adeline Fourton ESC Clermont - Programme grande école 2015 |
1.2 Préjugés, généralités concernant les femmes - approche théoriqueSi les femmes sont encore si peu nombreuses au sein des organes de gouvernances, le spectre de leurs anciennes conditions restent, malgré tout une des raisons principales invoquée. A l'origine, les femmes s'occupaient des tâches domestiques et élevaient les enfants. Tandis que les hommes avaient pour activité la gestion financière du ménage, la prise de décision et des affaires publics. Les hommes ont donc gardé une certaine légitimité aux postes de dirigeants et ils ont façonné les entreprises à leur image. Cette « illégitimité » (Laufer) de la femme dans les sphères de prise de décision s'est donc conservée malgré les évolutions. Laufer (2005) « les organisations sont aussi ces lieux où se structurent les relations de pouvoir et les processus informels, souvent inégalitaires, qui déterminent l'accès aux postes de pouvoir. [Elles...] sont le lieu de fonctionnements informels, qui fonctionnent le plus souvent au bénéfice des hommes et des parcours masculins ». Eliev et Bernier (2003 : 92), continuent en insistant sur le fait que « la culture organisationnelle est, fondamentalement, une culture masculine.». Le management d'entreprise est marqué par un certain nombre de stéréotype relatif au genre. Ces idées préconçut émerge sous l'influence du milieu, de l'éducation ou des valeurs propre à un groupe, ou un individu. Ainsi pour devenir un bon manager et administrateur, il faudrait avoir un profil plus marqué par une certaine agressivité et un fort appétit pour l'esprit de compétition. Dans l'imaginaire ce type de caractère serait plus répandu chez les hommes, même si désormais de nombreuses femmes possèdent le même type de caractéristiques. (Schein, 1994) Ainsi « Les hommes représenteraient l'autorité et le leadership, les femmes l'écoute et l'empathie » (Vivianne de Beaufort et Lucy Summers, 2012.)9 A travers cette même étude, ces auteurs ont dressés la liste des qualités requises pour être un bon administrateur du point de vue des femmes : - Connaitre le terrain/le secteur - Participer aux comités spécialisés dont le comité d'Audit - Apporter une expertise particulière - Avoir une capacité à appréhender les sujets complexes en les rendant compréhensibles et exécutables. - Contrôler et mesurer la mise en oeuvre de la stratégie Mais aussi : 9 « Femmes et Pouvoir : Tabou ou nouveau modèle de gouvernance ? », Viviane de Beaufort, 2012. https://sites.google.com/a/essec.edu/viviane-de-beaufort/engagement-women/leadership-au-feminin 12 - Piloter la stratégie de l'entreprise et le coaching de l'équipe de Direction - Intégrer les dimensions « vision » « avenir » « long terme ». - Participer à la construction de ce qui rend l'entreprise « préférée » aux yeux de tous fait partie de la mission de l'administrateur. - Eclairer sur de nouveaux business Modèles ou Territoires - Challenger / défier le Business Modèle de la Société Les conclusions des auteurs devant cette vision idéalisée du CdA les amènent à se poser la question suivante : quelles sont les solutions envisageables pour les femmes qui ne répondent pas aux critères précédents ? Avec un comportement en inéquation avec l'ordre établi, les hypothèses pour ces femmes sont alors de deux types : « entrer en résistance ou se conformer. Leur influence risque d'être remise en question malgré leurs compétences » (Viviane de Beaufort et Lucy Summers, 2012.) Tout autrement, de nombreux auteurs considèrent les organes de gouvernance comme des « clubs old boy ». Considéré comme un cercle ou clan composé exclusivement d'homme et où les attributs, compétences et la performance des femmes sont jugés différemment de ceux des hommes. L'exemple que nous pouvons citer s'articule autour des attentes vis-à-vis de la gente féminine qui serait plus importantes avec un moindre droit à l'erreur (Sylvie St-Onge et Michel Magnan.) Ces clubs se caractérisent par différents aspect qui sont : « participent d'une logique de socialisation professionnelle instrumentale, sise sur la sélectivité cooptative, l'informalité des rencontres et l'inter-personnalité des relations. » (Maria Giuseppina Bruna, 2013.) Un autre aspect de ces réseaux ou cercles sociaux est le recours à une importante forme de cooptation au sein ceux-ci. « Dans un contexte marqué par une asymétrie de l'information, la fréquentation de sphères informelles de socialisation professionnelle s'avère essentielle à la compréhension de la culture et des normes organisationnelles, au décryptage des situations contextuelles et des enjeux stratégiques, à la perception des canaux sous-jacents du pouvoir » (Crozier, Friedberg, 1977). Pour l'organisation, ce genre de cooptation est bénéfique puisqu'il permet de réduire les risques à la fois liés aux coûts de recrutement mais aussi de s'assurer que la personne cooptée s'intègrera parfaitement au cercle auquel elle appartiendra in fine. En effet, en recrutant sur le même profil, on s'assure de générer de moindre problèmes. Ce type de recrutement renforce la problématique émise par les entreprises autour de la difficulté « d'attirer et de conserver