Faculté des Sciences sociales et
politiques
Département de Science politique :
POLI-D-404 Etudes approfondies de questions de science
politique
Titulaire : Pascal Delwit
Groupe 1: Démocratisation en perspective
comparée
Responsable : Luca Tomini
Sujet : Le processus de
démocratisation au Maroc et en Tunisie du printemps arabe
à
aujourd'hui.
Question de recherche : Quels sont
les réalités politiques et sociales qui explique que deux pays
aux similitudes socio-culturelles appréhendent différemment un
même bouleversement politique, le printemps arabe ?
Année d'étude: MA1 Relations
Internationales
Année Académique: 2014-2015
Travail présenté par : ALAOUI
Othmane / UBAYDULLAEV Jahongir / KHYARI Omar
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Table des matières
Introduction 1
Chapitre Premier : Démocratisation et
dévelopemment : l'état de la question 4
Section I . Théorie de la démocratisation et
de la transitologie 4
Section II . Théorie de la modernisation
9
Chapitre Deuxième : Description de la situation
politique et sociale au Maroc et en
Tunisie 14
Section I . Organisation de la vie politique 14
Section II . Des structures sociales différentes
22
Chapitre Troisième : Analyse de la situation au
Maroc et en Tunisie 29
Section I . Le cas du Maroc 29
Section II . Le cas de la Tunisie 35
Synthèse : 40
Bibliographie 42
En ce début de XXIème siècle, la plus grande
manifestation populaire en faveur de la liberté et de l'exigence d'un
Etat de droit, est sans nul doute celle qui est désormais
qualifiée de « printemps arabe ».
En effet, auparavant, le monde arabe apparaissait comme une
entité statique, ou peine à être promue les valeurs
démocratiques notamment en ce qui concerne le respect des droits de
l'Homme. Les politiques arabes semblent remplir les objectifs d'un plan de
communication plutôt que de réellement chercher à changer
les choses, comme cela a été dénoncé dans un
rapport du PNUD? 1 en 2002 sur le développement humain dans
le monde arabe.
Par définition, par historicité, une
révolution est caractérisée par son coté inattendu,
brutal. Les révoltes populaires dans le monde arabe ont surpris par leur
ampleur, leur caractère exceptionnel et leurs conséquences
importantes. Nous avons décidé de choisir comme sujet, le
processus de démocratisation au Maroc et en Tunisie du printemps arabe
à aujourd'hui. Pour mener à bien ce travail, il est important de
prendre en considération les disparités qui existent entre ces
deux pays. Les événements survenus dans ces pays arabes ne
peuvent être analysés de manière uniforme.
En effet, le monde arabe ne peut être
considéré comme un bloc monolithique alors que celui ci est en
réalité un espace de grandes diversités et connait de
profonds clivages comme le souligne Bassma Kodmani dans son livre «
Abattre les murs » ou elle définit le monde arabe comme
?2« un mille-feuille culturel, un espace de diversité
ethnique, culturel et religieux ».
C'est pourquoi à la suite de ces soulèvements, nous
avons assisté à des résultats très
différents entre les pays concernés. Se focalisant sur notre
étude, cette différence de résultats s'observe en
particulier dans le cas du Maroc et de la Tunisie :
Le premier ayant préservé la structure de son
régime tout en réalisant des avancées constitutionnelles,
tandis que, la seconde acheva son processus révolutionnaire en faisant
chuter le régime qui l'a gouvernée pendant plusieurs
décennies.
C'est donc, cet antagonisme de résultat que nous
souhaitons étudier dans ce travail. ?3Denis Bauchard, dans
son ouvrage référence « le Nouveau Monde Arabe, enjeu et
instabilités » analyse la situation de cette région qui vit
un tournant historique (critical juntures) après le Printemps Arabe de
2011.
L'auteur pense que le processus révolutionnaire demeure
inachevé, même si l'expérience tunisienne a une valeur
pionnière et encourageante pour ses voisins. L'auteur reste convaincu
que, après six siècles de domination ottomane, puis coloniale et
après deux générations
1 PNUD, Rapport sur le développement humain dans le
monde arabe, 2002, 191 pages.
2 KODMANI Basma, Abattre les murs, Liane Levi, 2008, 128
pages.
3BAUCHARD, Denis, Le nouveau monde arabe : enjeux et
instabilités, Edition André Versaille, Bruxelles, 2012,
272p.
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d'indépendances frustrantes, le monde arabe est enfin
entré dans une phase irréversible d'affirmation
démocratique.
Tout d'abord, le fait que notre séminaire porte sur les
processus de démocratisation en perspective comparée, nous
à orienté et conforté dans notre choix d'étudier le
cas du Maroc et de la Tunisie, deux Etats faisant partie de la meme aire
géographique, le Maghreb avec de fortes similitudes
socio-culturelles.
Deuxièmement, au-delà des ressemblances entre ces
deux pays, nous avons considéré que le véritable
intérêt de cette étude, se trouvait dans leur
différences à réagir à un même bouleversement
politique, à savoir le printemps arabe.
Enfin, le fait que nous soyons de nationalité marocaine et
que nous ayons vécu ces événements du printemps arabe
durant notre année de Terminale à Rabat a grandement joué
dans le choix de ce sujet que l'on a souhaité étudier.
Nous avons donc vécu de l'intérieur ce
bouleversement politique majeur dans la région.
