2. Les déterminants de la demande de travail
Plusieurs études se sont données pour objectif
d'analyser les déterminants de la demande de travail par les
entreprises.
LAYARD-NICKELL-JACKMAN en 1991 ont proposé de
réaliser des équations mixtes classiques-keynésiennes de
détermination de l'emploi qui vont prendre en compte les arguments
correspondant aux deux types de chômages. Ainsi, d'une façon
agrégée, on considère une économie où
coexistent les deux situations. Elles visent à expliquer
également quelle part de la demande, fonction de la
compétitivité ou de l'arbitrage des producteurs entre
marchés, est finalement adressée aux producteurs nationaux. Mais
ces équations sont compliquées par le fait que ce n'est pas la
production qui y est introduite mais la demande (tant nationale
qu'étrangère) et le rapport du prix étranger au prix
intérieur.
ARTUS (1987) s'est limité à régresser
l'emploi sur des variables explicatives comme le salaire réel, le niveau
de production, le niveau de capital, d'autres sont allés plus loin en
considérant le coût relatif de travail-capital (DORTMONT, 1994),
la vitesse d'ajustement entre emploi désiré et emploi
réalisé (COUSINEAU, 1988), et l'emploi retardé (AMBAPOUR,
2001).
Mauricio Cardenas en 2001 a analysé les
déterminants de la demande de travail dans le secteur manufacturier en
Colombie de 1976 à 1996.Il a effectué une estimation de la
demande de travail
21
statique sur un panel d'industries manufacturières et a
montré que l'élasticité de la demande de travail par
rapport au salaire est faible et varie selon la qualification du travailleur.
Le degré de substituabilité entre les types de travail tel que
suggéré par la théorie de la segmentation de marché
de travail est faible. Les élasticités emploi-salaires sont
négatives et restent cependant faibles aussi bien pour les non
qualifiés que pour ceux qui sont qualifiés. Les
élasticités entre l'emploi et la production sont positives.
ANDRIANARISON et RAMILISON en 1997 ont effectué une
étude sur un panel de 513 entreprises sur la période 1994-1995 et
avaient pour objectif de donner une idée sur le comportement des
entreprises à Madagascar en matière de demande de travail et
d'utilisation de capital dans un environnement marqué par des chocs
comme la révision du système de change ou la hausse de salaire.
Ils ont utilisé un modèle de minimisation de coût sous
contrainte du niveau de production compte tenue de la structure des
débouchés du pays. L'estimation a été faite
à partir de la méthode des moindres carrés
quasi-généralisée (MCQG) qui est la plus utilisée
en données de panel. Ces derniers, ont conclu que la demande de travail
est peu élastique par rapport aux débouchés
anticipés (le niveau de production anticipé) et cela est
lié à l'étroitesse du marché local et à la
faiblesse des exportations.
La détermination des facteurs influençant la
demande de travail nécessite avant tout une compréhension de la
dynamique de l'ajustement. Pour ce faire, nous partons du modèle
d'emploi de court terme avec ajustement partiel étudié dans le
cadre du Congo Brazzaville par AMBAPOUR en 2001. Son objectif était de
faire ressortir l'effet de l'ajustement partiel sur la demande de travail.
L'estimation sur modèle de panel a permis à l'auteur de conclure
que le comportement des entreprises congolaises publiques et privées
dans les cinq secteurs d'activités étudiés a
été dominé par une forte inertie d'emploi. L'ajustement de
l'emploi effectif à l'emploi désiré au cours de la
période étudiée s'est effectué avec une vitesse
d'ajustement de 12,7% par an. L'auteur conclut que les résultats obtenus
sont bons mais cela nécessite une prise d'attention quant à leur
fragilité. De ce point de vue, trois principales raisons de la
fragilité des résultats ont été retenues.
Premièrement, le chômage considéré est du type
keynésien dont l'hypothèse n'est pas totalement
vérifiée dans le cas des secteurs d'activités
étudiés. Ensuite, la valeur ajoutée est une fonction du
travail plutôt que l'inverse. Enfin, les données
macroéconomiques dans les pays en développement sont à
prendre avec précaution et cela a sans doute des conséquences sur
les estimations économétriques.
22
FOFANA (1999) quant à lui à chercher à
travers son étude portant sur les sous branches du secteur de
l'industrie en Côte d'Ivoire à déterminer les facteurs qui
influent significativement sur la demande de travail dans le secteur
industriel. A partir des données portant sur seize sous branches sur la
période 1992-1995, l'auteur estime le modèle à l'aide de
la méthode des moindres carrés ordinaires à variable
binaires et les résultats suggèrent que la valeur réelle
du capital, le chiffre d'affaire, la valeur ajoutée par unité de
travail et le coût réel moyen du travail sont les facteurs qui
influent significativement sur la demande de travail dans les entreprises du
secteur industriel. Le coût moyen du travail agit négativement sur
la demande de travail dans certaines sous branches. Dans d'autres sous branches
par contre, l'auteur trouve que l'augmentation du coût moyen du travail
s'est accompagnée d'une hausse des emplois.
L'analyse des déterminants de la demande de travail
dans le cadre du Burkina Faso à notre connaissance n'a pas fait l'objet
d'une étude spécifique alors que la résorption du
problème de chômage nécessite une bonne
compréhension des composantes du marché de travail en
général mais surtout de la composante demande de travail en
particulier. Ainsi, nous nous appuyons sur l'étude de Francis
ANDRIANARISON et Eric RAMILISON (1997) mais en introduisant l'aspect dynamique
au modèle de panel comme l'a fait AMBAPOUR (2001) dans le cadre du
Congo. En rappel, partant d'une fonction de production Cobb-Douglas, et
après avoir dérivé la fonction demande de travail
conditionnelle, ces auteurs ont considéré le coût relatif
du travail, le coût du capital, la valeur ajoutée comme les
principaux facteurs explicatifs de la demande de travail à Madagascar.
Les auteurs ont opté pour la fonction de demande de travail
conditionnelle. Ainsi, nous optons pour la demande de travail conditionnelle
mais en ajoutant l'emploi retardé comme facteur explicatif de la demande
de travail étant donné que l'environnement dans lequel
évoluent les entreprises n'est pas un environnement certain (AMBAPOUR,
2001).
23
24
CHAPITRE III : CADRE OPERATOIRE
|