3. Le Genre comme concept et déterminant de
santé :
Suite à la description du plaidoyer et fait un retour
sur les mouvements féministes et les mouvements pour la santé des
femmes, nous allons dans cette dernière section décrire
brièvement le genre comme concept récurrent dans le discours
féministe. Nous présenterons en particulier son lien avec la
santé.
3.1. Le concept de Genre:
Nous pouvons, pour mieux cerner le caractère
polysémique du concept « genre », nous baser sur ses usages.
Il s'applique aux deux sexes et amène à distinguer le statut
social de l'état biologique. Il peut être défini comme
« Un système de bi-catégorisation
hiérarchisée entre les sexes (hommes/femmes) et entre les valeurs
et représentations qui leurs sont associées
(masculin/féminin) »24. Ce concept nait de travaux
dans les années 50 de John Money s'inspirant de Margaret Mead
25 qui propose une autre notion que le « sexe » pour
désigner les différences sociales entre hommes et femmes.
Par la suite, le courant féministe va s'en servir pour
« dénaturaliser » le sexe. Comme l'indique la formule de
Simone de Beauvoir « On ne nait pas femme, on le devient ».
Ce courant alimente dans les années 60 les premiers travaux
féministes à ce sujet. Notamment Gayle Rubin qui, en s'inspirant
des travaux de Levi-Strauss et Freud va montrer que « le
système de genre n'est pas immuablement oppressif et il a perdu beaucoup
de sa fonction traditionnelle. Néanmoins, il ne s'évanouira pas
en l'absence d'opposition. (...) le système/genre doit être
réorganisé par l'action politique. En fin de compte
l'exégèse de Levi-Strauss et de Freud incite à une
certaine vision de la politique et de l'utopie féministe, à
savoir que notre visée doit être, non l'élimination des
hommes, mais l'élimination du système social qui crée le
sexisme et le genre »26.
Les différents courants féministes et les autres
usages amènent à adopter de nouvelles caractéristiques.
Comme le précise Bereni, ce deuxième âge des
théories du genre peut être schématisé de la
façon suivante : « 1. Le genre n'exprime pas la part sociale de
la division mais il est la division 2. Le genre précède et
détermine donc les sexes, qui en font partie 3. Le genre n'est pas
simplement un système de différenciation mais aussi un
système de domination »
24 BERENI L., CHAUVIN S., JAUNAIT A., REVILLARD A.
Introduction aux études sur le genre, Bruxelles : de Boeck
Supérieur, 2012. 256 pages
25 FASSIN E., (2008) L'empire du genre. L'histoire
politique ambiguë d'un outil conceptuel, L'Homme /Vol 4 n. 3,
n° 187-188, p. 375-392
26 RUBIN G. Surveiller et jouir. Anthropologie
politique du sexe Paris : EPEL, 2010, 485p.
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Pour résumer, adopter une posture genrée permet
de mettre en évidence quatre dimensions analytiques qui se retrouvent
dans la majorité des études sur le genre:
1. Le genre est une construction sociale : il existe
un apprentissage tout au long de la vie des comportements des femmes et des
hommes.
2. Le genre est un processus relationnel : les
caractéristiques associées à chaque sexe sont socialement
construites dans une relation d'opposition nécessitant une articulation
entre féminin et masculin.
3. Le genre est un rapport de pouvoir : Les
relations sociales entre les sexes sont appréhendées comme un
rapport de pouvoir où les deux sexes ne sont pas uniquement
différents, il existe aussi une distinction
hiérarchisée.
4. Le genre est imbriqué dans d'autres rapports de
pouvoir, à l'intersection avec d'autres tensions et clivages comme
la classe sociale, l'âge ou encore l' « ethnie » d'origine.
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