Il est évident que cet événement majeur,
arrivant à un âge ou notre identité politique se forge, a
eu un impact sur notre vision de voir notre pays mais aussi plus
généralement sur notre façon d'observer et
d'appréhender la politique comme le souligne ?4Annick
Percheron, sociologue française. Selon elle, la socialisation politique
ne conduit pas nécessairement à l'acceptation du système
politique, mais peut aussi conduire à son rejet. Dans les
sociétés démocratiques, la socialisation se déroule
dans un contexte marqué par des conflits de valeurs et de normes. Dans
ce cadre, les individus construisent par intériorisation progressive,
une grille de lecture qui leur permet d'interpréter la
réalité et de se positionner dans le champ politique. C'est donc
cette « grille de lecture » qui a été impactée
voir même bouleversée dans notre cas.
De plus, selon la sociologue française Anne Muxel, dans
son ouvrage?5 « L'expérience politique des jeunes
», cet événement est fondamentale au niveau de notre
socialisation politique et nous construit dans notre rapport à la
politique. Enfin, elle souligne l'importance des effets de
génération qui ont une forte influence sur la structuration
idéologique des individus, notamment en ce qui concerne la participation
ultérieure à d'autres mouvements sociaux : "les
conséquences observées sur le long terme d'une participation au
mouvement lycéen-étudiant de l'automne 1986,
révèlent les effets propres de cette "stratification de
l'expérience". Les jeunes y ayant été actifs restent, dix
ans plus tard, toujours disponibles pour s'engager dans une action collective.
La conjoncture historique et politique a donc aussi un rôle actif dans la
construction de l'identité politique.
Notre choix de se focaliser sur le cas de la Tunisie et du Maroc
s'explique par le fait que nous voulions choisir le cas du pays que l'on
connaissait le mieux, en l'occurrence le Maroc, que
4PERCHERON, Annick, La socialisation politique, Edition
Armand Colin, 1993, 210p. 5MUXEL, Anne,
L'expérience politique des jeunes, Paris, Presses de Sciences Po,
2001, 190 p.
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l'on souhaitait comparer avec un pays ou la révolte a
débouché sur un fonctionnement démocratique comme c'est le
cas en Tunisie après la chute du régime de Ben Ali.
C'est donc la comparaison entre le Maroc et la Tunisie qui nous a
semblé la plus pertinente. Nous avons donc décidé
d'étudier quelles sont les réalités politiques et sociales
qui expliquent que deux pays aux fortes similitudes socio-culturelles, Maroc et
Tunisie, ont appréhendé différemment l'avénement du
printemps arabe.
Par similitudes, on entend :
une histoire commune : le Maroc et la Tunisie
sont les seuls pays en Afrique ayant connu un protectorat français,
tandis que les autres Etats africains avaient le statut de colonies.
Une démographie similaire : La part importante de
jeunes dans ces pays est également importante et surtout analogue.
Un soubassement linguistique et religieux partagé
: La langue et la religion commune entre ces deux pays joue
évidement un rôle central dans leur histoire commune.
Une économie se proclamant du libéralisme
engendrant de grandes disparités sociales et reposant fortement sur le
tourisme: les activités touristiques représentent 7,5%
du PIB marocain? 6, taux équivalent en
Tunisie?7.
Pour notre travail, le fait d'étudier et d'expliquer les
similitudes entre le Maroc et la Tunisie, trouve sa pertinence dans leur
opposition de degré et non pas de nature
Cela signifie que même si il existe beaucoup de similitudes
celles- ci se structurent différemment dans chacun des ces deux pays, ce
qui peut apporter une valeur explicative au résultat
différencié généré par et à l'issue
du printemps arabe.
Toutefois cette approche descriptive, bien que pertinente et
nécessaire, reste insuffisante pour bien comprendre les
réalités politiques et sociales.
C'est à travers l'analyse des différences entre les
deux régimes politiques, l'examen de la perception du leader et de sa
famille, la place de la religion au sein de la société et la
corruption érigée en système de « gouvernance »
que l'on pourra comprendre les réalités politiques et sociales
propres à chacun des deux Etats. Eléments que nous
détaillerons dans le corps du travail.
Ces problématiques seront traitées selon la
méthode hypothético-déductive en comparant la situation au
Maroc et celle en Tunisie en se focalisant sur les seuls facteurs internes des
deux pays et les auteurs étudiés.
Nous verrons alors si l'organisation de la vie politique et de la
société civile, propre à chacun des deux pays et leurs
similitudes sont des éléments explicatifs des évolutions
des régimes après le printemps arabe.
6
http://www.lefigaro.fr/flash-eco/2012/11/27/97002-20121127FILWWW00763-maroc-le-tourisme-represente-7-du-pib.php
7
http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2015/03/19/20002-20150319ARTFIG00279-le-tourisme-un-secteur-cle-mais-fragilise-de-l-economie-tunisienne.php
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Pour ce faire, le premier chapitre concernera la
présentation des principales théories portant sur la
démocratisation et la transitologie afin d'expliquer par des principes
théoriques la transition que connaissent ces pays vers la voie
démocratique.
Le deuxième chapitre portera sur la description de
l'organisation de la vie politique ainsi que des structures sociales dans
chacun des pays.
Et enfin, le dernier chapitre concernera l'analyse de la
situation au Maroc et en Tunisie pour tenter d'expliquer le dénouement
différent du printemps arabe au Maroc et en Tunisie.
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