WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le processus de démocratisation au Maroc et en Tunisie du printemps arabe à  aujourd'hui (2015).

( Télécharger le fichier original )
par Omar Khyari
Université Libre de Bruxelles - Mémoire 1 - Science politique 2015
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

I / Démocratisation et développement : l'état de la question

Dans ce chapitre, nous développerons les grandes théories des sciences politiques portant sur le concept de démocratie traitant dans une première partie sur la démocratisation et la transitologie, pour dans un second temps s'intéresser à l'école de la modernisation.

A / Théorie de démocratisation et de la transitologie :

Dans cette partie, nous nous appuierons sur plusieurs théories développées par différents auteurs pour la plupart déjà étudiés durant le séminaire.

Tout d'abord, nous analyserons la position de l'un des pionniers de la théorie de la démocratisation, à savoir Robert Alan Dahl, en expliquant sa vision et notamment son concept de « polyarchie ».

Par la suite, nous nous intéresserons à un auteur qui aura été inspiré par les idées de R.Dahl, il s'agit du professeur de science politique Samuel Huntington notamment connu pour son essai « Le choc des civilisations ». Cet auteur traite des avantages possibles émanant d'un système autoritaire en particulier au niveau du développement économique.

Nous développerons également les idées de Larry Diamond, professeur de science politique.

Il est l'un des premiers à lancé le débat sur ce qu'il nomme des « Régimes hybrides ». Nous observerons en quoi sa théorie a permis de sortir du carcan définissant des régimes soit comme étant autoritaire ou démocratique sans prendre en compte la possibilité qu'il puisse exister d'autres systèmes.

Et enfin, nous nous intéresserons à une nouvelle théorie, qui a notamment vu le jour après la troisième vague de démocratisation qui débute en 1974 avec la « révolution des Oeillets », et qui fonde la transitologie.

Robert Alan Dahl développe notamment dans ses ouvrages, tels que «Introduction à la théorie démocratique» (1956), "Analyse politique moderne" (1964), ou encore « Les oppositions politiques dans les démocraties occidentales" (1966). Dahl 8théorise le très influent concept de polyarchie - type particulier de mode de gouvernement dans une société moderne, qui diffère des autres régimes politiques sur deux points : une tolérance relativement élevée pour l'opposition et une marge de manoeuvre pour influencer le comportement du gouvernement, y compris le changement des dirigeants par des voies pacifiques.

Ce terme a été introduit par le politologue américain Robert Dahl pour décrire le fonctionnement politique des sociétés industrielles occidentales. 9Les caractères constitutifs de la polyarchie sont la dispersion des sources du pouvoir, le droit pour tous de participer à la désignation des autorités politiques et une organisation qui tend efficacement au règlement pacifique des conflits. Dahl a voulu éviter la confusion, si dangereuse dans le vocabulaire de la science politique, des faits et des valeurs, et il a clairement distingué l'idéal de la démocratie du fait polyarchique, tout en admettant que les diverses formes de la polyarchie puissent être considérées comme des approximations, plus ou moins bonnes, de la démocratie.

8

9

Robert Dahl, Polyarchy ; participation and opposition, New Haven, Yale University Press, 1971. Ibid

7 sur 51

8 sur 51

La polyarchie est pensée comme, 10 Ç un système politique fondé sur la compétition politique ouverte entre les différents groupes dans la lutte pour le soutien des électeurs ». Dans la science politique moderne, il était le premier en 1953 à dégager une pluralité d'institutions de base communes aux démocraties libérales. Le terme est utilisé dans le but de livrer une version "purifié" des systèmes existants, et il en vient à la conclusion que des institutions sont nécessaires (mais peut-être pas suffisante) pour atteindre l'idéal de la démocratie.

R.Dahl identifie aussi les conditions suivantes qui permettent au système polyarchique de se maintenir. 11D'abord, les dirigeants politiques pour conquérir le pouvoir qui s'interdisent de recourir à des moyens de coercition contre l'opposition (l'utilisation des forces de sécurité, armée).

En résumé, les principales caractéristiques de la théorie de la polyarchie, sont la possibilité de la compétition politique, le droit de participer à la vie politique et de la gouvernance sur la base de la coalition.

Toutefois il existe une tradition intellectuelle dont la théorie est qu'un gouvernement autoritaire dans les pays à faible et à moyen revenu, est meilleur pour encourager la croissance économique ainsi que le développement social. Samuel Huntington s'inscrit dans cette vision comme en témoigne certains de ses travaux dans les année 1960.