des talents en règle générale et de fidéliser les femmes en particulier.» Il est également important d'aborder la problématique de l'isomorphisme mimétique qui est un frein important dans le recrutement de femmes des CdA. Selon DiMaggio et Powell (1983), ce concept renvoie au fait d' « imiter le comportement d'une 13 organisation similaire, plus particulièrement lorsqu'elle est considérée comme performante et légitime. » Si aucune entreprise ne se révèle comme le modèle à suivre, alors beaucoup d'entreprises se montreront réticentes concernant la parité homme-femmes dans les organes de gouvernances. Cet isomorphisme engendre la création d'un cercle vicieux qui pousse les hommes à nommer d'autres hommes avec les mêmes similitudes, on parle alors de « reproduction homosociale » (Westphal et Stern, 2006) et conduit à un verrouillage des conseils. Il faut noter que la discrimination direct, reposant sur des préjugés est considérée comme illégale. Par contre, c'est bien souvent face à des situations de discrimination indirecte que le problème se pose. Celle-ci est directement issus des règles, par des biais conduise à des situations de déséquilibre en terme de genre (Sylvie St Onge, Michel Magnan, 2010.) Par ailleurs, nombre de femmes ou hommes souffrent également de l'attribution du genre sur certains métiers, ou certaines activités : « on a peu de femmes dans nos équipes de commerciaux parce que l'alcool c'est un produit surtout masculin » (Directeur RH, entreprise de taille intermédiaire) ou bien encore « ben, les chefs d'agence sont tous des hommes donc, ça fait les binômes homme/femme. De toute façon, ils ne veulent que des femmes comme assistantes... Et puis l'assistante est souvent la seule présence féminine dans une agence ! Les chefs, les ingénieurs et les techniciens sont pratiquement tous des hommes, on ne va donc pas, en plus embaucher un homme comme assistant. » (Directrice RH, grande entreprise.) Même si, depuis les positions sont différentes, les stéréotypes sexistes demeurent. Encore aujourd'hui, peu de métiers sont mixtes ainsi définis : ils sont 19 en 2011 (20 en 1983), et regroupent 19,8 % de l'emploi total (23,8 % en 1983) Bien souvent l'aspect qui pèse le plus en termes d'évolution vers les sphères managériales est la charge familiale réelle ou potentielle des femmes. Les moindres liens que peuvent entretenir les femmes avec les « leaders », leur moindre implication dans les réseaux d'affaires sont deux raisons qui expliquent aussi les freins à l'entrée des femmes dans les CdA. Par ailleurs, des facteurs sociaux propres à chacune des femmes rentrent aussi en jeu comme la peur de la solitude mais surtout l'absence de modèle (Sylvie St Onge, Michel Magnan, 2010.) Ces mêmes auteurs mettent en avant six facteurs explicatifs des principaux obstacles rencontrés pour les femmes à leur intégration au sein du CdA. Les trois premiers sont d'ordre structurels/ culturel et l'on retrouve en première place la culture old boys que nous avons expliqués précédemment. En second plan, le processus de recrutement est mis en place. L'inconscient collectif a tendance à favoriser les hommes à ces postes. Les femmes font donc face à une discrimination à la fois directe mais aussi indirecte. Enfin le traitement qui exclue les femmes des réseaux informels représente un frein important à l'intégration des 14 femmes. Ces réseaux se tissent bien souvent après les heures de bureaux, et les femmes ont tendance à se priver de cette partie de la journée de travail pour privilégier leur famille. Il est important de souligner l'apport du modèle du « déficit individuel » (Gutek, 1993) qui consiste à reporter « le poids du changement sur les femmes et occulte la dynamique sociale régissant les rapports de sexe au sein des sociétés et des organisations » (French, 1986). A la base des inégalités, on retrouve les barrières structurelle ou liée à la culture. Ce modèle outrepasse ces barrières et redonne leur part de responsabilité aux individus. L'exemple mis en avant consiste a dire que : si les femmes limite leur implication dans leur carrière au profil de leur vie familiale, c'est un choix personnel. L'image de la femme au pouvoir reste encore marginalisée. Pourtant aux Etats Unis, le plafond de verre10 est toutefois plus fin que dans les pays Européens. « Le nouveau monde » a su bien plus vite se féminiser et compter sur les femmes présentent, bien que le mouvement reste toutefois trop lent. Ainsi même dans un pays où les normes sont différentes, les premières raisons invoquées restreignant les femmes au poste de top management sont les mêmes que dans les pays Européens : les stéréotypes sexistes, la hiérarchisation sexuées des postes, la résistance organisationnel et la faiblesse des réseaux professionnels des cadres-femmes et leur exclusion des cercles sociaux. De nombreux ponts peuvent être ainsi établis entre ces deux pays. 10 Plafond de verre ou glass ceiling : « ensemble d'obstacle artificiels, crées par certain préjugés et stéréotypes qui empêcheraient des femmes qualifiées d'avancer dans l'organisation. » Morrison et Von Glinow (1990) 15 16 |
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