L'idée majeur qu'il développe est l'importance du fonctionnement autoritaire dans certains Etats dans la réalisation du développement économique, et ce, car l'autoritarisme offre plusieurs avantages. 12D'abord la planification à long terme permet une meilleure prévisibilité et elle accroit la possibilité de mener une vision dans le temps. Aussi, le chef de l'Etat est délivré des exigences qu'induisent les calculs politiques électoraux à court terme que connaissent les démocraties occidentales. De plus, il n'y a pas la nécessité de négocier

10

11

Ibid Ibid

12 Samuel P. Huntington, Political Order in Changing Societies. New Haven, CT/Yale University Press,1968.

9 sur 51

avec des groupes d'intérêts particuliers (patronat ou syndicats par exemple). Cette autonomie vis-à-vis de ces groupes concurrents induit un fonctionnement plus juste de l'Etat et de l'administration ainsi qu'une protection de l'ensemble des citoyens.

Pour l'ensemble de ces raisons, il affirme la supériorité des régimes non démocratiques. Ainsi, d'autres théoriciens partagent cette tradition intellectuelle tel que Joan Nelson, qui affirme que 13« la participation politique doit être réduite, au moins temporairement, afin de promouvoir le développement économique ». Cette école de pensée n'est pas marginal, d'autres auteurs ont poussé plus loin le raisonnement tel que Robert Kaplan qui «14 défie les instincts libéraux de l'Occident », qui plutôt que d'avancer la cause démocratique sont porteurs de conflits civils et d'émergence de nouveaux autocrates. La pensée de Kaplan est partagée par ceux qui affirment que le modèle démocratique occidentale n'est pas exportable dans tout les pays du fait de différences sociales et culturelles.

Dans le même objectif de définition, Larry Diamond théorise le concept de 15« régimes hybrides ».Il met en avant les difficultés techniques qui empêchent de cataloguer avec certitude les régimes politiques, et il désigne plusieurs chercheurs qui remettent en cause la tendance à qualifier un régime de «démocratique» sur la seule base de l'organisation d'élections multipartites. Or, plusieurs pays aujourd'hui fonctionnent avec ce type d'élection mais ne peuvent pas pour autant prétendre être des démocraties (l'Algérie et le Gabon par exemple). Ainsi, l'auteur met en évidence l'existence de régimes hybrides ou il assiste à une plus forte augmentation de formes autoritaires de multipartisme que de démocraties. De plus, il met en exergue deux idées cruciales : d'une part, la corrélation entre la taille et la population d'un Etat et le régime démocratique en place (il est plus aisé selon lui de mettre en place la démocratie lorsqu'on a une faible population dans un espace réduit) et d'autre part le fait que dans l'évaluation d'un régime politique, il est nécessaire de savoir si la violence

13 Samuel P.Huntington and Joan M.Nelson, « No Easy Choice: Political Participation in Developing Countries », Harvard University Press, 1976

14 Robert Kaplan, « Looking the World in the Eye », The Atlantic Monthly, 288, (5), décembre 2001, p. 68-82.

15 Diamond Larry, « Thinking About Hybrid Regimes », Journal of Democracy, 2002

10 sur 51

politique est clairement organisée par l'Etat ou le pouvoir central comme moyen de pression sur l'opposition .

Ainsi, il distingue trois grandes catégories de régimes politiques : les démocraties, les régimes autoritaires et les régimes fermés. Entre les deux premières catégories, il existe une zone grise, que Larry Diamond nomme « régimes ambigus ». Chacune des deux premières catégories contient deux sous-catégories : démocraties libérales et démocraties électorales d'une part, et autoritarisme compétitif et en autoritarisme non compétitif d'autre part. L'auteur ajoute que 16l'autoritarisme non compétitif transforme les échéances électorales en façade démocratique car les règles normative de la compétition politiques sont bafouées (bourrages d'urnes, ou intimidation de l'opposition politique). Dans ces régimes, les institutions politiques peuvent exister mais elles ne constituent pas de contre- pouvoir nécessaire au bon fonctionnement d'une démocratie.

Il est également intéressant de se pencher sur la définition des systèmes autoritaires selon Juan Linz. Selon lui, les systèmes autoritaires sont 17Ç des systèmes politiques au pluralisme limité, politiquement non responsables , sans idéologie élaboré et directrices mais pourvu de mentalités spécifiques, sans mobilisation intensive ou extensive- excepté a certaines étapes de leurs développement- et dans lequel un leader ou, occasionnellement, un petit groupe exerce le pouvoir à l'intérieur de limites formellement mal défini mais, en fait, plutôt prévisibles ».

Aussi, selon Dankwart Rustow, 18le changement opéré dans les pays arabes et les réformes qui ont suivi le Printemps Arabe relèvent d'abord d'un mode de gestion et de régulations de conflits sociaux (et de répartition des richesses entre les élites au pouvoir) plutôt que d'un désir réel d'instaurer un régime démocratique. En fait, il affirme que la volonté de mettre en place un régime démocratique n'est pas induite par des changements dans les valeurs des élites mais a des choix stratégiques pouvant correspondre à une perception du danger.

16

Ibid

17 Linz Juan and Stepan Alfred, « Problems of Democratic Transition and Consolidation », Baltimore, John Hopkins University Press :39-52

18 Rustow Dankwart, « Transition to Democracy : Toward a Dynamic Model », Comparative politics, 1970

11 sur 51

Guillermo O'Donnel et P.C Schmitter ne partagent pas la théorie de la supériorité des gouvernements autoritaires dans les Etats à faibles et moyens revenus de Samuel Huntington. D'une part, ces théoriciens de la transitologie développe un débat que l'on qualifie de gradualiste, dans le sens que 19la démocratie ne s'obtient pas en peu de temps, c'est un processus long et graduel : il n'existe pas de barrière stricte entre une démocratie et une non démocratie. De ce fait la classification des régimes politiques non démocratiques est incomplète car il existe une zone grise non explorée. D'autre part, 20le développement socio-économique n'est pas la pierre angulaire dans le processus de démocratisation dans leur théorie mais c'est la volonté et la capacité des classes privilégiées de ces pays à militer en faveur d'une transition puis à assurer le maintien de la démocratie.

Cela a pour conséquence des conflits avec les autres groupes d'intérêts particuliers : 21« plutôt que d'engager un débat futile sur les préconditions, il est important, dit Philippe Schmitter, de clarifier comment le mode de transition de régime détermine le contexte à l'intérieur duquel les interactions stratégiques peuvent prendre place parce que ces interactions, en retour, aident à déterminer dans quelle mesure la démocratie politique va émerger et survivre. ». C'est donc l'analyse du comportement des élites qui est central dans leur thèse dans l'optique d'étudier les transitions démocratiques. Cette théorie a été développé par nombre d'auteurs ce qui a donné naissance au courant de la transitologie dont la thèse principal est qu'il n'existe pas de « préconditions ». Enfin, ils ajoutent que la démocratisation peut emprunter plusieurs voies et signifier « une sortie des autoritarisme » et même un retour à l'autoritarisme peut avoir lieu.

Pour résumer, l'on se référera à la contribution dans cet ouvrage du polonais Adam Przeworski. Après une analyse des conditions possibles à la chute d'un régime autoritaire et l'amorce de la construction d'un autre démocratique, il tourne le regard de l'analyste vers

19 Guillermo O'Donnel et Philippe Schmitter, Transitions from Authoritarian Rule,Baltimore, Johns Hopkins University Press, 1986.

20

Ibid

21 Philippe Schmitter and Karl Terry, « What Democracy isÉ. and it is not », in L.Diamond and Platnner (eds), The global resurgence of democracy, Baltimore, John Hopkins University Press, 39-52

12 sur 51

deux caractéristiques des acteurs de la transition démocratique. I22l y a d'abord les « risk insentitive », les durs de la transition, qu'ils émanent de l'ancien régime ou de ses opposants, et il y a ensuite les « risk averse » ceux qui ont tendance aux compromis. Il finit par souligner la maximisation des chances de la démocratisation naissante par le jeu des démocrates les plus accommodants face aux durs qui jouent le tout pour le tout en s'attaquant à l'entreprise naissante d'une manière directe ou indirecte.

Ce que l'on peut conclure au sujet de la transitologie classique, c'est son caractère empirique : elle part des expériences historiques de bouleversements démocratiques des régimes autoritaires pour tracer les contours d'une théorie capable de les étudier ; son aspect normatif dans la mesure où ses acteurs considèrent la démocratie comme quelque chose de souhaitable ; c'est une théorie qui essaie de théoriser l'anormalité et l'incertitude caractéristique des périodes transitoires marquées par l'absence de règles claires du jeu politique ; c'est une discipline qui a pour but l'analyse téléologique du jeu des acteurs politiques de la transition.

Dans la même sens, A. Przoworski affirmé que 23« la démocratisation est porteuse d'un très grand degré d'incertitude ». Mais l'élément majeur reste la volonté d'étudier le comportement des élites économiques et traditionnelles et on retrouve cela dans la théorie de la modernisation de Martin Seymour Lipset, qui est l'objet de notre deuxième partie

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams